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Glossaire de Tectonique : d) nappes


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Autochtone, parautochtone, allochtone

Ces termes sont employés pour désigner le degré de transport subi par une masse rocheuse (sans toutefois atteindre à une précision chiffrée).

Une zone est dite "autochtone" si les roches n'y ont subi que des déplacements limités, qui ne les ont pas désolidarisées de leur soubassement. C'est ainsi que les massifs subalpins, plissés et affectés de chevauchements de flèche modeste (moins de 10 kilomètres) sont typiquement autochtones : cela ne veut pas dire que le déplacement y est nul mais que l'on passe, progressivement, d'un déplacement modeste dans les terrains affleurants (essentiellement dû à leur raccourcissement horizontal, transversal à leurs plis), à une absence de déplacement dans leur soubassement. C'est le cas, d'une façon générale (et presque par définition) de la partie des Alpes qualifiée de "zone externe".

Un domaine est allochtone lorsque sa déformation a été dominée par le phénomène de formation de nappes de charriage. Dans ce cas l'on voit reposer, en général par une surface de charriage assez nette, des terrains de provenance lointaine (plus de 10, voire 100 kilomètres) sur d'autres terrains (leur autochtone relatif) beaucoup moins déplacés. C'est le cas de la partie des Alpes qualifiée de "zones internes", qui sont séparées des zones externes par une grande surface de chevauchement dite (originellement en Suisse) "chevauchement pennique frontal".
La distance de déplacement peut être évaluée par des constructions géométriques (coupes selon le sens du mouvement) ou par la différence de constitution, souvent très marquée, entre les roches (successions stratigraphiques notamment) observables d'une part dans l'ensemble allochtone (= charrié) et d'autre part dans celles du domaine qu'il recouvre.

La relativité de la notion d'autochtone et d'allochtone apparaît de deux façons :
1 - un ensemble charrié peut recouvrir un autre ensemble qui, bien que son autochtone relatif, est néanmoins charrié (en général sur une moindre distance d'ailleurs). Ce cas, très fréquent, se réalise de deux façons :
a) lorsque l'ensemble inférieur a été mis en mouvement par l'avancée de l'ensemble supérieur : on dit alors qu'il a été entraîné et l'on y observe des structures, plis et/ou chevauchements, qui ont été créées par cet effet d'entraînement.
b) lorsque l'autochtone relatif avait été précédemment charrié (dans une étape distinctement antérieure de déformation) : on le qualifie alors parfois de néo-autochtone, relativement à l'étape de charriage la plus récente.
2 - on emploie le terme de domaine "parautochtone"* (c'est-à-dire peu transporté, mais fortement tectonisé) lorsque l'ampleur et l'abondance des déplacements par chevauchements devient grande, sans que, pour autant, on ait la preuve d'une désolidarisation des terrains affectés vis-à-vis de ceux plus profonds. Dans la zone externe des Alpes septentrionales, c'est le cas pour le domaine dauphinois oriental, où l'on a des raisons de penser que les chevauchements multiples ("écaillages") des terrains sédimentaires se raccordent à des cassures affectant également le socle (quel que soit le processus de déformation exact de ce dernier). Dans la zone externe des Alpes méridionales on peut attribuer ce qualificatif à la nappe de Digne, dont l'ampleur du charriage reste modeste, notamment puisqu'on le voit s'amortir du côté nord comme du côté sud, et ne suggère pas une origine lointaine.


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Charriage, Nappes de charriage

Le terme de charriage désigne le déplacement, sur de grandes distances (de l'ordre de plusieurs kilomètres au moins), de tranches de roches, les "nappes de charriage", qui viennent ainsi s'empiler sur les roches non déplacées, qualifiées donc d'autochtone.


Voir aussi l'article "Formes de relief liées aux charriages"

L'importance de l'ampleur du mouvement (la "flèche") d'un chevauchement est souvent appréciable au fait qu'il y a des différences de constitution de la série stratigraphique entre terrains charriés et autochtone, ce qui témoigne de leur éloignement originel.
Le sens du mouvement est une notion très ambiguë (qui a fait dire et écrire beaucoup de stupidités)
voir l'article "subduction".

