Villette, Tessens, Granier

pentes de rive droite de la moyenne Tarentaise entre Aime et les Étroits du Sciaix

En aval d'Aime jusqu'aux approches des Étroits du Sciaix les pentes de rive droite de la vallée de l'Isère sont raides et boisées. Elles s'allongent parallèlement au lit de la rivière jusqu'à un rebord d'érosion qui court aux environs de 2000 m d'altitude et qui est particulièrement accentué au droit du village de Villette avec la Roche de Janatan. Plus au NW le versant se poursuit par des pentes d'alpages plus douces (voir la page "Bagnaz") et des crêtes orientées perpendiculairement à la vallée de l'Isère (voir la page "Roche à Thomas"). Ce changement de relief correspond au rebord supérieur de l'auge glaciaire aménagée par le glacier isèrois qui a occupé cette vallée au quaternaire récent.

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Le versant septentrional de la vallée de l'Isère au NW d'Aime, vu du sommet du Mont Jovet.
ØhB = chevauchement de la zone houillère briançonnaise ; ØrE = chevauchement de l'unité du Roc de l'Enfer ; ØT = chevauchements imbriqués de Roche à Thomas et de Thiabord ; f.Ch = faille des Chapieux ; f.Ct = faille de Centron (son prolongement vraisemblable) ; d.rT = décrochement (dextre) de la Roche à Thomas

À leur extrémité nord-orientale les basses pentes de la Roche à Thomas, en contrebas d'une ligne oblique au versant qui passe par La Thuile et Granier, montrent, sous une couverture morainique très développée, de rares affleurements de houiller: ils sont rattachés à l'unité du Roc de l'Enfer, qui est l'élément le plus avancé de la zone houillère briançonnaise. Il est séparé de la partie principale de cette zone houillère proprement dite par une faille qui atteint le fond de vallée à Aime et qui est jalonnée entre cette agglomération et le village de la Roche par une puissante lentille de gypse longue de plus de 1 km et qui atteint plus de 200 m de large.

Mais à l'ouest de cette faille la plus grande partie de ce versant, jusqu'en aval de Villette, est formée par les divers niveaux du flysch de Tarentaise. Ses couches sont rapportées par les auteurs de la carte géologique aux deux nappes qui sont supposées avoir été originellement imbriquées puis reployées ensemble, l'"unité du Roignais" dans les basses pentes et à l'"unité de Moûtiers" (originellement inférieure) dans leur partie haute.

Cette subdivision semble avoir été basée sur le fait que calcaires et conglomérats basaux affleurent grossièrement selon une large bande qui descend en oblique depuis la Roche à Thomas jusqu'à Villette et que celle-ci semble ainsi prolonger les couches similaires qui constituent, au NE du Torrent du Cormet, la voûte de l'anticlinal à cœur de matériel permo-triasique de Portette.
En fait elle est difficile à justifier car cette dernière structure n'existe plus au sud-ouest du torrent du Cormet et parce que ces deux unités de la zone valaisanne ne se distinguent en réalité par aucune différence de constitution stratigraphique.
Le tracé de leur supposée surface de chevauchement est d'autre part bien difficile à localiser. Celui adopté par la carte géologique, s'élève verticalement dans le versant sud de la Roche à Thomas jusque sous le hameau du Chapelet (au pied des Rochers de Pertetta), avant de traverser horizontalement vers l'est pour remonter la Combe des Bœufs et finalement aboutir aux chalets de Thiabord. Cette bizarre sinuosité semble plus facile à interpréter comme l'intersection des imbrications enroulées de la Roche à Thomas par la faille de Centron (voir plus loin dans la page) laquelle finit plus haut par se faire sectionner par le décrochement de la Roche à Thomas.


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Les pentes de rive droite de l'Isère aux abords de Villette vues du sud depuis Notre-Dame-du-Pré (rive gauche de l'Isère) [lacet 1670 de la route D.88]
u.Q = unité du Quermoz ; u.Mw = unité de Moûtiers occidentale ; u.ME = unité de Moûtiers orientale ; u.R = unité du Roignais ; u.rE = unité du Roc de l'Enfer ; fmT (en rouge) = faille de la moyenne Tarentaise ; s.J = synclinal de Janatan ; ØhB (en violet) : chevauchement de la zone houillère briançonnaise.
f.Ct = faille de Centron ; ØMo = chevauchement renversé de l'Unité de Moûtiers orientale ; d.rT (en rose) = décrochement de la Roche à Thomas ; ØrT = chevauchements imbriqués de la Roche à Thomas.
Les masses gypseuses sont indiquées par une surcharge rouge.

