Bout du Monde (sources du Giffre) |
La vallée des sources du Giffre, allongée SW-NE, se termine en un cul de sac nommé le Bout du Monde entre le chaînon du Mont Ruan à l'est et les pentes du Mont Sageroux à l'ouest (voir la page "Vogealle"). Son entaille, se caractérise notamment par son encaissement entre des versants boisés très escarpés. Ceux-ci sont typiques d'une vallée anciennement occupée par une langue glaciaire ; mais en fait leur épaulement supérieur de rive gauche prolonge vers l'amont celui de la partie septentrionale du cirque du Fer-à-cheval, qui à une origine structurale puisqu'il correspond à la limite entre les calcaires argileux du Jurassique moyen et les marnes (Terres Noires) de la base du Jurassique supérieur.
Les principales des sources du Giffre y sont situées sur les pentes de sa rive gauche ; ce sont, comme dans les abrupts NE du Fer à Cheval, des résurgences qui se localisent vers le sommet de cet épaulement. Les eaux qui y ressortent sont alimentées par un système "karstique"* d'infiltration dans les fissures de calcaires du Jurassique supérieur du chaînon du Mont Ruan - Tenneverge. Elles y sont drainées vers l'ouest (et non vers l'est dans la vallée de la Barberine) du fait que les couches y pendent dans l'ensemble dans cette direction.
À la faveur de la montée vers le NE des axes des structures cette vallée troue encore plus profondément qu'au Fer à Cheval la carapace des terrains crétacés et du Jurassique supérieur : elle tranche donc les plis serrés qui affectent le Crétacé inférieur et surtout le Jurassique supérieur, mais avec une obliquité faible, de l'ordre de 30° (elle ne leur est pas du tout orthogonale !).
Elle le fait d'ailleurs sensiblement à l'emplacement de l'articulation des deux ondulations majeures presque N-S que sont l'anticlinal des Platières et le synclinal du Criou (l'axe de ce dernier grand pli franchit la frontière franco-suisse en passant à peu près par le sommet du Petit Mont Ruan) : cela a pour effet que les plans axiaux de plis sont plutôt pentés vers le SE en rive droite (occidentale) et plus proches de l'horizontale en rive gauche (voir la coupe d'ensemble en page "massif de Sixt"). |
Le tracé, orienté N40, du fond de la vallée lui fait couper en oblique la charnière, joliment dessinée par le Jurassique moyen, de l'anticlinal du Bout du Monde, laquelle est orientée à peu près N70. Ce pli fortement déversé vers le NW (de la rive gauche vers la rive droite), est le plus profond de tous ceux visibles dans le massif de Sixt : il représente peut-être le cœur du vaste anticlinorium couché de la nappe de Morcles. En tous cas, au fond du Bout du Monde l'entaille du Giffre met à nu, sous son cœur de Bajocien, le Tithonique de son flanc NW : il est en outre affecté de replis dont la polarité flancs courts / flancs longs confirme que ses affleurements appartiennent au flanc inverse du pli.
Par contre les Terres Noires, qui forment en rive droite la vire menant aux chalets du Boret, sont absentes en rive gauche, entre l'Argovien et le Bajocien. Cette suppression locale semble s'expliquer par le fait que c'est là qu'aboutit le prolongement sud-ouest de la faille occidentale des Ottans ; cette cassure, bien visible au niveau du Tithonique des crêtes (voir la page "Mont Ruan") est une faille extensive qui a joué avant le plissement et qui a dû être tordue et renversée lors de celui-ci. |
Les rochers que gravit le sentier pour s'échapper du fond de vallon appartiennent à ces couches tithoniques, qui montrent de beaux replis en genou* déversés vers le NW (comme l'est le pli principal).
