Le massif du Mont-Blanc |
Le massif du Mont-Blanc affecte dans son ensemble
la forme d'une coupole de socle cristallin qui est fortement allongée
dans le sens NE-SW.
En effet, en dépit des entailles hardies qui en cisellent
les crêtes, l'enveloppe globale de son relief suit sensiblement
la forme ellipsoïdale qu'y dessine la surface de la pénéplaine
anté-triasique. Cette dernière s'enfonce de toutes
parts sous la couverture sédimentaire de ses bordures,
de sorte que, en définitive, elle décrit un vaste
anticlinal qui culmine aux abords du Mont-Blanc lui-même
et qui plonge axialement sous le Valais au nord et sous le Beaufortain
au sud (secteurs où le socle cristallin s'engage sous sa couverture sédimentaire).
Il faut ajouter que, contrairement
à ce que de nombreux auteurs avaient admis ces dernières
années (et à ce que certains veulent encore croire),
le massif du Mont-Blanc ne repose pas sur sa bordure sédimentaire
occidentale par l'intermédiaire d'une faille de chevauchement
(lire à ce sujet le texte
discutant de la tectonique des massifs cristallins externes ;
voir également les pages Chamonix
et Bionnassay).
Au contraire la couverture du versant ouest du massif repose partout
en contact stratigraphique sur le socle cristallin, même
si ce contact est souvent sub-vertical (voire un peu renversé parfois),
surtout sur la bordure nord-ouest du massif, en marge orientale du "synclinal
de Chamonix".
La dépression structurale de la vallée
de Chamonix, où la vallée
de l'Arve s'est enfoncée en creusant dans les sédiments
qui bordent le massif cristallin du côté ouest, a
été longtemps appelée "synclinal"
de Chamonix (en raison du fait qu'elle est encadrée
par des terrains -cristallins- plus anciens, qui sont surélevés
par rapport à son contenu).
Il s'agit en réalité d'un ancien hémigraben*
d'âge jurassique. En effet la succession sédimentaire
n'est continue et en succession normale que sur le flanc oriental
de cette dépression structurale. Elle est tranchée
au contraire, du côté ouest, par la faille de
Chamonix, accident extensif ayant fonctionné au Jurassique qui fait buter les termes les plus élevés
de la succession sédimentaire (Malm et Crétacé)
contre le cristallin (ou le paléozoïque) du massif
des Aiguilles Rouges. N.B.1 : Des plis serrés ressemblant à
ceux du schéma affectant le contenu de l'hémigraben
sont effectivement visibles dans le Jurassique supérieur
des abords du col de Balme, à l'extrémité
septentrionale du val de Chamonix. Contrairement à ce qui est écrit dans la notice de la carte géologique Chamonix à 1/50.000° rien n'autorise à affirmer que le socle cristallin du Mont Blanc est charrié, au contraire ! En effet le décalage à prendre en compte pour déterminer le rejet de l'accident de la vallée de Chamonix est celui de la surface de la pénéplaine anté-triasique ; or il est clairement extensif puisque, du côté Mont Blanc, cette surface plonge sous le fond alluvial de la vallée avec un pendage tel qu'elle ne saurait buter contre la surface de cassure qu'au moins 1000 m en contrebas, soit 4000 m plus bas que la même surface à la voûte du bloc des Aiguilles Rouges (et encore n'est-ce qu'une estimation minimale). Le surhaussement de la voûte du bloc du Mont Blanc par rapport à celui des Aiguilles Rouges n'est donc pas dû à un chevauchement mais à la plus forte importance, dans le premier de ces deux massifs, du bombement qui a déformé cette pénéplaine anté-triasique. |
version
plus grande de cette image a.mB = accident médian de Belledonne ; |
Ceci tend à indiquer que le massif a subi un écrasement transversal, avec fuite de matière principalement vers le haut. Or ce genre de déformation est à l'opposé de celles, par failles inverses, résultant des efforts cisaillants tangentiels qu'impliqueraient les charriages que tant d'auteurs supposent (par principe) affecter ici la croûte terrestre. Ces déformations par cisaillement tangentiel se manifestent par contre très clairement dans la couverture aux extrémité NE et SW, comme en bordure est du massif. (lire à ce sujet le texte discutant de la tectonique des massifs cristallins externes et de ses rapports avec celle de leur couverture sédimentaire)
Dans le massif du Mont-Blanc lui même la plus importante de ces failles est indéniablement la faille de l'Angle. Elle partage le socle cristallin en deux bandes parallèles, de largeurs inégales, en passant peu à l'ouest du sommet du Mont-Blanc (le rameau occidental étant plus étroit que la masse principale, plus orientale). Elle est dotée d'un très fort pendage vers l'est (et elle est même souvent presque verticale).
