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Comboire, environs de Claix |
Ce secteur est celui du sillon subalpin méridional, où la métropole grenobloise s'étend vers le sud en occupant la plaine alluviale du Drac (voir la page "Grenoble sud") et en colonisant le pied des pentes du Vercors. Celles-ci sont constituées par le versant oriental de la crête qui court depuis le Moucherotte vers le Pic Saint-Michel en dominant la vallée du Drac entre Varces et Comboire : pour l'essentiel il donne une coupe de la succession stratigraphique du rebord subalpin du Vercors septentrional.
Toutefois le substratum rocheux de cette coupe n'est vraiment visible que dans la pente de la montagne du Moucherotte qui descend vers les Rochers de Comboire, où affleure la base de la succession visible, constituée par les calcaires du Jurassique supérieur. Par contre la constitution du versant se complique fortement au sud de la latitude de Claix où se développe l'importante particularité que constitue le Plateau du Peuil de Claix et où se révèlent aussi des complications tectoniques.
A/ Les pentes à la latitude de Comboire
Elles sont partagées en deux par la selle N-S de Cossey, couverte d'alluvions glaciaires : celles-ci masquent simplement le passage stratigraphique entre les niveaux marno-calcaires berriasiens et les marnes de Narbonne valanginiennes.
1- les Rochers de Comboire dominent la plaine alluviale du Drac, de sorte que l'on ne peut savoir s'ils représentent bien la base du chevauchement du Moucherotte, comme le suggère l'étude des pentes de Seyssins (voir la page "Moucherotte"). L'étude de ces rochers eux-mêmes y révèle la présence de deux surfaces de chevauchement, à rejets bien plus modestes, qui sectionnent le Tithonique, en le biseautant d'est en ouest, surfaces dont la géométrie comme le rejet font évidemment présumer qu'elles sont des accidents secondaires, satellites probables du chevauchement du Moucherotte :
- la première, située à l'extrémité méridionale du Rocher, fait reposer le Tithonique sur du Berriasien. Sa présence aide à comprendre pourquoi la barre tithonique, qu'elle sectionne en biseau, ne se prolonge pas vers le sud, à l'emplacement et au delà du cône de déjections de Claix (mais son rejet est insuffisant pour l'expliquer) ;
![]() Le versant ouest et l'extrémité sud du Rocher de Comboire, vu du SW, depuis le hameau des Côtes (route du plateau Saint-Ange) ØC = chevauchement de Comboire |
- la seconde tranche la série jurassique des abrupts du versant est (stand de tir de l'armée) avec une géométrie de palier et rampe très exemplaire (voir, au sujet de ces termes, la page "chevauchements").
La carte géologique au 1/50.000°
(feuille Vif) ne rend absolument pas compte de cette structure
car elle est ici assez erronée.
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Le fait que ces deux cassures sont l'une et l'autre inclinées faiblement vers l'est suggère qu'elles puissent se connecter sous les éboulis, au sud du stand de tir. Elles ne représenteraient en ce cas que les deux sections d'une même et unique surface de chevauchement, que le versant de la colline couperait deux fois en raison de son changement d'orientation du sud au nord. Toutefois on ne dispose pas de mesures suffisamment précises des azimuts des plans de cassure pour savoir s'ils sont bien identiques (ou plutôt divergents vers le NW). |
2 - Les pentes au dessus de Comboire
Elles sont affectées par des cassures mineures et surtout par les replis, d'ailleurs assez peu nerveux que l'on observe dans les pentes de rive gauche du Rif Talon : ils tordent la barre des calcaires du Fontanil en associant deux plis, à la manière d'un pli en genou*, un synclinal de la Draye Blanche avec un anticlinal de la Grotte Vallier, ce dernier surtout visible au niveau de l'Urgonien. L'un et l'autre sont déjetés vers l'est et leur axe est orienté à peu près comme la crête de la montagne (ce pourquoi ces plis sont plus visibles du côté nord de l'arête qui descend du sommet vers l'est). Leur sens de déversement est inhabituel et porte à y voir un cas de ces déformations mineures "rétrodéversées" qu'a pu localement induire tardivement le soulèvement du socle de Belledonne (voir la page "tectonique subalpine").