La limite entre l'unité de Moûtiers et celle du Roignais, telle qu'elle a été admise par les auteurs de la carte traverse longuement le versant en s'abaissant en oblique vers le sud jusqu'à atteindre le lit de l'Isère à Centron. En fait il est préférable de désigner objectivement cet accident comme la faille de Centron car il correspond à une cassure presque verticale qui tranche obliquement les différents termes du flysch de Tarentaise aur lieu de les disposer selon une géométrie d'imbrications.

En premier lieu on voit sur la carte (cf. ci-après) que le tracé de cet accident traverse les vallons pratiquement sans dessiner de sinuosités : cette absence de "V topographique"* indique que le pendage de la surface de cassure est extrémement redressé, proche de la verticale. En fait, comme celui de la faille de Janatan (immédiatement plus occidentale), il est même plutôt incliné vers l'ouest, car son tracé franchit les vallons en décrivant plutôt un rentrant dans cette direction.
La lèvre orientale de cette cassure est jalonnée par de grosses lentilles de gypses qui ont clairement étayé l'idée qu'elles jalonnent une surface de charriage. Mais en fait elles se succèdent sans continuité dans le versant : leurs amas s'épanouissent à la faveur des entailles des vallons mais ne s'étirent pas le long de la cassure ; ils s'éffilent au contraire d'ouest en est, tout-à-fait obliquement à la surface de cassure et en s'en éloignantt.
En définitive ces deux amas gypseux semblent au correspondre à deux chevauchements distincts qui traversent le versant en biais l'un au sud de Tessens (Villette) l'autre au nord (Plan Villard - Thiabord) pour venir buter indépendamment contre la faille de Centron. On peut noter en outre qu'ils imbriquent aussi les couches liasiques de la couverture stratigraphique de ces gypses, qui est par ailleurs renversée vers l'est.

L'attitude et l'orientation de la faille de Centron s'accordent bien au contraire avec l'interprétation retenue dans ce site, selon laquelle il ne s'agit pas là d'un chevauchement mais d'une cassure extensive ou coulissante, qui semble représenter le prolongement le plus méridional de la faille des Chapieux (voir les pages "Chapieux" et "Roignais") :

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Les pentes de rive droite de l'Isère au nord et à l'ouest de Villette vues du sud-est depuis le sommet du Mont Jovet
u.UD = unités à affinités ultradauphinoises (dont l'unité du Quermoz) ; ØM = chevauchement de l'unité de Moûtiers (front de la nappe Valaisane) ; ØMo = chevauchement renversé de l'Unité de Moûtiers orientale ; s.J = synclinal de Janatan ; d.rT = décrochement de la Roche-à-Thomas ; f.Ct = faille de Centron.
"flT" = flysch de Tarentaise ; "flCg" = ses conglomérats basaux ; "jm" = marno-calcaires du Jurassique moyen ; "LC" = marbres liasiques.

La localité de Villette est remarquable par ses carrières de marbre qui sont ouvertes dans les calcaires massifs du Lias qui forment là une butte relativement isolée. Ces calcaires y sont disposés à l'envers, car coiffés de brèches du Trias supérieur et sont flanqués du côté sud par des affleurements de flysch de Tarentaise. Il semble donc qu'ils représentent le flanc inverse d'un anticlinal, transverse à la faille de Centron, affectant la seule unité du Roignais.

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Les carrières de marbre de La Villette, vues de la route du Villaret dans les pentes dominant le village de Centron.

En aval du défilé de Villette les gypses n'affleurent plus et l'on perd le tracé de la faille de Centron au niveau de cette localité, les deux rives de la vallée étant alors formées par les couches du flysch de Tarentaise.

