La montagne de la Bastille |
L'échine rocheuse qui porte le fort de la Bastille représente l'ultime extrémité méridionale du massif de la Chartreuse, que l'Isère a été astreinte à contourner avant de s'engager dans sa trouée entre ce massif et celui du Vercors. Ce promontoire porte à son pied les anciens quartiers et sur ses pentes les fortifications de Grenoble.
Ce n'est en fait que l'éperon méridional du Chaînon du Rachais, qui est armé sur toute sa longueur par le Tithonique (au sens large) du flanc occidental de l'anticlinal de l'Écoutoux, dont les couches pendent ici très fortement vers l'ouest.
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vu d'enfilade, du sud, d'avion, depuis l'aplomb du centre-ville de Grenoble. Les pentes de droite, plus douces et plus vertes, qui montent jusqu'au col de Vence, sont installées sur les marnes (Terres Noires) du coeur de l'anticlinal de l'Écoutoux. f.R = faille du Rachais ; f.J = failles du Jalla (f.Ji = chevauchement inférieur) ; f.B = faille de la Bastille ; f.S = faille de la Saucisse. (noter que f.B recoupe visiblement f.Ji, et sans doute f.J). On a représenté en outre les deux ondulations synclinales de La Saucisse et du fort Rabot. |
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Carte structurale schématique de l'éperon
rocheux Bastille-Jalla a : traces des plans axiaux des plis synclinaux ; b : traces des plans axiaux des plis anticlinaux; c : trace des plans de cassure des failles longitudinales et transversales. d : limite inférieure des couches berriasiennes; e : calcaires massifs de la barre inférieure tithonique (d'âge Kimméridgien supérieur). |
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Les détails et commentaires sur la structure de La Bastille ont été exposés dans la publication n° 094
A / La Plate-forme de la Bastille
Le téléphérique qui mène au fort de la Bastille donne accès à un panorama d'ensemble de la cuvette grenobloise que des tables d'orientation placées sur le toît du bâtiment permettent d'analyser. On en trouvera l'essentiel (pris sous un autre angle, depuis le Saint-Eynard) à la page "Grenoble".
On ne peut omettre
de signaler la présence, à côté de
la gare d'arrivée du téléphérique,
d'une stèle à la mémoire des trois géologues
fondateurs de la géologie alpine (fin du XIX ème et première
moitié du XX ème siècle), savoir : (en arrière-plan, le Jalla et le rebord de la plate-forme de la Bastille)
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Au nord des bâtiments du fort de la Bastille et de la gare du téléphérique, s'étend la plateforme de la Bastille, initialement créée par les militaires, au nord de laquelle la pente de la montagne recommence à s'élever en direction du Mont Jalla. Pour l'essentiel ce dernier est constitué par les calcaires tithoniques du flanc occidental de l'anticlinal de l'Écoutoux, dont les bancs pendent dans l'ensemble fortement, vers l'ouest. du Mont Jalla.
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Cette plateforme a été aménagée du côté septentrional par creusement dans les couches du Kimméridgien inférieur (calcaires argileux en petits bancs séparés par des lits de marnes) puis dans celles de la transition Kimméridgien-Tithonique (bancs calcaires métriques à minces lits marneux). Ces dernières sont percés d'une galerie sous roche ouverte de fenêtres successives (dénommée "grottes de Mandrin"). Toutes ces couches, qui appartiennent au flanc occidental de l'anticlinal de l'Écoutoux, ont ici un pendage presque vertical.
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À l'extrémité orientale de cette plateforme, juste à gauche de l'embranchement de la route forestière du Jalla, on peut observer que les plus basses de ces couches sont affectées d'un enchaînement de deux plis de taille métrique, l'un anticlinal l'autre synclinal . Ils ont des plans axiaux inclinés vers l'ouest et des axes qui plongent assez fortement vers le nord (vers l'intérieur de la montagne). Mais, si l'on tient compte de la polarité stratigraphique, on se rend compte que le pli antiforme* est en réalité un synclinal et le pli synforme* un anticlinal. D'autre part leur forme "en S" ne s'accorde pas avec le dessin "en Z" que devraient présenter, vus sous cet angle, des "plis parasites" formés avec l'anticlinal de l'Écoutoux (tels que ceux analysés à la page "square Cularo").
Ces microplis sont donc nécessairement étrangers à la formation des grands plis régionaux. L'interprétation la plus cohérente avec les autres données structurales est de considérer qu'ils sont antérieurs. Originellement déversés vers l'ouest, ils auraient été ensuite basculés de près de 90° vers l'ouest en même temps que toutes les couches du flanc ouest de l'anticlinal de l'Écoutoux (voir la remarque annexe, ** ci-après).
image sensible au survol et au clic Plis métriques dans les bancs à alternances
marneuses du Kimméridgien inférieur (des faisceaux
de bancs à forts lits marneux alternent avec d'autres où
les marnes n'occupent que des joints d'épaisseur centimétrique
entre les bancs calcaires). . |
B/ L'accès pédestre à la Bastille par ses pentes inférieures peut se faire par les itinéraires aménagés dans son système des fortifications, dont la ligne de remparts supérieure n'est franchissable que par 3 passages seulement.
