La constitution stratigraphique de la Maurienne
en aval de Modane est très variable, en fonction du niveau où l'on se trouve, le long de la vallée, celle-ci coupant presque transversalement plusieurs des zones majeures de la structure des Alpes.
Dans cette page on trouvera un aperçu des colonnes stratigraphiques
propres à chacune de ces zones et une illustration de certains
des faciès remarquables de ces successions de couches.
Zone dauphinoise
Dans l'ensemble la zone dauphinoise orientale de Maurienne présente une série stratigraphique qui se distingue peu de celle de l'Oisans, mais où les termes inférieurs (Lias calcaire) sont souvent assez minces par rapport aux termes supérieurs (Lias schisteux et Dogger)...
Colonne stratigraphique des environs de Bourg-d'Oisans |
Zone ultradauphinoise
La série stratigraphique ultradauphinoise est particulièrement bien représentée sur la transversale de la Maurienne. Elle s'individualise avant tout par l'importance de son Nummulitique, qui y affleure de façon continue du sud au nord, et par les rapports de ce dernier avec les couches plus anciennes.
Le Nummulitique ultradauphinois repose en effet en discordance sur des
termes variés, dans l'ensemble de plus en plus âgés
du sud vers le nord, surtout au nord de l'Arc. Cela veut dire
que la transgression de la mer nummulitique s'est faite sur des
reliefs érodés qui étaient particulièrement
saillants sur l'actuelle transversale entre Maurienne et Tarentaise.
Comme plus au sud à la latitude du massif du Pelvoux la
base de la succession comporte des inclusions d'olistolites, dont
la nature est, comme il se doit, très liée à
celle du soubassement local de la transgression. Ici il s'agit majoritairement de grands panneaux de matériel permien qui constituent une semelle presque continue sous le Nummulitique, en rive droite de l'Arc au nord de Saint-Jean de Maurienne.
Le sommet de la succession nummulitique est constitué par un flysch schisto-argileux dont la partie basse comporte des
petits bancs calcaires contenant des petites nummulites du Priabonien.
Ce flysch passe transitionnellement vers le haut (et vers l'est) à un ensemble très
disparate dans lequel que l'on avait initialement considéré comme
un empilement d'écailles tectoniques, dites "écailles
subbriançonnaises externes" et que l'on tend maintenant à
considérer comme une formation olistolitique* (plus de développements à la page "Nummulitique")
Le Mésozoïque* de la zone ultradauphinoise est épais dans la coupe de l'Arc et surtout dans les montagnes de la rive gauche ; toutefois l'érosion anté-nummulitique n'y a pas conservé de termes plus récents que les calcaires du Jurassique supérieur. La succession y est très proche de celle des séries les plus épaisses de la zone dauphinoise, avec des niveaux marneux du Lias supérieur et du Jurassique moyen qui sont particulièrement épais.
Sur le versant de la Basse Tarentaise on doit très vraisemblablement rapporter à la zone
ultradauphinoise le flysch très grèseux (mal daté) de l'unité de Crève-Tête, qui repose sur des conglomérats riches en matériel cristallin.
On tend à rapporter aussi à cette zone
l'unité du Niélard, dont l'attribution est toutefois
discutée :
son Nummulitique (bien daté mais réduit à de maigres affleurements) recouvre en transgression des brèches jurassiques qui ravinent à leur tour un Lias
zoogène massif (ce dernier évoque plutôt celui des unités valaisanes, qui affleurent plus au
nord, ou encore celui de l'unité subbriançonnaise du Pas du Roc et du Perron des Encombres, qui affleure plus au
sud).
La zone subbriançonnaise présente la particularité d'être le seul domaine des Alpes (avec le flysch à Helminthoïdes) dont on ne sait pas sur quel soubassement paléozoïque* s'est déposée sa série stratigraphique mésozoïque*. D'autre part elle tranche beaucoup sur la zone ultradauphinoise par le faible développement des niveaux d'âge tertiaire et la grande prédominance de affleurements de couches jurassiques (le Crétacé n'est lui-même guère représenté au nord de l'Arc).