Le rebord supérieur des pentes boisées de rive droite de l'Isère, qui s'allongent parallèlement au lit de la rivière est marqué par un ressaut qui court à flanc de pente en traversant les vallons du Nant d'Agot au SW et du Nant de Tessens au NE et en passant par la Roche de Janatan. Il correspond au rebord supérieur de l'auge glaciaire aménagée par le glacier isérois qui a occupé cette vallée au quaternaire récent mais ce rebord ne constitue pas un épaulement* d'origine glaciaire. Au contraire son altitude varie rapidement, en liaison avec le fait qu'il est déterminé sur une structure tectonique que l'on peut suivre obliquement le long de ce versant.

Il est en effet armé par un alignement d'escarpements rocheux qui sont essentiellement constitués par l'épaisse barre des calcaires massifs du Lias. Cette dernière s'enfonce vers l'ouest sous le flysch de Tarentaise des alpages de La Bagnaz et du Boulissoir. Mais elle s'avère en être séparée par une cassure à fort pendage ouest, qui coupe en oblique les strates de ses deux lèvres. Cet accident sépare ainsi deux ensembles que l'on peut désigner objectivement comme les unités occidentale et orientale de Moûtiers car on en suit la trace longuement à flanc de versant vers le sud.

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La rive orientale du Nant Agot, vue du sud depuis la route pastorale au nord de la Charmette (tournant coté 1566).
N.B. : La perspective en contre-plongée donne une vue très déformée de la géométrie structurale : en effet elle dilate les bases pentes et écrase le haut du versant !.
ØMo = chevauchement renversé de l'Unité de Moûtiers orientale ; d.rT = décrochement de la Roche à Thomas.
Succession du flysch de Tarentaise : "flT" = flysch calcaire ; "flg" = flysch gréseux ; "fli" = flysch inférieur marneux ; "flcg" = conglomérats basaux.

En définitive l'analyse des prolongements méridionaux de ce dispositif (voir la page "Sciaix") conduit à interpréter cet important accident comme le chevauchement de l'Unité de Moûtiers orientale, originellement à vergence ouest mais maintenant renversé.

Par contre le contact entre cette barre liasique et le flysch de Tarentaise oriental, qui affleure en contrebas, ne semble pas correspondre à une faille (contrairement à l'interprétation de la carte géologique) car les couches basales du flysch de Tarentaise s'observent en position renversée sous le Lias dans l'entaille du Nant Agot. Plus bas et dans les pentes des Charmettes elles sont au contraire disposées à l'endroit et pentées vers l'aval (d'ailleurs jusque très haut sous les éboulis qui frangent le pied de la barre). Cette variation de pendage est due à leur ploiement par un large synclinal de Janatan , que dessinent d'ailleurs les couches liasiques au sommet de la Roche de Janatan (voir le cliché suibant).

C'est apparemment la formation de ce pli rétro-déversé qui est cause du renversement de la surface de chevauchement de l'Unité de Moûtiers orientale.

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L'extrémité méridionale de la crête du col de La Légette (sommet des pentes dominant Villette) vue de l'est depuis les pentes de la Roche à Thomas (butte du Crêt de la Masse).
ØMo = chevauchement renversé de l'Unité de Moûtiers orientale ; s.J = synclinal de Janatan ; d.rT = décrochement de la Roche à Thomas ; f.Ct = faille de Centron.
Succession du flysch de Tarentaise : "flT" = flysch calcaire ; "flg" = flysch gréseux ; "flcg" = conglomérats basaux.


En outre, du côté méridional, la barre liasique de Janatan se montre traversée en biais par une bande de couches triasiques : elles peuvent y correspondre à une imbrication secondaire voire même à un cœur d'anticlinal écrasé.

 

 


voir l'aperçu général sur le Beaufortain oriental

carte géologique au 1/50.000° à consulter : feuille Bourg-Saint-Maurice.


Carte géologique schématique des abords ouest de Villette (fond topographique I.G.N. au 1/250.000°, agrandi)
Légende des couleurs


Carte géologique simplifiée de la Moyenne Tarentaise inférieure, au nord de Moûtiers
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M.Gidon (1977), publication n° 074

Bagnaz, Boulissoir

Roche à Thomas

Grand Châtelet
Quermoz LOCALITÉS VOISINES (La Plagne)

Moûtiers

Montgirod, Sciaix

(Mont Jovet)
N.B. Les localités entre parenthèses appartiennent à une autre section du site et leur page s'ouvrira avec l'en-tête correspondant à cette dernière.

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