La Tête de Sautron et son versant SE

crêtes et vallons dominant, à l'ouest de Saretto, les Sources de la Maira

Sur la frontière franco-italienne, à l'est de La Meyna, la Tête de Sautron est un important sommet (3165 m). d'où se détache vers l'est une crête rocheuse, entièrement italienne, qui court en ne s'abaissant que faiblement jusqu'au sommet de la Rocca Bianca (3021 m), où elle se termine en tombant par 1200 m d'abrupts sur la haute vallée de la Maira peu en amont de Chiapera. Cette crête, transversale à la ligne frontière de partage des eaux, sépare la dépression suspendue de Stroppia, au nord, de celle des vallons des sources de la Maira au sud, à la latitude de Saretto (voir le cliché en fin de page).

Au sud-est de la Tête de Sautron la crête de partage des eaux franco-italienne s'abaisse fortement et n'est plus marquée par aucun sommet rocheux, jusqu'à son rehaussement à la Tête de Moïse. Du côté français ce tronçon correspond aux alpages des sources du torrent du Rouchouse (voir la page "Tête Dure"). Du côté italien il domine un ensemble de vallons, tous plus ou moins secs, qui convergent en patte d'oie vers les sources de la Maira en séparant des crêtes rocheuses secondaires : la plus importante de ces dernières culmine à la Punta Le Teste (2594).

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La Meyna et la Tête de Sautron (versant ouest) vues du sud-ouest, depuis la Viraysse (voir plus loin la suite vers la droite)
f.sM = faille sud de la Meyna, à peu près E-W ; s.M = synclinal de la Meyna, à coeur de marbres en plaquettes (cs) et à axe très transverse ; f.Po = faille de la Portiolette.
ØS = surface de chevauchement de la nappe de Sautron ; ØCh = surface de chevauchement de la nappe du Châtelet (ØCh) La faille du Ruburent passe au col de la Viraysse même, avec un tracé qui suivrait grossièrement le bord inférieur du cliché.
(plus de commentaires à la page "Meyna").

La Tête de Sautron elle-même a l'allure, du côté français, d'un puissant bastion rocheux, jumeau de celui de La Meyna, qui domine et ferme la dépression du Rouchouse à son extrémité nord. Ses abrupts sont entièrement formés de calcaires et dolomies triasiques qui reposent en charriage, notamment au col de Sautron, sur les calcschistes du Crétacé supérieur - Éocène qui constituent le sommet de la succession stratigraphique affleurant dans le vallon du Rouchouse et sur la crête frontalière au sud de ce col.

Ces affleurements sont presque les plus septentrionaux d'un important ensemble structural qui a été dénommé "nappe de Sautron" et qui se poursuit très loin vers le sud, essentiellement en territoire italien, en passant par la Tête de Moïse, jusqu'à la Rocca La Meja.


Au sud de la Tête Sautron s'ouvre du côté français l'ample espace des alpages du Haut Rouchouse. Les collines qui accidentent cette dépression et les petites montagnes qui la bordent le long de la crête frontière sont sculptées dans les terrains de la nappe du Rouchouse. Ils y sont ployés en un large anticlinal et abaissés, par le jeu de la faille du Ruburent, par rapport au chaînon de Tête Dure, de sorte que le Trias du coeur anticlinal n'y perce guère et reste le plus souvent masqué sous le Jurassique (essentiellement du Dogger), qui disparaît lui-même très souvent sous les marbres en plaquettes (ce qui explique la mollesse du relief).

Du côté sud-oriental, au delà du col de la Gipière, la dépression du Rouchouse s'étrangle, avant de se poursuivre par celle de l'Orrenaye (voir la page "Orrenaye". Cela vient de ce que les terrains tendres de la partie supérieure de la voûte anticlinale dessinée par la nappe du Rouchouse s'y enfoncent doucement sous les calcaires triasiques de la nappe de Sautron, qui forment le chaînon de la Tête de Moïse).

