Lacs de Chambeyron, Tête de la Fréma

la dépression suspendue entre Brec et Aiguille de Chambeyron

Les lacs de Chambeyron sont disséminés sur le fond d'un vallon qui s'élève doucement, de 2600 à 2850, en s'engageant en direction du NE entre le Brec et l'Aiguille de Chambeyron (le tracé de la crête frontière franco-italienne, qui le ceinture décrit de ce fait un net rentrant vers l'est).

Ce vallon a un large fond, globalement assez plat sur plus de 1 km de large, qui contraste avec les abrupts qui l'enserrent. En outre il est très mamelonné dans le détail avec des panneaux peu saillants garnis de roches moutonnées plus ou moins masquées sous des résidus de matériel morainique, entre lesquelles s'intercalent les lacs. Ce modelé indique qu'il résulte de son occupation par un ancien appareil glaciaire. Cet ancien glacier a dû le remplir au moins jusqu'au niveau du col de la Gypière à l'époque des glaciations quaternaires.


La partie médiane du vallon de Chambeyron
, vue de l'ouest, depuis le sommet de la Pointe de Chauvet.
ØB == surface de chevauchement de l'unité du Brec ; On distingue, sur la droite les anneaux concentriques du glacier rocheux* du couloir Bujon, dont le bourrelet frontal forme la rive orientale du Lac Long (voir le cliché en fin de page).


Depuis la fonte des glaces les flancs de l'auge* glaciaire ont été garnis par une jupe d'éboulis à peu près continue, qui est frangée vers le bas de moraines de névé et même de glaciers rocheux* : le plus beau de ces derniers est celui qui descend sous le couloir Bujon du Brec, en avançant dans le Lac Long, dont la forme est due à son étranglement entre le front du glacier rocheux et les bosses de bedrock du fond de vallon (voir clichés en fin de page).

Le soubassement rocheux de cette dépression des lacs de Chambeyron est constitué uniformément de marbres en plaquettes (du Crétacé supérieur - Éocène) dans tout l'intervale entre l'Aiguille et le Brec de Chambeyron, soit sur plus de 1 km de large. Ce fait pose la question de savoir si ces marbres en plaquettes appartiennent tous à la couverture des couches triasico-jurassiques de l'Aiguille de Chambeyron.

image sensible au survol et au clic

L'arête ouest de l'Aiguille de Chambeyron, vue du sud depuis la rive du Lac des Neuf-Couleurs.(cliché original obligeamment communiqué par M. G. Deleuil)
csri = calcschistes rouges inférieurs ; csm = calcschistes moyens (csr = calcschistes rouges intermédiaires) ; css = calcschistes argileux sombres supérieur.
acc.i? = tracé masqué (supposé) de l'accident de l'Infernetto.

Il est clair que c'est le cas pour ceux qui forment la crête qui court depuis la Pointe de Chauvet jusqu'au Brec de l'Homme et ses abrupts méridionaux. Par contre on peut envisager que ceux du fond dela dépression des lacs en soient distincts. En effet ils sont séparés de ceux de l'Aiguille de Chambeyron par une bande de schistes noirs argileux qui représentent vraisemblablement le sommet de la formation stratigraphique des marbres en plaquettes. Vers l'ouest ces schistes noirs garnissent le versant sud de la Pointe de Chauvet et se prolongent plus à l'ouest jusqu'au Pas de la Souvagea, où ils s'engagent sous le chevauchement de la nappe du Châtelet (voir la page "Souvagea").

Cette bande de schistes noirs disparaît sous la jupe d'éboulis qui garnit le pied de l'Aiguille de Chambeyron mais il paraît évident que c'est elle qui détermine la rupture de pente, puisque c'est dans son prolongement oriental qu'une bande similaire franchit la crête du Brec de l'Homme au Pas de l'Infernet.


L'extrémité amont du vallon de Chambeyron
, vue de l'ouest, depuis les pentes sud de la Pointe de Chauvet.
Observer le fond plat mamelonné de ce fond de vallon, qui s'oppose aux abrupts de ses flancs : c'est là un "profil en U" caractéristique d'une origine glaciaire.