Au nord du sommet du Mont-Blanc la faille de l'Angle
met en contact brutal les deux ensembles de roches qui constituent
le socle cristallin du massif :
- dans la masse principale du massif, le granite (anciennement
appelé "protogine"), qui forme les plus hauts
sommets de la crête faîtière
- dans le rameau occidental, les orthogneiss clairs, dans
lesquels se terminent les crêtes plus secondaires qui s'en
détachent en direction de la vallée de Chamonix.
Au sud du sommet du Mont-Blanc la faille se poursuit au
sein des gneiss, sous forme d'une bande de mylonite de roches
cristallines en passant, au nord-est du haut val Montjoie, dans
le versant occidental de la Bérangère et de l'Aiguille
de Bionnassay. Au-delà il est peu douteux que ce tracé
l'amène à se raccorder, par la dépression
des Lacs Jovet, à la faille du col
du Bonhomme. Cette dernière, en surhaussant
sa lèvre sud-orientale, dénivelle la couverture
(ainsi que les imbrications tectoniques qui l'affectent) à
l'extrême pointe sud des affleurements cristallins du massif.
Elle a donc eu un important jeu alpin tardif.
Son rejet vertical semble en outre se combiner avec une composante
de rejet coulissant dextre : en effet les contours de l'interface
socle - couverture sont décalés dans ce sens au
nord comme au sud du massif. D'autre part cela expliquerait pourquoi
la limite sud du granite est tranchée aussi obliquement
et enfin cela s'accorderait bien avec le pendage, subvertical,
de la surface de cassure.
En outre on voit, au sud-ouest du sommet du Mont-Blanc, s'individualiser une faille des Lanchettes, de direction légèrement plus méridienne que celle de l'Angle (à laquelle elle se connecte sans doute dans le secteur du Mont Corbeau).
Elle détermine les puissants vallonnements que sont le haut glacier de Taconnaz, le glacier de Bionnassay italien et surtout a partie amont de la vallée glaciaire de Tré-la-Tête, ainsi que le col Infranchissable, où s'y trouvent coincés des affleurements de Houiller. Cette faille doit sans doute être interprétée comme une "pincée" résultant du serrage d'un ancien graben paléozoïque car les affleurements qui déterminent une brèche de la crête, au pied est de l'Aiguille des Lanchettes sont également d'âge houiller. Elle disparaît enfin dans le versant est du Mont Tondu, à la Grande Écaille de Bellaval, cachetée* sous la couverture sédimentaire. En définitive on peut donc penser qu'il s'agit avant tout d'un accident hercynien qui a peut-être rejoué dans les compressions alpines.
Le revers est du massif, en val Veni et Val Ferret montre que le socle cristallin y est directement recouvert par des couches d'âge varié, allant du Jurassique moyen au Crétacé supérieur suivant les points. Cette disposition doit certainement être interprétée comme correspondant à l'abrupt d'une faille extensive qui limitait au Jurassique un bloc basculé du Mont-Blanc.
On notera que les chevauchements et les charriages qui affectent la couverture sédimentaire située plus à l'est que le massif du Mont-Blanc n'intéressent que des couches affleurant plus à l'est que le contact sédimentaire - socle. Ils n'ont donc pas fait rejouer cette paléo-faille, qui a été conservée pratiquement telle quelle, fossilisée en quelque sorte, jusqu'à nous. C'est là un fait qui vient contredire (une fois de plus) l'hypothèse d'un jeu en inversion des anciennes failles extensives, hypothèse considérée pourtant, de nos jours, comme une vérité basique dans beaucoup d'ouvrages.
En ce qui concerne les rapports entre le
massif cristallin du Mont-Blanc et les massifs cristallins plus
méridionaux il faut remarquer que les blocs cristallins
découpés dans le massif du Mont-Blanc par les failles
d'extension secondaires disparaissent vers le sud, en s'enfonçant
sous leur couverture sédimentaire et sous les imbrications
tectoniques qui recouvrent cette dernière.
Pour ce qui est des blocs du rameau occidental du Mont-Blanc,
bien qu'ils ne montrent pas leur raccord avec les blocs les plus
orientaux du Beaufortain septentrional leur prolongement par ceux-ci
est très vraisemblable car le hiatus d'observation est
peu important : ils correspondent donc au rameau interne de Belledonne.
Par contre le socle cristallin de la partie orientale du massif
du Mont-Blanc s'ennoie clairement sous des terrains sédimentaires
qui appartiennent à la zone dauphinoise orientale, c'est-à-dire
dans un domaine plus oriental que celui de Belledonne interne.
Le cristallin du sommet et de la masse principale du Mont-Blanc
ne saurait donc se raccorder à ce socle de Belledonne interne
: il trouverait plutôt son prolongement méridional
dans les blocs du Grand Châtelard, en Maurienne, et des
Grandes Rousses.
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