Chaberton |
Au nord de Clavière (voir la page "Montgenèvre") le Mont Chaberton, avec les 3131 m d'altitude qu'atteint son sommet est une des plus hautes cimes du Briançonnais. C'est le point culminant d'une puissante et compacte masse rocheuse qui domine du côté oriental la localité italienne de Cesana-Torinese, la plus élevée de la vallée de la Dora Riparia. Elle est tranchée du côté sud par l'abrupte entaille de la Piccola Dora, qu'emprunte la route pour rejoindre le village de Clavière à l'extrémité orientale de la trouée frontalière du Montgenèvre.
Au sud de cette gorge l'unité structurale du Chaberton trouve néanmoins son prolongement géologique dans la Rocca Clari, à l'est du débouché du vallon de Gimont, et au Fort du Bœuf plus à l'ouest.
Il est remarquable que cette entaille est en réalité décalée de 600 m vers le nord par rapport à la limite structurale du massif, constituée par la faille de Clavière qui le sépare de celui du Chenaillet. Il est néanmoins évident que c'est à la présence de cet accident qu'elle doit son existence, certainement initiée par la mise en contact de deux massifs rocheux de constitution très différente. Mais si sa position actuelle résulte évidemment de décalage vers le nord de son tracé, sans doute au fur et à mesure de son creusement. |
La profondeur de la coupe transversale donnée par l'entaille de ce torrent permet de voir que la montagne y est essentiellement formée, presque sur toute sa hauteur, de dolomies en gros bancs. Celles-ci sont datées du Trias supérieur (Norien), et supportent des calcaires liasiques : une telle succession stratigraphique est typique du domaine Piémontais externe (voir la page " Briançonnais : tectonique"). Les abrupts méridionaux, qui tombent sur le village de Clavière, donnent une coupe structurale naturelle, orthogonale à ses structures, qui montre en premier lieu que les couches y sont ployées en un beau synclinal, fortement déversé vers l'Italie (vers l'est) et dont les flancs sont ici pratiquement parallèles.
En outre les couches du sommet de la montagne ébauchent un anticlinal dont le coeur héberge un affleurement de micaschistes qui est rapporté au système des "écailles intermédiaires", ultra-briançonnaises.
Sa position est paradoxale pour un témoin d'une unité normalement inférieure, dans l'empilement tectonique, à celle formant le reste du Chaberton (voir la page " Briançonnais : tectonique"), puisque ce lambeau est maintenant posé, en un chapeau synforme, sur le matériel de cette dernière. Cela avait fait qualifier plaisamment cet affleurement de "fenêtre - klippe" par Marcel Lemoine (qui fut le premier a en donner l'interprétation actuelle). Cette situation s'explique par le ploiement, postérieur au charriage, de la pile des nappes et par le renversement vers l'est de l'anticlinal couché que dessinent les couches au sommet du Chaberton. |
Le versant sud-ouest de la pyramide sommitale du
Chaberton, vu des prairies du Gondran ØP = chevauchement du Piémontais externe sur les "écailles intermédiaires". L'affleurement de leur matériel, au coeur de l'anticlinal couché du Chaberton (a.C), est partiellement masqué par la crête secondaire qui descend du sommet vers le SW. s.rC = disposition du synclinal des Rochers Charniers (hors champ, plus à droite). |
Enfin il serait inexact de croire les limites est et ouest de l'unité du Chaberton correspondent à une imbrication entre deux surfaces de charriage. En fait elle est délimitée latéralement par deux cassures, à l'ouest celle du vallon des Baisses (anciennement dénommé Rio Secco) et à l'est celle de la Rocca d'Aiglière, qui coupent l'une et l'autre les replis affectant ses couches.
Le versant ouest du Chaberton et le vallon des Baisses (drainé par le Rio Secco) vus du sud, depuis les abords de la Collette Verte. f.B (en rose) = faille des Baisses : on a symbolisé par un petit schéma de la même couleur la disposition de sa surface de cassure, pentée vers l'ouest. u.PE = unités piémontaises externes des Fournéous (à l'endroit : partie gauche du cliché), du vallon des Baisses (renversée : centre) et du Chaberton (subverticale : partie droite du cliché) ; ØP (en bleu) = surface de chevauchement de la première de ces unités. éc.i = "écailles intermédiaires", constituées de lames de micaschistes (mcs), de quartzites et de calcschistes du Malm - Néocomien (js-ci) ; u.cF = unité briançonnaise du Clos des Fonds, entourée de cargneules : elle est interprétée comme pointant au coeur d'un anticlinal de nappes déversé vers l'est, dont la charnière du Chaberton serait la voûte (cf. coupe schématique de l'aperçu général). |
Il apparaît assez clairement par l'étude de leur constitution que la succession de deux unités que l'on trouve empilées à l'ouest de la faille des Baisses (dans le chaînon du Chalvet - Lauzin) est sensiblement la même que celle qui affleure du côté est, au sommet du Chaberton : Le rejet de la faille des Baisses peut donc s'interpréter essentiellement comme un affaissement de la lèvre occidentale de cette cassure, abaissant de près de 800 mètres le flanc normal de l'anticlinal couché du Chaberton. |
Du côté oriental (versant italien) du Chaberton l'épaisse succession de bancs de dolomie du flanc normal du synclinal des Rochers Charniers est tranchée la faille sub-verticale de la Rocca d'Aiglière (voir le premier cliché de la présente page). Cette faille met en contact ces couches avec les unités de schistes lustrés ligures et coupe aussi, du côté de ces dernières, la surface de charriage qui superpose les "roches vertes" de l'unité du Lac Noir aux épais schistes lustrés des pentes de la vallée de Cesane-Torinese (attribués au Crétacé supérieur). C'est donc une importante cassure mais pas un chevauchement (elle est même postérieure à ceux reconnus par ailleurs).
En définitive cette structure est complexe et l'on ne peut l'interpréter qu'en faisant appel, au moins, à
trois épisodes de déformation successifs :
- empilement de nappes (vraisemblablement par un déplacement
grossièrement d'est en ouest) ;
- ploiement des nappes ensemble et rétro-déversement
(simultané ou ultérieur) ;
- sectionnement par des failles extensives, juxtaposant finalement
des panneaux effondrés, les uns par rapport aux autres,
de plusieurs centaines de mètres.
Ce scénario est en fait commun à toute la partie orientale de la région briançonnaise, que les unités impliquées soient briançonnaises ou piémontaises (voir la page "linéament du Briançonnais oriental").
On a souvent représenté, sur les schémas, ce contact entre le domaine piémontais externe et celui des schistes lustrés ligures comme un chevauchement (interprété comme ayant joué en "rétrocharriage"). Ce faisant on supposait qu'il était similaire à celui qui fait reposer, plus au sud, la succession piémontaise de Rochebrune sur l'unité ligure de Prafauchier et du Lac des Cordes. |
aperçu
général sur la stratigraphie du Briançonnais aperçu général sur la tectonique du Briançonnais |
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Carte structurale schématique extrait de la carte d'ensemble du Briançonnais
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Carte géologique simplifiée
des alentours de Montgenèvre
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M.Gidon (1977), publication n° 074
catalogue des autres cartes locales de la section Briançonnais
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Montgenèvre |
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"Chaberton" |
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