Divers modes d'individualisation de la masse de terrains charriée sont possibles.
Le plus commun est celui qui consiste en la formation d'une faille inverse* (ou parfois d'un pli-faille), dont le rejet s'amplifie ensuite considérablement. Ce processus de franc détachement d'une tranche de terrains se combine le plus souvent avec celui du "décollement" de cette tranche, le long d'une surface de changement de nature des roches.
Un autre processus, qui fait plutôt figure d'exception, est celui des "nappes plis-couchés", qui sont en règle générale des plis complexes (anticlinoriums) étirés par un cisaillement horizontal. L'exemple de la nappe de Morcles, dans les Préalpes franco-suisses est très classique (de même que celui des nappes de la Montagne Noire dans le Massif central français).

Types de nappes, selon le mode de "détachement"

a) nappes - plis-couchés (il s'agit plus exactement d'anticlinoriums couchés); "Racines" : voir plus loin.
b) nappes - failles inverses ("par sectionnement") ; "bord radical" : voir plus loin.
c) nappes par décollement
d) nappes mixtes, associant sectionnement (rampes) et décollement (paliers) : voir "failles inverses".

Ø (ou ) sont les lettres grecques qui désignent communément, par convention, les surfaces de charriage.

notions apparentées :

>>>> Différents types d'accidents tectoniques
>>>> failles de chevauchement
>>>> Plis, Plis-failles


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Pays de nappes : organisation et hiérarchie des unités tectoniques

Dans une région de nappes de charriage on observe en général un empilement constitué par une multitude de tranches rocheuses, épaisses en moyenne de quelques centaines de mètres, qui s'étendent horizontalement sur des distances de quelques kilomètres à quelques dizaines de kilomètres. Elles sont qualifiées de "nappes élémentaires" lorsqu'elles sont assez bien individualisées par des caractéristiques qui se suivent sur des distances importantes. Par contre, lorsqu'il s'agit d'éléments isolés par l'érosion ou la tectonique dont les dimensions et/ou l'individualisation sont plus médiocres on emploie souvent le vocable d' "unités allochtones", qui ne préjuge pas de leurs rapports, plus ou moins hypothétiques, avec les autres.
Parmi ces "unités" élémentaires on qualifie de "digitations" celles qui se rattachent clairement à une même nappe car elles ne sont séparées du corps principal de celle-ci que par un accident tectonique mineur, repli ou faille inverse à déplacement modéré, insuffisamment important pour masquer les rapports de filiation qui l'y rattachent.

Les nappes élémentaires et digitations sont les fragments, dissociés lors des charriages ou ultérieurement, de nappes majeures. Celles-ci, de volume bien supérieur, se caractérisent et se différencient essentiellement par leurs successions stratigraphiques assez distinctes, indiquant qu'elles proviennent de secteurs déjà individualisés par des traits marquants de leur histoire sédimentaire, c'est-à-dire de "zones paléogéographiques" différentes.
Dans les Alpes internes quatre nappes majeures se sont individualisées par leurs particularités sédimentaires au cours de l'ère secondaire. Depuis les plus externes (qui ont subi le moins de déplacement) jusqu'aux plus internes (d'origine plus lointaine) elles provenaient des zones paléogéographiques dites
subbriançonnaise, briançonnaise, piémontaise et ligure.

Enfin lorsque plusieurs chevauchements, à peu près parallèles entre eux, amènent des tranches de roche relativement minces à se recouvrir successivement les unes les autres on parle d'imbrications ou d'écailles (surtout si cela a lieu de façon répétitive).

Normalement les écailles imbriquées sont successivement détachées de l'autochtone, "par le bas", en avant et sous l'unité inférieure de l'empilement (par l'effet d'entraînement de cette dernière) ; les unités plus élevées se déplacent avec l'unité inférieure, sur son dos (piggy back disent les anglais).