![]() Les pentes orientales du Moucherotte, au sud du sommet, vues de l'est, d'avion. |
D'autres plis rétro-déversés analogues mais de plus petite taille s'observent aussi à la base de la falaise urgonienne des Ramées ; ils y sont recoupés par la cassure NE-SW extensive, de rejet modeste, qui franchit la falaise urgonienne entre les points cotés 1808 et 1872 des Ramées et qui semble correspondre à la faille de décrochement de la Tinette (voir la page "Lans"). Il est donc probable que cette cassure recoupe aussi le pli de la Draye Blanche, mais cela est caché par le couvert forestier. |
On peut remarquer la très grande analogie que présente cette structure rétro-déversée avec celle qui se développe dans les pentes sud de la Pinéa, au NE de Quaix (voir aussi la page "col de Porte"), dont elle ne diffère que par son arrondi (au lieu de la fracturation du flanc commun aux deux monoclinaux couplés). Or il ne s'agit apparemment pas d'un hasard car elles se situent dans la même position structurale par rapport au système des plis N-S (au flanc oriental de l'anticlinal frontal du chevauchement de la Chartreuse orientale) et d'autre part au voisinage du tracé présumé du synclinal méso-subalpin. |
Par ailleurs la galette urgonienne de Château Bouvier, qui prolonge vers le bas les abrupts du sommet, est séparée de ces derniers sur son versant nord par le couloir de la grotte Vallier. Il est vraisemblable que ce dernier correspond à une encoche torrentielle latérale du glacier quaternaire rissien (en raison de son altitude plus élevée que celle du maximum de Würm).
C/ Les pentes au sud-ouest de Comboire
Le versant plus méridional, qui s'élève au sud du cours du Rif Talon et de son puissant cône de déjections, est constitué par deux ensemble superposés, bien distincts, les raides pentes du Peuil et à leur base celles du talus de rive gauche du Drac au niveau de Claix.
1 - Le Peuil de Claix.
À la latitude de Claix mais à mi-hauteur des pentes, le substratum rocheux visible plus au nord aux Rochers Roux (voir plus haut) disparaît d'abord sous la puissante la jupe d'éboulis du Bois de Chaumes qui s'étale au pied de la falaise urgonienne. Sous celle-ci s'instaure le replat du Peuil de Claix qui est garni de matériel alluvial glaciaire et dont le soubassement montre de nouveau des affleurements d'Urgonien. D'abord expliquée par des complications tectoniques cette réapparition est maintenant interprétée comme un énorme paquet tassé, effondré depuis la corniche sommitale du rebord subalpin à partir d'une crevasse d'arrachement qui correspond à la large concavité qu'y dessinent raides pentes boisées du Bois de Chaumes .
Ce paquet tassé se développe au sud du ravin du Rif Talon et du cône de déjections de Bouveyres, dans les pentes de nouveau raides et boisées qui supportent le plateau du Peuil. Les affleurements du soubassement rocheux y sont en effet largement masqués sous un matériel ébouleux et s'avèrent souvent désorganisés, même si leur répartition respecte globalement la succession originelle : les calcaires du Fontanil se localisent plutôt vers le bas, notamment du côté nord au dessus de Malivers, alors que les paquets d'Urgonien forment l'armature de la partie haute du rebord.
Il s'agit d'un effondrement anté-würmien, car le matériel qui le constitue est coiffé par une crête morainique qui a précisément l'altitude voulue pour correspondre au premier stade de retrait ayant suivi le maximum d'extension du glacier isérois wurmien (voir la page "glaciations").
Plus au nord, au dessus de Seyssins, la roche en place est également très largement masquée par les paquets tassés du vallon des Forges (voir la page "Moucherotte") ; mais il s'agit là d'effondrements plus récents, liés à la fonte du glacier würmien. Dans les deux cas toutefois il apparaît que c'est le niveau des marnes de Narbonne qui a fourni la surface argileuse favorable à la naissance de ces arrachements (comme c'est également le cas au Mont Granier, en Chartreuse septentrionale, d'ailleurs). |
2 - Le talus de Claix
Pour en comprendre la constitution faut d'abord se rappeler que, au sud-ouest de Claix, au delà du plateau du Peuil (voir la page "Pic Saint-Michel"), la partie inférieure du rebord subalpin voit se développer l'important ressaut du Plateau Saint-Ange, incliné vers le nord, qui suit le pied des pentes orientales du Pic Saint-Michel, sous le talus boisé de l'Hauterivien et des calcaires du Fontanil. Plus à l'est l'abrupt urgonien des Rochers de Chabloz, puis de La Bourgeoise qui soutient ce plateau s'avère supporter des couches de Lumachelle et de Sénonien ; elles ne sont pas visibles à son rebord supérieur mais seulement dans les pentes plus occidentales, à la faveur de l'entaille du Ruisseau de la Pissarde qui les fait apparaître en fenêtre tectonique sous les calcaires du Fontanil.