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Le vallon du Rouchouse et les crêtes qui le ferment du côté oriental vus du nord-ouest, depuis le sommet de la Viraysse.
n.S = nappe de Sautron ; n.Ro = nappe du Rouchouse ; a.R = anticlinal du Rouchouse ; f.Ru = faille du Ruburent ; u.TD = unité de Tête Dure (compartiment occidental de la nappe du Rouchouse).
Noter le contraste de relief entre la dépression du Haut Rouchouse et les montagnes du chaînon de Tête Dure, qui la bordent du côté ouest (droit ). Il est dû à ce que la première est ouverte dans les marbres en plaquettes (cs) de la partie haute de la succession de la nappe du Rouchouse, tandis que les secondes sont formées par la partie inférieure de la succession de cette nappe, surélevée par la faille du Ruburent.
À la voûte de l'anticlinal du Rouchouse (a.R) le Trias et le Jurassique de la nappe du même nom n'émergent qu'à peine de leur épaisse couverture de marbres en plaquettes, où l'érosion a sculpté des montagnes en forme de taupinières.
Plus au nord cet ensemble de calcschistes s'enfonce sous le chevauchement de la nappe de Sautron.
f.Po = faille de la Portiolette (son prolongement méridional présumé) : cette cassure mineure, longitudinale par rapport à la voûte de l'anticlinal du Rouchouse, en abaisse le flanc oriental (gauche).

Le versant italien de la crête frontière, au sud de la crête Sautron - Rocca Bianca, contraste fortement avec le versant français, par son relief mais aussi par ses dispositions tectoniques.


Le sommet de la Tête de Sautron, versant est (italien) vue du sud, depuis la Tête de la Costa del Col (extrait de la publication n° 024 )
Le Trias calcaire dessine deux beaux plis couchés déversés vers le sud-ouest qui sont très vraisemblablement des "plis d'entraînement" induits par le cisaillement le long de la surface de charriage de la nappe de Sautron, lors de sa mise en place initiale. L'axe de ces plis, NW-SE, doit donc être à peu près perpendiculaire à la direction de son mouvement.

Les abrupts méridionaux de la Tête de Sautron se prolongent vers l'est jusqu'à la Rocca Bianca, par une puissante muraille le long de laquelle les couches du Trias moyen (principalement calcaires anisiens et ladiniens) dessinent en continu l'ample courbure du flanc oriental de l'anticlinal du Rouchouse. Au pied de cette ligne de falaises le profond vallon d'Il Vallonasso, qui descend du col de Sautron masque, sous son fond garni d'éboulis, le tracé de la surface de chevauchement de la nappe de Sautron (qui s'y enroule également en un anticlinal déjeté vers le NE).

En avant de ce vallon d'Il Vallonasso on entre dans la fenêtre tectonique à la faveur de laquelle le matériel de la nappe du Rouchouse est mis à nu par l'érosion : sur le revers italien de la crête frontière elle a décapé les marbres en plaquettes du sommet de la succession stratigraphique (qui forment cette crête) et souvent atteint jusqu'aux calcaires du Ladinien inférieur.

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La dépression et les crêtes du haut vallon du Rouchouse, vus du SE d'avion.
u.tD = unité de Tête dure (nappe du Rouchouse occidentale) ; f.Ru = faille du Ruburent ; n.S = nappe de Sautron ; n.R = nappe du Rouchouse ; a.Ro = grande voûte anticlinale du Rouchouse (déjetée vers la droite).



Ces couches y dessinent le flanc oriental de l'anticlinal du Rouchouse, fortement déjeté vers le NE, lequel est bien dessiné par le Dogger qui forme la crête culminant au sommet 2746, entre le vallon des Prati Murtier (sous la Costa del Col) de celui du Vallonasso (qui descend du col de Sautron). En outre elles y sont affectées d'un couple sigmoïde de replis dont le composant anticlinal détermine le petit sommet de la Punta Le Teste.