Diverses géométries résultant d'imbrications d'écailles tectoniques
pour différents taux de recouvrement d/l (schéma purement théorique)

"r" = longueur de la rampe de chevauchement, "l" = longueur des écailles (distance entre deux rampes) , "d" = valeur du déplacement de chaque écaille.
NB 1 : "l" est considérée ici comme constante, ce qui répond à une logique mécanique si le matériau est parfaitement homogène.
NB 2 : l'ordre de mise en activité des surfaces de charriage est de droite à gauche, l'écaille la plus basse étant la dernière détachée de son autochtone.

Les imbrications simples et schématiques correspondent à des taux de recouvrement inférieurs à 1
Les empilements antiformes ("antiformal stacks" en anglais) sont illustrés par les schémas qui correspondent aux taux de recouvrement1,25 et 1,5. Ces édifices ressemblent fortement à des "anticlinaux de nappes". Ils en diffèrent toutefois en ceci que les écailles ne se prolongent pas vers la droite sous la nappe principale.

Il est très courant que les nappes de charriage soient, après leur imbrication, affectées par des mouvements tectonique de nature différente, failles et plis. Le ploiement ensemble de nappes superposées, en une voûte antiforme, est ce que l'on appelle un "anticlinal de nappes". L'exemple le plus célèbre dans les Alpes et celui de la coupe du Guil en amont de Guillestre.
Il faut noter que cette disposition ne dénote pas forcément un plissement postérieur au charriage car elle peut s'obtenir lors du charriage par le jeu des plis de rampes
(voir la figure ci-dessus).

Les rapports entre les unités peuvent encore être compliqués par le fait que les mouvements de charriage ont pu se produire à plusieurs époques distinctes. De ce fait, du matériel qui avait été charrié dans une première étape peut devenir l'autochtone relatif d'une nappe créée dans une deuxième étape. Inversement l'autochtone de la première étape peut être charrié sur des nappes de première étape à l'occasion de la deuxième étape.
De plus le sens et/ou la direction de déplacement peut changer d'une étape à l'autre : dans les Alpes un premier charriage vers l'ouest ou le sud-ouest a été suivi d'un charriage "rétroverse" vers l'est ou le nord-est.


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Racines, enracinement

Ces deux termes datent d'une époque où les nappes de charriage étaient toutes considérées comme la partie flottante de grands plis anticlinaux couchés : on considérait donc que ce pli "s'enracinait", par amortissement progressif, au niveau des couches de son coeur, c'est-à-dire à l'opposé du front de charriage (voir figure ci-dessus).

Dans le cas des nappes détachées par un sectionnement oblique de la pile de couches ("nappes failles-inverses") on peut estimer que l'on se rapproche du point de détachement de la tranche de roches charriée lorsque cette tranche n'intéresse que les terrains inférieurs dans la succession et lorsque les terrains supérieurs y sont supprimés par le biseautage lié au détachement de la nappe supérieure (inversement on s'en éloigne lorsque les terrains supérieur de la succession sont représentés et ceux inférieurs absents).


Schéma théorique montrant comment varie la succession stratigraphique impliquée dans une nappe, selon que l'on se rapproche du front ou de la racine de cette dernière.


Cette notion de racine est en fait assez ambiguë et dangereuse à employer notamment parce qu'elle porte aisément à désigner du nom de "racines" ou de "zone radicale" le secteur ultime, situé le plus à l'opposé du front de charriage, où la nappe soit observable.

On a tendance à penser que ce domaine correspond à la zone de départ de la nappe mais en général il n'en est rien car cela correspond seulement au fait qu'elle s'y enfonce sous une nappe supérieure (elle peut donc se prolonger en profondeur, fort au-delà).
En fait il s'agit même, bien souvent, non pas d'un secteur de raccord à un autochtone plus ou moins relatif, comme le voulaient les anciens auteurs, mais d'un secteur où se produit un changement de l'attitude de la surface de charriage, qui se met à être suffisamment inclinée pour s'enfoncer sous la surface du sol (cette inflexion par accroissement de pendage s'avère être en général le résultat d'une déformation postérieure au charriage).