Ce chevauchement de Saint-Ange s'é!ève progressivement vers le sud en direction du col de l'Arc en passant sous les affleurements de marnes de Narbonne du Pré du Four (voir la page "Pic Saint-Michel"). À l'opposé il s'abaisse très clairement jusqu’à disparaître, au nord des gorges de la Pissarde, sous le tassement du Peuil : celui-ci masque non seulement son tracé exact mais également la partie haute (notamment tout l'Urgonien) de la succession chevauchée.
![]() Le rebord oriental du Plateau Saint-Ange vu d'avion, depuis le sud. ØsA = chevauchement de Saint-Ange : noter le crochon* synclinal que dessine l'extrémité orientale des affleurements urgoniens chevauchés aux Rochers de Chabloz : il est symptomatique du sens de déplacement du chevauchement. Du côté gauche (ouest) du cliché on voit se détacher la lame d'Urgonien qui forme le toit de la grotte du Pré du Four et représente une navette* entraînée sous le chevauchement (voir la page "Pic Saint-Michel"). En arrière-plan le toit du paquet tassé du Peuil est indiqué par trois flèches qui symbolisent le trajet du tassement de la dalle urgonienne, maintenant disloquée. On a en outre figuré les replis d'axe N-S "rétro-déversés" qui affectent l'Urgonien du Moucherotte. |
À l'extrémité septentrionale du tassement du Peuil de Claix les affleurements d'Hauterivien et de calcaires du Fontanil qui "émergent" à son pied aux abords de Claix (à Malivers) ne peuvent pas se prolonger en rive nord du Rif Talon par ceux, de même âge, des Rochers Roux car les affleurements de ces derniers sont beaucoup trop élevés. D'autre part ils ne sauraient se prolonger dans la direction nord, qui est celle du tracé de leurs limites stratigraphiques, au delà de Malivers car à partir de là, de l'autre côté du cône de déjections du Rif Talon, affleurent les couches berriasiennes et les marnes de Narbonne de la couverture du Rocher de Comboire.
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Ce fait implique le passage à cet endroit d'une faille, mais pas celle qu'y indique la carte géologique, car sa poursuite proposée vers le NW se heurte à la continuité, bien observable, de la barre des Rochers Roux (voir plus haut). Elle peut au contraire être orientée SW-NE, et ainsi avoir un tracé qui est caché d'une part vers l'est sous le cône de déjections et d'autre part, vers l'ouest, sous le paquet tassé du Peuil. En outre son rejet ne saurait être un simple décrochement sénestre qui expliquerait le décalage vers l'ouest de la barre tithonique des Rochers de Comboire mais pas le fait que l'on ne retrouve pas à l'ouest de Comboire (où n'affleurent que des marnes de Narbonne) la trace du chevauchement de Saint-Ange, qui devrait être décalée aussi.
La solution s'impose donc que ce dernier, ainsi que les couches crétacées de son soubassement chevauché, s'y prolongent "en tunnel", cachés sous le Jurassique de Comboire. Cela suppose que son rejet s'y amortit vers le haut avant d'atteindre le niveau de l'Urgonien, ce que le couvert quaternaire et forestier continu des longues pentes du Grand Cheval peut aisément nous cacher.
