Val Bandia et Val Chiaffrea (versant sud du colle del Mulo) |
Entre Stura et Maira la crête de partage des eaux s'abaisse au Colle del Mulo, qui tombe du côté septentrional sur l'étroite vallée de la haute Marmora. Son versant méridional, plus épanoui et moins déclive, est partagé en deux vallons, tous deux affluents de rive gauche de la Stura, celui de Bandia et celui de Chiaffrea, que sépare, au sud de la Testa di Bandia, l'échine de la Cima Piconiera : ils prolongent et terminent du côté est l'ample dépression des hauts alpages des cols de Margherina et de la Gardetta.
Par ailleurs le Colle del Mulo marque un changement radical du relief de cette crête, du fait que le chaînon calcaire acéré de la Meja (voir les pages "Meja" et "Margherina") s'y termine au Becco Grande et y fait place, à partir de la Cima di Test en direction de l'est, à de lourdes échines calcaires à relief karstique.
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Le vallon supérieur de Bandia, vu du SW depuis la Cima del Gias.
n.S = nappe de Sautron ; u.Mg = unité des gypses de Margherina ; n.rP = unité Test-Omo (attribuée à la nappe de Rocca Peroni) ; u.Gi = unité subbriançonnaise du Giordano ; u.Pi = unité subbriançonnaise de la Piconiera ; f.Be (?) = tracé présumé de la faille de Bernoir.
Ce changement radical du relief est lié à la présence d'une importante dislocation transverse, l'accident du Colle del Mulo, qui traverse le chaînon au col oriental 2549 (où elle est soulignée par une bande de gypses). Il détermine un changement marquant dans le dispositif structural de ces montagnes, puisque les couches triasiques sub-verticales qui forment, à l'ouest du col, la crête du Becco Grande y font place à l'est à des couches d'âge similaire mais qui dessinent au contraire, à la Cima di Test, une large voûte anticlinale.
Coupe à l'ouest du colle del Mulo (haut val Bandia) :
Au = autochtone ; S = unité subbriançonnaise du Salè ; Pi = unité subbriançonnaise de la Piconiera ; Gi = unité subbriançonnaise du Giordano ; Ru = unité du Monte Ruissas ; Ma = unité des gypses de Margherina ; Sa = nappe de Sautron ; FB = faille de Bernoir (tracé présumé) ; FBG = faille du Becco Grande.
On est tenté d'interpréter cette dislocation comme un décrochement sénestre, car on retrouve, 1 km au nord de la Cima di Test, une succession verticale assez similaire, par la nature de se termes et leur polarité, à celle du Becco Grande (voir la page "Esischie").
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Le versant méridional du colle del Mulo et les entonnoirs de dissolution dans le gypse du versant oriental de la Testa di Bandia, vus de l'échine septentrionale de la Cima Piconiera.
ØM = chevauchement du colle del Mulo ; f.bG = faille du Becco Grande.
Mais il ne s'agit pas simplement d'une telle cassure car la surface de ce contact tectonique, loin d'être sub-verticale, a un pendage vers l'ouest relativement faible, de sorte que les couches occidentales, du Becco Grande, s'avancent en chevauchement vers l'est sur celles de la Cima di Test. De plus son tracé est jalonné par une bande de gypses et cargneules qui a un dessin cartographique incompatible avec cette interprétation. En effet (voir la page "Valcavera") il contourne la voûte de l'anticlinal de Test et dessine une apophyse rentrant vers l'est au cœur du synclinal de Valcavera : ce dessin témoigne de ce que la surface de ce contact tectonique est plus ou moins tangentielle à celle des couches de l'unité chevauchée : en fait elle s'avère se raccorder à la surface de charriage des gypses de l'unité de Margherina.
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Le versant sud du Becco Grande (partie supérieure du Val Chiaffrea), vu du sud-est, depuis le colle Valcovera ; en premier plan les affleurements de gypses du versant ouest du col.
ØM = chevauchement de Margherina et du col del Mulo ; u.Ru = unité du Ruissas (couverture décollée du Trias dolomitique de l'anticlinal de la Cima di Test ?) ; n.rP = nappe de Rocca Peroni.
Coupe sur la transversale du colle del Mulo, selon la crête de partage des eaux entre val Chiaffrea et val Bandia.(extrait de la publication n° 059, M.GIDON 1972, présentation retouchée)
Sa = nappe de Sautron (FBG = faille du Becco Grande) ; Ø1 = surface de chevauchement de la nappe de Sautron (et des gypses de Margherina = Ø1') ; Ma =
Gypses et cargneules de la Margherina (coussinet basal de l'Unité
de la Gardetta) ; RP = nappe de Rocca Peroni ; Ru =Unités du
Monte Ruissas et du Vallone Serour ; Gi = Unités du Giordano,
du Val Chiaffrea, des Due Uomini et du Gias Rabbie ; Pi, = Unités
de la Piconiera et de Servagno.
La coupe que donne, plus à l'est, le Val Chiaffrea est transversale, comme celle du Val Bandia, aux lignes structurales majeures. Elle montre dans sa partie amont la terminaison des affleurements gypseux rattachables à l'unité de Margherina : ces derniers y entourent une unité uniquement formée de calcaires du Dogger qui forment des pitons saillants dans le vallon et, en rive gauche, au sud du col de Valcavera, la crête rocheuse du Monte Ruissas.