Du côté italien du Pas de l'Infernet le tracé de cette bande, clairement pentée vers l'ouest, se dirige assez nettement vers le fond du Valle dell'Infernetto. Cela conduit à envisager qu'elle s'y prolonge par l'accident de l'Infernetto, qui détermine ce vallon (voir la page "Infernetto"). On est donc porté à envisager que ce soit cette dislocation, majeure puisqu'elle juxtapose la nappe de Chambeyron à l'est à celle de Sautron à l'ouest, qui se poursuive en France par la bande de schistes noirs, qui sépare les marbres en plaquettes de l'Aiguille de Chambeyron de ceux de la Fréma et des lacs : ces derniers appartiendraient donc à la nappe de Sautron.

image sensible au survol et au clic

La dépression des lacs de Chambeyron vue d'avion depuis le SE (de l'aplomb du Monte Ciaslaras).
ØCH
= surface de chevauchement de la nappe du Châtelet ; ac.i ? = accident de l'Infernet (contact entre la nappe de Sautron et celle de l'Aiguille de Marinet) ; ØaC = surface de chevauchement de la nappe de l'Aiguille de Chambeyron ; s.H = synclinal du Brec de l'Homme ; a.C = anticlinal de Chillol ; ØFS = surface de chevauchement de l'unité de la Font-Sancte (base des klippes de l'Aiguille Grande et du col 2831 de Chillol.
La coupe que donnent les arêtes N et S du Brec de l'Homme, qui sont transverses au reste du chaînon de l'Aiguille de Chambeyron, montre que ses couches sont ployées en un ample synclinal du Brec de l'Homme au cœur duquel se trouve la dépression des lacs. Ce pli s'enchaine avec l'anticlinal de l'Aiguille de Chillol en dessinant un"S" par l'intermédiaire d'un flanc vertical, auquel appartient l'Aiguille de Chambeyron.


À l'appui de cette manière de voir on constate que sur le versant italien, au sud de la Tête de la Fréma, la large bande de calcschistes des lacs s'épanouit encore pour envelopper le cœur jurassico-triasique du grand anticlinal du Passo dell'Asino qui y affecte les couches triasico-jurassiques de la nappe de Sautron (voir la page "Stroppia"). Comme ce pli disparaît vers le nord en s'enfonçant sous ces calcschistes, les affleurements des lacs se situeraient grossièrement à la voûte de ce dispositif anticlinal (débarrassé par l'érosion des termes marneux du sommet de la formation calcschisteuse).

image sensible au survol et au clic

Les montagnes du revers méridional (italien) du chaînon de Chambeyron, vues du S-SE depuis l'aplomb de Saretto.
a.rB = anticlinal de la Rocca Bianca ; s.mC = synclinal de la mine de Chiapera ; f.St = faille de Stroppia ; a.pA = anticlinal du Passo dell'Asino (charnière orientale de l'anticlinal du Rouchouse) ; ac.I = accident de l'Infernet (limite entre nappe de Sautron et de l'Aiguille de Chambeyron).
n.Ch = nappe du Châtelet (unité du Brec) ; n.S = nappe de Sautron ; n.aC = nappe des Aiguilles de Chambeyron ; u.M = unité de Marinet ; u.aM = unité des andésites de Marinet ; u.CC = unité des calcschistes de Ceillac-Chiapera ; u.R = unité du Roure.
Le matériel constitutif de ces entités tectoniques est siliceux pour u.M, u.aM et u.R ; il est au contraire "calcaire" (carbonaté) pour n.Ch, n.S, n.aC et u.CC.

En direction opposée par rapport à l'Aiguille de Chambeyron les marbres en plaquettes qui forment le plancher le plus occidental de la dépression, en rive orientale du Lac Premier, s'engagent sous le Brec, comme ceux de Stroppia : ils sont sans doute à rapporter, eux aussi, à la nappe de Sautron.

image sensible au survol et au clic

La face nord du Brec de chambeyron, vue depuis le refuge de Chambeyron
ØC = surface de chevauchement de la nappe du Châtelet ; ØB == surface de chevauchement de la digitation du Brec proprement dite.