En définitive ces caractéristiques de situation géographique, de pendage et de sens de rejet de cet accident portent à y voir la réapparition sur ce versant du chevauchement du Moucherotte, et ceci d'autant plus fortement que, sur le versant opposé de la crête du chaînon, l'on observe, symétriquement, l'amortissement progressif qui affecte celui-ci du nord vers le sud dans les pentes occidentales du Grand Cheval (voir la page "Pic Saint-Michel"). Cette interprétation présente enfin l'avantage de fournir une explication de la formation et surtout de la localisation du tassement du Peuil. En effet le sectionnement en biais par ce chevauchement des couches crétacées de sa lèvre inférieure y a supprimé la barre urgonienne (ce que l'on observe d'ailleurs dès les abords septentrionaux du torrent de la Pissarde). Son absence sous les marnes de Narbonne chevauchantes a certainement beaucoup facilité le tassement de la tranche de couches supérieure, que ne retenait plus aucune barrière rocheuse à sa base. |
D/ Au niveau de la plaine alluviale du Drac, au pied des pentes orientales du Vercors, les deux échines rocheuses de Comboire et de Rochefort émergent respectivement au nord et au sud de Pont-de-Claix. L'une et l'autre sont constituées par la barre tithonique à pendage ouest (d'ailleurs plus fort dans la seconde que dans la première) et de même azimut, proche de N 165. Mais elles ne se placent pas dans le prolongement l'une de l'autre, la première étant décalée d'environ 2 km vers l'ouest par rapport à la seconde.
La surface du petit chevauchement de Comboire apparaît comme un redoublement mineur et ne peut pas être identifiée à celle du chevauchement du Moucherotte lui-même (ne fût-ce qu'en raison de la modestie de son rejet) : celle-ci doit se poursuivre sous la plaine alluviale du Drac en s'écartant assez rapidement du pied des rochers pour passer sous le cours de la rivière. Quant au chevauchement de Saint-Ange ce dernier plonge vers l'ouest sous celui du Moucherotte qui le recoupe : il doit donc disparaître en profondeur sous la montagne du Moucherotte.
![]() Les rochers de Comboire et de Rochefort vus du sud, depuis les abords sud-est de Vif (voie ferrée au sud du péage autoroutier des Crosets). ØM = tracé du chevauchement du Moucherotte et son prolongement masqué au nord des Rochers de Rochefort (mais peut-être passe-t-il en fait au dessus) : ceci n'est pas en désaccord avec l'hypothèse d'un raccordement en Chartreuse avec les chevauchements du Jalla (ØJ?) ; ØC = chevauchement secondaire, de Comboire, supposé unique mais à tracé courbe du fait de son pendage vers l'est (voir cliché et commentaires, plus loin dans cette page). NB : Le décalage apparent de la crête jurassique calcaire au niveau de Varces est seulement dû à la perspective, oblique par rapport à l'azimut des couches. |
Le prolongement vers le nord-est du tracé cartographique de l'accident qui interrompt du côté sud les affleurements tithoniques de Comboire l'amène (quelle qu'en soit la nature) à passer au nord de Pont-de-Claix et expliquer l'interruption des Rochers de Rochefort par le décalage sénestre qu'il occasionne. Il est par contre impossible de savoir si cette cassure y joue toujours un chevauchement (auquel cas elle devait passer dessus Rochefort) ou si le chevauchement passe latéralement, comme le fait celui des Bruziers qui passe au nord du Moucherotte, à un décrochement en rampe latérale (au quel cas elle passe simplement plus au nord).
Dans ce contexte interprétatif un peu modifié il convient de ré-examiner les rapports entre les trois éléments structuraux à armature de Tithonique qui se rencontrent là en venant du sud. En effet les Rochers de Comboire représentent clairement la partie basse de la succession de couches de la lèvre supérieure du chevauchement du Moucherotte, alors que ceux de Rochefort se rattachent tout aussi clairement à la succession des couches de la lèvre inférieure de celui de Saint-Ange, qui culmine aux Rochers du Pré du Four. |
Du côté opposé, vers le nord, on ne peut manquer de remarquer enfin que la poursuite des tracés des couches de ces deux groupes d'affleurements du Jurassique supérieur terminal conduit à les retrouver, au delà de la plaine alluviale de Grenoble, dans la montagne de La Bastille et du Jalla. De fait on y observe une similitude structurale remarquable, à ceci près que tous les pendages y sont un peu basculés vers l'ouest : aux affleurements de Rochefort correspondent ceux verticaux du Fort Rabot et des quais de l'Isère et ceux du Jalla les chevauchent de façon analogue avec un pendage bien plus modeste. |
cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuille Vif
Carte géologique très simplifiée de la partie orientale du Vercors à la latitude de Grenoble.
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M. Gidon (1977), publication n° 074
légende
des couleurs
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(Pic Saint-Michel) |
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![]() Comboire |
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