Le repli anticlinal de la Punta le Teste est bordé du côté ouest par un synclinal dont le coeur de marbres en plaquettes, d'ailleurs pincé, traverse plus au nord la crête de la Punta Bessie. L'attitude sub-verticale du plan axial de ces deux plis est un peu surprenante car elle tranche avec les pendages plus modérés observables plus à l'ouest sous la Tête de l'Alp et la Costa del Col. Elle s'explique sans doute par le fait qu'il s'agit de replis initialement déversés vers l'ouest. En effet les couches du flanc oriental de l'anticlinal de la Punta le Teste sont également redressées à la verticale et même basculées vers le NE au niveau du Lac Visaisa (où elles disparaissent en s'enfonçant définitivement en profondeur), conformément à l'enroulement qui affecte aussi les couches de la nappe de Sautron, qui affleurent entre ce lac et les sources de la Maira.


Coupes SW-NE , orthogonales à la crête frontière de partage des eaux entre Ubayette et Maira.
extrait de la publication n° 024 , 1958, retouché 2018)
n.P = nappe du Parpaillon ; u.S = unité de Serenne ; u.tD = unité de Tête Dure ; n.Sa = nappe de Sautron ; n.Ro = nappe du Rouchouse ; u.Ma = unité de Marinet ; u.aM = unité des andésites de Marinet.
s.M = synclinal de Meyronnes ; a.pT = anticlinal de la Punta Le Teste ; a.rB = anticlinal de la Rocca Bianca ; s.mC = synclinal de la mine de Chiapera ; a.pA = anticlinal du Passo dell'Asino.
ac.sO = accident de Saint-Ours ; f.R = faille du Ruburent ; a.Ro = anticlinal du Rouchouse ; ac.i = accident de l'Infernetto ; f.B = faille de La Barge ; f.C = faille de Ceillac.


Les couches triasiques calcaires et jurassiques constitutives de la nappe de Sautron basculent également à la verticale sous l'effet du ploiement par l'anticlinal du Rouchouse, plus précisément du repli anticlinal de la Rocca Bianca par lequel son flanc oriental se déverse par une charnière presque en genou. Ce sont les couches de cette nappe de Sautron qui forment le dernier ressaut dominant le fond de la Valle Maira à hauteur de la transversale de Saretto et c'est plus précisément des calcaires du Dogger que sont issues les sources de la Maira.

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Les montagnes de la rive occidentale de la vallée de la Maira à la latitude de Saretto.
n.R = nappe du Rouchouse ; n.S = nappe de Sautron ; u.M = unité de Marinet proprement dite ; u.aM = unité des andésites de Marinet ;
a.R
= anticlinal du Rouchouse


Les sources de la Maira représentent sans doute la principale résurgence des eaux absorbées par les roches calcaires de ce versant occidental de la Valle Maira. Elles sont suspendues, en rive droite, au dessus du lit de cette vallée dont le talweg plus amont (au nord-ouest), est celui de la Valle del Maurin (voir la page "Stroppia").


En outre les couches de la nappe de Sautron sont affectées dans le versant oriental de la Rocca Bianca par un repli à cœur de calcaires du Dogger qui est déjeté vers le NE et dont le tracé descend vers le SE à flanc des escarpements. On peut l'appeler synclinal de la mine de Chiapera car c'est, semble-t-il, dans les couches de base de ce Jurassique que devaient se trouver ces anciennes exploitations. Comme pour les replis de la Punta Le Teste dans la nappe du Rouchouse, il s'agit certainement d'un repli initialement déversé vers le SW puis basculé vers l'est par le déversement de l'anticlinal du Rouchouse.


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d'après une image extraite de "google-earth"
Le versant NE de la crête frontière et la valle del Maurin, à l'ouest des sources de la Maira, vus du sud-est.
ØS = surface de chevauchement de la nappe de Sautron, ployée par l'anticlinal du Rouchouse ; a.pT = anticlinal de la Punta Le Teste ; u.M = unité de Marinet proprement dite ; u.aM = unité des andésites de Marinet ; f.B = faille de La Barge ; f.C = faille de Ceillac.

 


consulter l'aperçu structural général sur les montagnes de l'Ubayette et de la Haute Stura
consulter l'aperçu structural général sur la zone briançonnaise méridionale


cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuille Larche

Carte géologique simplifiée
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M. Gidon (1977), publication n° 074

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