La succession de couches qui la constitue y
connaît une variation entre deux types extrèmes
:
- celui de la Grande Moendaz, au nord-ouest,
finalement très proche de la succession dauphinoise, dotée
d'un Lias relativement épais (dépôts de sillon
: sans doute un hémigraben) et d'un Dogger riche en marnes
- celui du Perron des Encombres, au sud-est,
où le Lias est très réduit et le Dogger
formé de calcaires récifaux (dépôts
de hauts-fonds : sans doute une crête de bloc). L'on y trouve
en outre,
intercalés dans les faciès marneux du Jurassique supérieur (faciès "Terres Noires"), d'importants niveaux de brèches (dites "brèches du Télégraphe").
Le caractère massif des calcaires du Dogger du Perron des Encombres est à l'origine d'un réseau karstique* qui se développe surtout à la Croix des Têtes et qui y a fait l'objet d'exploration spéléologiques.
Les différents types de colonnes stratigraphiques de la zone subbriançonnaise (depuis l'Arc jusqu'à la vallée de la Guisane). N.B : la "Digitation du Petit Galibier" de R. Barbier est constituée par les affleurements situés de part et d'autre la crête, à l'ouest du col du Galibier (voir la page "Col du Galibier") ; ce sont les affleurements situés à l'est de ce col qui se rattachent à la "digitation de "Roche Olvéra". |
Les affleurements, essentiellement jurassiques, de la zone subbriançonnaise sont limités, tant à l'ouest qu'à l'est, par une bande de gypses et de cargneules triasiques, qui représentent les terrains les plus anciens connus dans cette zone. En réalité ces terrains ont été très disloqués par la tectonique, qui leur a fait jouer le rôle d'un lubrifiant oignant les surfaces de chevauchement qui délimitent la zone.
Zone briançonnaise
Au niveau de la Maurienne la zone briançonnaise
ne montre que peu ses termes stratigraphiques mésozoïques*.
Ceux-ci se limitent au contenu de synclinaux localisés
au voisinage des deux marges, occidentale et orientale, de la
zone car la partie médiane de celle-ci a été,
de par sa disposition bombée en un anticlinorium, soumise
trop profondément à l'attaque de l'érosion. Cette dernière y a mis très largement au jour le soubassement paléozoïque de cette zone, constitué ici de terrains houillers et permiens.
Les études récentes de Daniel Mercier (1987 et carte géologique, feuille Névache) ont montré que l'on devait distinguer, au sein des terrains houillers, non pas deux mais trois ensembles, qui ont été désignés dans les pages du site sous les noms de "houiller inférieur", de "houiller moyen" et de "houiller supérieur":
- Houiller supérieur = "assise de Roche Château", d'âge Permien inférieur à Stéphanien moyen, formée de conglomérats clairs à galets de gneiss (équivalent de l'"assise de Courchevel" en Vanoise (rive droite de l'Arc).
- Houiller moyen, comportant de haut en bas : "Formation de Tarentaise" d'âge Stéphanien inférieur à Westphallien, schisto-gréseuse et productive (anthracite) et "Grès de La Praz" = conglomérats et grès grossiers.
- Houiller inférieur, comportant de haut en bas : "Formation du Chardonnet", schisto-gréseuse et productive (anthracite) d'âge Westphallien A à Namurien B et "Formation de Cristol" = conglomérats et grès grossiers (Namurien ?).
En fait la confusion faite antérieurement entre les deux derniers était due à leur constitution similaire et au fait qu'ils sont juxtaposés par une importante cassure, sans doute anté-triasique voire anté-Permien, l'accident des Drayères.
La marge occidentale de la zone briançonnaise est frangée par une bande de gypses, épaisse le plus souvent de plusieurs centaines de mètres, qui est limitée par des cassures et au sein de laquelle aucun repérage stratigraphique n'est plus possible à cause de sa déformation tectonique.