Les deux itinéraires principaux sont celui du Parc Guy Pape, au départ de la Porte de France, et celui des pentes de Sainte-Marie du Mont, qui peut se prendre soit à l'Église Saint-Laurent soit, de préférence, à la place de la Cymaise, sur les quais de l'Isère, au niveau du monument commémoratif de la fondation de la ville de Grenoble. |
image sensible au survol et au clic |
Ces pentes sont traversées par les failles de La Bastille et de la Saucisse. Ces deux cassures parallèles ont une surface de cassure orientée en moyenne N120 et inclinée de 30 à 45° vers le NE. Cette disposition a pour conséquence que leur tracé sur la surface du sol décrit sur la carte (voir ci-dessus) un V "topographique", ouvert vers le NE, au franchissement de l'échine qui descend vers la Porte de France. Toutes deux ont un rejet de faille inverse qui est, en outre, attesté par de nombreux indices micro-tectoniques (voir ci-après).
Ces cassures semblent relativement tardives dans l'histoire tectonique du massif de la Chartreuse (voir à cet égard la chronologie des déformations à la page "Rachais").
Par ailleurs il est curieux de constater qu'à peu près au niveau où ces failles coupent la montagne à flanc de pente il se manifeste une nette diminution du pendage des couches : de sub-verticales voire légèrement renversées en général, ces dernières passent là à un pendage voisin de 45° vers l'ouest, seulement (voir ci-dessus le cliché d'avion et, plus loin le croquis des remparts orientaux). |
début de l'itinéraire !
L'itinéraire oriental, des pentes de Sainte-Marie du Mont, est décrit ci-après car c'est celui qui montre les affleurements les plus variés et les plus intéressants, surtout si (au départ du quartier Saint- Laurent) l'on s'y engage à la place de la Cymaise, sur les quais de l'Isère (plutôt qu'à l'Église Saint-Laurent) :
1 - Vingt mètres au dessus du monument commémoratif de la fondation de la ville de Grenoble, l'entaille du square Cularo permet d'observer (derrière les arbustes décoratifs) plusieurs plis de taille métrique qui sont assez représentatifs des principales déformations microstructurales des couches (voir la page "Grenoble").
2 - entre 120 à 150 m plus haut (en dénivelée) le chemin recoupe plusieurs fois la surface de cassure de la faille de la Bastille, dans ses derniers lacets, 50 à 100 m en contrebas des remparts supérieurs.
figure agrandissable Les lacets supérieurs du chemin d'accès aux remparts de la Bastille par la bordure orientale des fortifications. noter les multiples ondulations de détail qui affectent les couches (il s'agit ici des calcaires lités, sans joints marneux, du Séquanien) et l'atténuation générale de leur pendage (en moyenne proche de 45° W) dans le secteur encadrant le tracé de la faille de la Bastille (voir les commentaires dans le texte, plus haut dans la page) |
On peut en analyser d'assez près les caractéristiques micro-tectoniques, localement bien visibles, notamment en deux points étagés en contrebas des remparts :
1/ dans la branche inférieure de l'avant-dernier lacet du chemin (localisation en 1 sur le croquis ci-dessus).
Le crochon de la lèvre supérieure
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La surface du miroir de faille (pour mieux distinguer la surface dégagée du miroir on a légèrement teinté de couleur les deux lèvres qu'il sépare). |
Ici le miroir de faille surplombe localement une poche de mylonite, qui représente en quelque sorte une navette écrasée.
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D'autre part, le long de cet itinéraire ou à ses abords, on voit aussi des plis (qui ne sont d'ailleurs souvent que de simples ondulations, sans inversion du sens de pendage d'un flanc à l'autre). Ils sont rapportables à deux familles, en fonction de l'orientation relative de leurs flancs courts et longs : quelques uns ont un dessin en S (ils sont comparables à celui de la plateforme de la Bastille) ; la plupart ont un dessin en Z (ils appartiennent à la famille de microplis associés à la formation de l'anticlinal de l'Écoutoux ; cf schéma à la page "Jalla").
Un pli dans le Séquanien, au dessus des remparts supérieurs (sentier partant vers l'ouest au dessus de la première volée de marches de l'escalier du mur oriental des remparts). La canne de marche est plantée de façon à matérialiser l'axe du pli : il est fortement plongeant vers le nord (vers l'intérieur de la montagne), comme pour tous les autres de ce secteur, et comme pour l'anticlinal de l'Écoutoux, dont ils ne sont que des plis parasites. |
fin de l'itinéraire !
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(Sassenage) |
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Bastille |
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