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Le haut Val Chiaffrea, vu de l'est depuis le sommet du Monte Omo (d'après un cliché GoogleEarth "Panoramio" dû à M.
G.Prunotto).
ØM = chevauchement de Margherina et du col del Mulo ; u.Mg = unité des gypses de Margherina ; u.Ru = unité du Ruissas (couverture décollée du Trias dolomitique de l'anticlinal de la Cima di Test ?) ; n.rP = nappe de Rocca Peroni (anticlinal de la Cima di Test et synclinal du Val Cavera).
L' unité du Ruissas est constituée par les affleurements de calcaires du Dogger qui pointent sous les gypses de Margherina et qui semblent ne pas pouvoir être rattachés aux autres ensembles rocheux avoisinants. Sa signification n'est pas claire : on a considéré qu'il s'agissait d'écailles entrainées sous l'unité de Margherina (voire emballées dans la masse de ses gypses) et plus précisément qu'elles aient sans doute été arrachées par décollement à la voûte de l'anticlinal de la Cima di Test (car la succession affectée par ce pli se termine vers le haut par des dolomies ladiniennes). En tous cas le plus important des témoins de cette unité (celui du Monte Ruissas) repose sur le crétacé supérieur qui garnit l'extrémité occidentale de la voûte anticlinale du Monte Omo par un contact tectonique que souligne un fort coussin de cargneules.
Coupe selon la transversale du colle Valcavera (extrait de la publication n° 059, M.GIDON 1972, présentation retouchée)
Sa, Nappe de Sautron ; Ma,
Gypses et cargneules de la Margherina (coussinet basal de l'Unité
de la Gardetta ; 1 = sa surface de chevauchement) ; RP, Nappe de Rocca Peroni (RPt = unité de Test) ; Ru, Unité du
Monte Ruissas ; Gi, Unité des Due Uomini.
Le fait notable qui marque la transversale du vallon de Chiaffrea est que l'on voit réapparaître, sur sa rive gauche, un matériel calcaire briançonnais bien caractérisé par les calcaires triasiques qui constituent l'ample voûte anticlinale du Monte Omo. Or ce matériel affleure finalement dans le prolongement de celui, appartenant à la nappe de Rocca Peroni, qui avait disparu plus à l'ouest, au Colle Cologna.
Comme cette disparition résultait en bonne part de son recouvrement par l'unité gypseuse de Margherina (voir les pages "Margherina" et "Bodoira") il est logique que ce matériel revienne au jour là où cesse l'extension vers l'est de cette dernière unité.
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Les crêtes de la rive gauche du vallon Chiaffrea, vues des pentes inférieures du Becco Nero (d'après un cliché GoogleEarth "Panoramio" dû à M. D. Saredi).
D'autre part, sur le flanc méridional de l'anticlinal du Monte Omo, ce matériel briançonnais ne se montre nullement chevauchant sur les unités subbriançonnaises qui forment, plus au sud, les crêtes du Monte Salè et du Monte Savi : au contraire ces unités lui sont juxtaposées par le système de failles sub-verticales du colle Salè et elles y sont redressées conformément à l'attitude de ces dernières (voir la page "Salè").
Le couches du Dogger rapportées à l'unité du Ruissas y sont même apparemment ployées en un synclinal pincé : on peut y voir le crochon d'un mouvement d'abaissement relatif du compartiment septentrional de la faille supposée prolonger celle de Bernoir.
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Le versant occidental de la crête Omo-Salè, vu du NW depuis la Testa di Bandia.
n.rP = nappe de Rocca Peroni (unité de l'Omo) ; u.Ru = unité du
Monte Ruissas (et du Vallone Serour)
; f.Be = faille de Bernoir (prolongement présumé) ; u.Gi = unité du Giordano,
des Due Uomini et du Gias Rabbie ; u.S = Unité du Salè ; "Di" = calcschistes du Dogger inférieur ; "Ds" = calcaires du Dogger supérieur.
Ces faits ont conduit aux deux conclusions interprétatives suivantes :
a - C'est la nappe de Rocca Peroni, toujours ployée par l'anticlinal du Rouchouse et le synclinal du Bric - Oserot, qui se poursuit en formant les deux chaînons (Test et Omo) qui encadrent le haut Val Cavera
b - La grande faille du Ruburent, que prolongeait, à l'est des lacs de ce nom, la faille de Bernoir se poursuit ici, par le colle Salè puis le vallone Serour, pour rejoindre en aval du Gias Viridio le val de l'Arma et en déterminer alors le tracé jusqu'aux approches de Demonte.
Il ne faut toutefois pas dissimuler que les hiatus d'affleurement dus à l'extension des formations superficielles quaternaires, tant dans le Val Chiaffrea que dans celui de Bandia ne permettent pas d'y déterminer avec certitude le tracé de la faille Bernoir - Colle Salè : celui adopté dans la publication n° 059 de 1972 est interprétatif et assez hypothétique.
Quant à la raison pour laquelle les affleurements de gypses de la Margherina ont pris ici la place remarquable qu'ils occupent elle reste obscure (s'agit-il de l'intervention d'un diapirisme* avant ou après le charriage ?) ; il en va de même de la raison pour laquelle, sur cette transversale, ce matériel évaporitique semble représenter, à lui seul, toute la couverture carbonatée de la nappe du Rouchouse.
consulter l'aperçu structural général
sur la zone briançonnaise méridionale
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sur la Haute
Stura
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