Chartroussette est |
À l'ouest du vallon du Couvent les pentes boisées de rive droite du Guiers sont affectées par l'échine de La Fitole qui est armée par le cœur tithonique de l'anticlinal médian. Vers l'altitude de 1100 mètres ces pentes présentent un secteur moins déclive, où se situent les haberts (= chalets) des Rochers et de Chartroussette. À ce niveau elles sont traversées en courbe de niveau par une route forestière (en cul de sac) qui provient du Couvent : cette route donne une coupe très accessible qui est assez représentative de la structure de ce versant.
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L'échine boisée des Rochers de la Fitole et le vallon herbeux de Chartroussette appartiennent respectivement au coeur de l'anticlinal médian et à l'amorce du flanc ouest de ce pli. Cette structure, fondamentalement très simple, s'avère pourtant présenter plusieurs complications de détail qui ne sont pas d'une interprétation évidente.
Depuis les abords septentrionaux du couvent la route forestière de Chartroussette s'élève à flanc de pente sur les dalles de Tithonique pentées à 45° est du versant est de l'échine, avec un interlude d'une centaine de mètres où elles supportent un peu de Berriasien abaissé par une petite faille. Elle atteint l'échine peu après un petit tunnel au sortir duquel les couches dessinent un repli anticlinal plongeant vers le sud-est (son flanc ouest est orienté N130). Puis elle traverse en courbe de niveau tout le reste de cette échine jusqu'aux prairies du vallon de Chartroussette ouvertes dans les marno-calcaires berriasiens.
Détails structuraux de la combe de Chartroussette et de l'échine de la Fitole ØC = chevauchement de Chartroussette ; a.M = anticlinal médian (sur toute sa longueur il est affecté par une ondulation synclinale et son flanc ouest est rebroussé vers le bas par un crochon anticlinal plus ou moins accentué ; d.EM = décrochement de l'Essart Morin ; d.Ch = décrochement de Chartroussette. (voir en fin de page la carte détaillée du secteur représenté sur ce cliché). |
Or la cartographie y met en évidence l'existence d'un redoublement de la barre tithonique, lequel s'observe non seulement le long de la route forestière de Chartroussette. mais finalement sur toute la longueur des pentes occidentales de l'échine de la Fitole, On constate en effet que les prairies qui tapissent le vallon de Chartroussette sont installées, au nord comme au sud de la route, sur les couches du Berriasien inférieur. Mais leurs affleurements sont en fait partagés en deux par une nervure rocheuse saillante, garnie de bois qui court peu à l'est du fond du vallon et qui est constituée par du Tithonique. Il y a donc là un accident tectonique qui fait resurgir une lame de Tithonique au sein même du Berriasien du flanc ouest de l'anticlinal médian.
En raison de sa position, au sein de la succession berriasienne, cette lame de Tithonique avait été indiquée avec un figuré spécial, comme "Berriasien à faciès Tithonique" sur la feuille Montmélian de la carte géologique au 1/50.000° (1° éd., 1969) . Mais l'examen de lames minces pratiquées depuis dans ces couches a montré que les associations de calpionelles que l'on y trouve ne sont pas berriasiennes mais bel et bien d'âge tithonien. De plus on peut la suivre (avec quelques modifications de détail) sur plusieurs kilomètres du sud au nord.. Vers le sud cette barre tithonique court jusque bien au delà du habert de Chartroussette : en contrebas de celui-ci elle se rattache, à l'extrémité méridionale des prairies, au Tithonique de la butte 959, endroit où disparaît pratiquement l'intercalaire de Berriasien qui la sépare plus au nord du coeur tithonique de l'anticlinal médian. Du côté nord elle s'interrompt brièvement au niveau du tournant le plus grand et le plus septentrional de la route, mais réapparaît en un affleurement lenticulaire immédiatement plus au nord (cliché ci-dessus). On la retrouve encore à l'extrémité nord des prairies de Chartroussette et forme, plus au nord, la crête située à l'ouest de l'Essart Morin. Enfin, après décalage par un petit décrochement dextre, elle se poursuit par la crête boisée qui aboutit au habert de Billon (ces deux derniers affleurements avaient été omis sur la feuille Montmélian de la carte géologique au 1/50.000°). |
La géométrie de cet accident est donc celle d'une faille pentée vers l'ouest, ce qui porte à envisager qu'il puisse représenter le prolongement dans ce versant nord du Guiers de la faille du Grand Poyat. Cette présomption est renforcée par l'absence de toute autre trace d'un accident susceptible de prolonger cette faille en dépit de l'importance de son rejet vertical et de sa présence confirmée dans le versant nord-occidental du Charmant Som : l'accident de Chartroussette a la position cartographique, au flanc ouest de l'anticlinal médian et le redoublement des couches du flanc ouest de ce pli qui semble a priori, susceptible de lui faire assumer ce rôle. Mais il devrait montrer les indices d'un rejet extensif avec une lèvre occidentale surélevée.