Dans le cas ou le charriage est dû à l'arrachement d'un paquet rocheux (notamment sous l'effet de la pesanteur, à la façon d'un glissement de terrain) la notion de racine perd totalement son sens : la zone de départ est alors qualifiée de "patrie" de la nappe.


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Subduction, Sous-charriage

L'emploi du terme de subduction est exclusivement réservé à la tectonique de plaques. Il correspond à l'enfoncement, par traction vers le bas, sous l'effet de son poids, d'une plaque à croûte dense (froide) jusque dans le manteau.
On emploie parfois le terme de subduction continentale pour désigner les accidents secondaires (mais cependant à l'échelle de la plaque) qui peuvent se produire dans une plaque à croûte continentale entraînée dans une subduction. On peut les comparer à de très grandes failles inverses (à l'échelle de la plaque), déterminées par la friction sous la plaque chevauchante.

On doit noter que, dans un tel système, tous les mouvements sont relatifs et que rien n'est immobile. Le seul critère déterminant pour savoir qu'il y a eu subduction est l'effet, sur la plaque subductée, de son enfoncement (surpressions et échauffement).

Le sens du mouvement des nappes est une notion très ambiguë, qui a fait dire et écrire beaucoup de stupidités.
En effet on a tendance à considérer intuitivement que l'autochtone était immobile par rapport à la nappe, qui seule se déplaçait en "montant" sur l'autochtone. C'est une idée non fondée, car le mouvement de ces deux masses est seulement relatif. Bien plus il est le plus souvent avéré que c'est l'autochtone qui se déplace, entraîné sous l'empilement de nappes dans un mouvement initié par une subduction.

Deux points plus particuliers sont à examiner :
- la formation d'un empilement de nappes ne se fait pas, en règle générale, par avancée des plus hautes sur les plus basses, mais par détachement de tranches successives, dans l'autochtone, sous la pile des nappe précédemment formées.
- la notion de sous-charriage est en général très mal comprise. Il ne s'agit pas de décider lequel, de l'autochtone ou de la nappe, s'est enfoncé sous l'autre car pour cela aucun critère ne peut être utilisé. Par contre, dans un domaine où le chevauchement est généralement dirigé dans une direction donnée (vers l'ouest dans les Alpes françaises) l'enfoncement occasionnel d'une tranche de roches dans cette même direction peut être qualifié de sous-charriage.

Tel est le cas de l'encapuchonnement du front d'une nappe qui se fiche dans la nappe sous-jacente (encore que les exemples de telles dispositions semblent moins fréquents qu'on ne l'avait anciennement imaginé).
Une autre possibilité est le déplacement des parties basses d'un empilement (de strates ou de nappes) sous les parties hautes (par exemple le déplacement d'un socle sous sa couverture), ce qui se manifeste à la limite des deux masses en mouvement par des accidents tectoniques secondaires de vergence inverse de celle des grandes structures.
Lorsque l'inversion de vergence n'est plus occasionnelle mais tend à se généraliser (malgré la présence d'accidents à vergence "normale") on parle de rétro-déversement et/ou de rétrocharriage, situation qui est bien illustrée dans la partie orientale de l'arc des Alpes occidentales françaises.

Le rétrocharriage ne suppose aucune inversion du sens de déplacement relatif des masses rocheuses majeures : il témoigne seulement de ce que, là où (et quand) on l'observe, il s'est créé une disposition (relativement locale) qui a conduit le sens de déversement des structures à s'inverser. Par exemple la formation d'un bourrelet, par imbrication et empilement de nappes, à la marge interne des zones "externes" autochtones des Alpes est une disposition favorable au rétro-déversement de cette pile de nappes vers la région la plus interne de l'arc alpin, puisque ce bourrelet devient de plus en plus surélevé par rapport à ce domaine très interne. Cela ne suppose aucun changement dans le mouvement fondamental des deux plaques affrontées.


 

 

 

 

 


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