Du côté sud ils s'enfoncent sous la crête portant le refuge de Chambeyron, qui appartient à la nappe du Châtelet, depuis le Pas de La Couletta jusqu'au Pas de la Souvagea : leur limite avec ceux de l'Aiguille de Chambeyron (nappe de Chambeyron) disparaît sous la crête de la Souvagea (nappe du Châtelet) à l'ouest du Pas de la Souvagea, mais il est envisagé qu'elle ressorte au jour dans les pentes qui en tombent vers l'Ubaye (voir la page "Souvagea").

image sensible au survol et au clic

La cuvette du Lac Premier
, vue du nord, depuis les abords du Pas de la Souvagea.
On distingue parfaitement le verrou* (bosse garnie de végétation, sous le mot "n.Châtelet") qui ferme la dépression du lac et au revers duquel s'abrite le refuge. Les abrupts qui soutiennent la bosse du Replat des Génisses representent le flanc gauche (méridional) de la vallée à fond plat par laquelle le glacier poursuivait son cours plus en aval en rabotant les dalles moutonnées des ravins des Passets (voir à la page "sommet du Brec").
On a figuré quelques détails stratigraphiques et quelques unes des cassures mineures du Replat des Génisses
u.Brec = unité (digitation) du Brec ; ØCh = surface de chevauchement de la nappe du Châtelet ; a.P = anticlinal des Passets ; f = failles mineures.

Pour illustrer ce qui concerne le relief des environs des lacs, on trouvera ci-après deux vues montrant de plus près comment le Lac Long, hébergé originellement dans une cuvette assez évasée du bedrock de calcschistes métamorphiques ("marbres en plaquettes"), continue à se rétrécir devant l'avancée du front du glacier rocheux du pied du couloir Bujon.


Le Lac Long
vu d'amont (du NE), en aout 2009 (cliché original obligeamment communiqué par M. Claude Mauguier)
Le lac est réduit là à un étroit corridor entre les roches moutonnées de la Croix Bujon, à l'ouest, et le front du glacier rocheux alimenté par les éboulis descendant du couloir Bujon, qui l'envahit en progressant d'est en ouest. L'avancée du glacier rocheux provoque le bombement de son front, d'où se détachent, de ce fait, de gros blocs qui tombent dans le lac à son pied.




Le Lac Long
, vu du sud, dans l'enfilade de son allongement, en 1955.
Photo souvenir, où l'on voit l'auteur du site au cours de la deuxième année de son travail de thèse de doctorat sur "la zone briançonnaise aux abords de la frontière franco-italienne" (cf. publication n°24). À cette époque la photo couleur était encore rare et chère pour la bourse d'un jeune enseignant ...


Deux coupes sur la transversale de Fouillouse et des lacs de Chambeyron. extrait de la publication n° 024 (retouché).
n.Ch = nappe du Châtelet ; ac.inf.? = accident de l'Infernetto (hypothétique) ; n.aC = nappe de l'Aiguille de Chambeyron ; ØFS = surface de chevauchement de la nappe de la Font-Sancte.

 


Diverses pages relatives au massif du Chambeyron :
Vue d'ensemble du chaînon du Brec, Le Brec lui-même , La crête méridionale du Brec , La dépression des lacs de Chambeyron , l'Aiguille de Chambeyron , Fouillouse et La Souvagea.


consulter l'aperçu structural général sur la zone briançonnaise méridionale


cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuille Aiguille de Chambeyron

Carte géologique simplifiée du massif de Chambeyron
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M.Gidon (1977), publication n° 074

Aiguille Grande

Aig. de Chambeyron

Marinet
Souvagea

LOCALITÉS VOISINES

Infernetto

Châtelet

Fouillouse

Stroppia

 accueil HAUTE UBAYE

début de la page

sommaire de GEOL_ALP

Aller à la page d'accueil du site
Dernières retouches apportées à cette page le 4/07/18