Pourtant ce n'est pas ce que révéle l'examen des faits de terrain. En effet on constate dans les affleurements situés au nord du grand tournant de la route que la lame tithonique se biseaute vers l'ouest entre le Berriasien qui la recouvre et celui qu'elle chevauche. De plus, le contact du Tithonique de cette lame sur le Berriasien est marqué par le rebroussement synclinal de ce dernier en crochons déversés vers l'ouest (de plus un tel rebroussement affecte aussi les affleurements tithoniques de la bordure occidentale des bois de la Fitole. La géométrie de cet accident correspond donc à ce que l'on attend d'une faille inverse à vergence ouest et par conséquent, malgré la faible ampleur de son rejet, porte à le désigner comme le chevauchement de Chartroussette.
Coupes sériées au travers de l'anticlinal médian en rive droite du Guiers Mort, depuis le col de la Ruchère, au nord, jusqu'à la gorge du Guiers Mort, au sud. ØCh = chevauchement de Chartroussette Au sud de Billon l'endroit exact où passe le chevauchement de Chartroussette, dans le flanc oriental de l'anticlinal médian n'est pas déterminé avec certitude car il n'est plus souligné par une lame de Berriasien et met en contact Tithonique sur Tithonique. L'interprétation de la coupe F, fournie par la route D 520b dans sa traversée des "trois tunnels" est vraisemblable mais un peu hypothétique (et donc provisoire). En effet les affleurements de Berriasien représentés comme coincés sous le chevauchement de Chartroussette sont de taille à peine pluri-métrique et leur attribution au Berriasien n'est encore étayée que sur leur faciès. |
Le pendage vers l'ouest de ce chevauchement peut apparaître comme "anormal" car on est habitué à ce que les surfaces de chevauchement soient au contraire ascendantes dans le sens de leur vergence. Ce fait trouve son explication dans la confrontation des données qu'exprime la planche de coupes ci-dessus. En effet elle montre que cette disposition correspond parfaitement à celle résulte du basculement, par le jeu du plissement, d'une faille compressive ("inverse") formée antérieurement à l'anticlinal médian. De fait on observe sur le flanc est du pli des témoins de la présence d'un tel accident, redoublant le Tithonique, à l'est de Billon (il est recoupé par le sentier du Pavé) et dans les pentes qui dominent la prairie du col de la Ruchère du côté est.
Ce caractère du chevauchement de Chartroussette de représenter une faille inverse précoce par rapport aux plis n'est pas le seul exemple connu dans les massifs subalpins : en particulier il est analogue à celles qui affectent, dans le massif de la Chartreuse, le Tithonique du Jalla, de l'Écoutoux ou, plus encore, celui de la Scia. |
On remarque enfin que la lame berriasienne qui sépare, dans le flanc ouest de l'anticlinal médian, le Tithonique de la lame chevauchante de celui du coeur de l'anticlinal s'effile du nord vers le sud. Cette observation indique vraisemblablement que le chevauchement était orienté obliquement par rapport à l'axe de l'anticlinal (déviation dans le sens horaire) le front de la lame tithonique avançant d'autant plus loin à l'ouest de cet axe que l'on se trouve plus au sud sur ce pli. Symétriquement, la disparition de témoins de Tithonique chevauchant dans ce flanc du pli au nord de Billon relève sans doute principalement de cette explication, de même que la disparition des témoins de Berriasien chevauché dans le flanc est du pli au sud du chemin du pavé.
Schéma cartographique théorique Selon l'endroit, plus ou moins septentrional, où l'on se trouve sur l'axe de l'anticlinal médian on pourra observer, ou non la présence d'une lame de Tithonique chevauchante et/ou celle d'une lame de Berriasien chevauché. Ti/Ti = chevauchement faisant reposer du Tithonique
sur du Tithonique (donc difficile à repérer); Les lettres cerclées indiquent la position approximative des coupes. |
Ce versant de la montagne est en outre traversé, entre Chartroussette et le col de la Ruchère, par plusieurs petites failles de décrochement. Elles se repèrent à ce qu'elles décalent aussi bien la limite entre le Berriasien inférieur et le Tithonique du coeur de l'anticlinal que les contours de la lame tithonique chevauchante. Par contre on a de la peine à suivre ces cassures dans le Tithonique du côté est et dans le Berriasien et les calcaires du Fontanil du côté ouest.
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Chartroussette ouest | LOCALITÉS VOISINES | Couvent |
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Chartroussette est |
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