On peut constater en outre, grâce à la forte dénivelée de cette entaille de la vallée des sources du Giffre, qu'il y a passage dysharmonique depuis les plis couchés, qui affectent la partie inférieure de la succession stratigraphique en fond de vallée), jusqu'aux chevauchements plats qui se développent à partir du niveau de la barre tithonique (voir les clichés ci-après). Ce changement de style est dû à la fois à la différence de nature des roches (gros bancs calcaires du Tithonique, peu propices au plissement de courte longueur d'onde) et au passage à un "niveau tectonique"* inférieur auquel l'accroissement de pression et de température favorise un plissement par "glissement-aplatissement", spécialement pour les couches plus riches en marnes du Dogger.
Les escarpements du versant nord du cirque (sous le Petit Mont Ruan et la Tête des Ottans), en raison de leur orientation différente (à peu près NW-SE), montrent les plis en coupe presque transversale (donc avec leur forme véritable). On y voit que sous le chevauchement du Mont Ruan, c'est-à-dire au plus profond de l'empilement tectonique le Tithonique lui même est affecté par un plissement foisonnant mais à assez grande longueur d'onde (voir la page "Ruan").
Mais ces plis du Tithonique ne font qu'affecter le flanc normal de l'anticlinorium de la nappe de Morcles dont l'anticlinal du Petit Mont Ruan est le pli axial. Au niveau du Tithonique la charnière de ce pli, bien dessinée sur le versant suisse de la crête frontière n'affleure pas sur le versant français, ceci en raison du plongement axial ces structures vers le SW. Compte tenu de son orientation son tracé doit sans doute passer sensiblement à l'aplomb du Lac de La Vogealle, pour se prolonger sous la combe de la montagne d'Oddaz, où elle doit correspondre au cœur de l'anticlinal du Tuet, qu'y dessinent les couches du Crétacé (voir la page "Dents Blanches"). Or on constate que guère plus au sud-est l'entaille du Fer à Cheval traverse tout le Jurassique et atteint le socle cristallin sans montrer de trace convaincante d'un flanc inverse : c'est donc en se déplaçant vers le SW qu'intervient ce changement majeur par rapport à la structure observable en Suisse sur la transversale des Dents du Midi et de la Tour Sallière (voir la page "Tour Sallière"). |
Concernant le prolongement vers le sud de la structure observable au Bout du Monde on doit d'abord observer que les couches tithoniques en flanc inverse s'enfoncent vers l'aval sous le lit du Giffre, en même temps que le reste du pli, du fait du plongement axial général.
Or plus au sud encore, l'érosion qui a ouvert le cirque du Fer à Cheval ne les fait pas réapparaître (ce qui n'est pas étonnant puisqu'elle est moins profonde encore, du fait de ce plongement axial). Au contraire elle a mis à nu sous la série de couches bajociennes du flanc SE de l'anticlinorium du Ruan des affleurements de Trias qui constituent la "boutonnière des Pellys", supposée faire réapparaître le soubassement autochtone de la nappe de Morcles. De fait on observe là une coupe identique à celle de la couverture sédimentaire du massif cristallin des Aiguilles Rouges, longuement visible sur le versant oriental de la crête frontière : le Lias-Dogger y repose, le plus souvent à l'endroit aussi, selon toutes apparences (voir la page "Barberine"), sur le Trias également à l'endroit. Cela se fait par l'intermédiaire d'une lame de quelques dizaines de mètres d'épaisseur de calcaires clairs attribués au Jurassique supérieur, dont un lambeau semble exister à l'est des Pellys mais qui ne se poursuit pas au delà vers le sud-ouest (on n'observe pas ces calcaires non plus à la latitude du Buet, dans la boutonnière des Fonds où affleure également le Trias) En outre, que ce soit au Fer à Cheval ou de l'autre côté de la crête frontière, il n'y a aucun indice ni stratigraphique ni tectonique de la présence d'un flanc inverse étiré. En fait les calcaires attribués au Jurassique supérieur semblent reposer par un simple contact stratigraphique sur les couches triasiques, lesquelles sont elles-mêmes remarquablement dénuées d'indice d'étirement (succession à l'endroit se terminant par des bancs réguliers de dolomie). voir à ce sujet la coupe d'ensemble en page "massif de Sixt"et la page "nappe de Morcles". |
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Les Avoudrues |
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Bout du Monde |
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