Saint-Même

le cirque des sources du Guiers Vif, à l'est de Saint-Pierre-d'Entremont

Le vallon des sources du Guiers Vif, en amont de Saint-Même, est un site très visité. Il draine un cirque fermé du côté du sud et du côté est par des falaises urgoniennes mais largement ouvert vers le nord-ouest. Les eaux alimentant le Guiers Vif y surgissent dans des grottes ouvertes au pied de ces falaises, au fond d'un rentrant ébauchant le dessin des reculées* (qui sont fréquentes dans les résurgences jurassiennes).

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Le cirque de Saint-Même vu du nord depuis la route du village des Grattiers.
s.or = synclinal chartreux oriental ; f.G = faille de la Gorgette (partagée ici en deux branches) ; d.cA = décrochement du col de l'Alpe.
"ébt" = éboulement : amas de gros blocs urgoniens qui barre du côté aval la prairie du fond du cirque (la flèche indique son parcours, depuis Tracarta, son origine).

La formation de ce cirque est étroitement liée à la structure tectonique du secteur, plus précisément au passage d'une grande faille, le décrochement du col de l'Alpe. Cette cassure coupe le synclinal de la Chartreuse orientale et le décale dans le sens dextre en ramenant vers l'ouest la barre de falaises urgoniennes qui forme la barrière méridionale du cirque, jusqu'en face de l'échine tithonique du Colleret (qui ferme le cirque du côté ouest). L'évidement du cirque résulte de l'ablation des terrains tendres (marnes de Narbonne) que la faille avait amené ici, dans le compartiment nord, en face de l'Urgonien du fond du synclinal du compartiment sud.

Schéma expliquant la formation du cirque de Saint-Même
(vu du nord-ouest, c'est-à-dire à 90° dans le sens inverse des aiguilles d'une montre par rapport à la photo ci-dessus)

1) Après le jeu du décrochement du col de l'Alpe, l'érosion du massif de la Chartreuse débute par un aplanissement qui enlève les parties saillantes des plis, quelle que soit la nature de la roche.

2) L'érosion ultérieure se fait surtout par ruissellement. Elle enlève avant tout, au contraire, les terrains les plus tendres, là où ils sont déjà mis à nu, c'est-à-dire à l'emplacement de Saint-Même. La tranche de l''Urgonien du compartiment méridional du décrochement est ainsi dégagée et le fond de la gouttière urgonienne du synclinal oriental peut laisser sortir à l'air libre les eaux qu'elle draine. Ces écoulements provoquent progressivement le retrait de la falaise, ce qui accentue le renfoncement du cirque, là où se trouvent maintenant les sources du Guiers Vif.

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Les crêtes de l'Aulp du Seuil et le cirque de Saint-Même, vus du nord, depuis la Roche de Fitta.
Sous cet angle le val suspendu du synclinal chartreux oriental (s.or.) est vu presque d'enfilade
Le cirque de Saint-Même correspond à une encoche d'érosion qui entaille la falaise urgonienne de l'abrupt de faille du décrochement du col de l'Alpe (d.cA), et l'a fait vers le sud-est jusqu'à atteindre l'axe du synclinal.
En haut à gauche l'échine de prairies, à soubassement de Sénonien, de l'Alpette de la Dame est posée sur l'Urgonien du flanc oriental du synclinal. À sa droite, les abrupts de premier plan, qui la supportent, sont traversés, à mi-hauteur des bois, par les deux branches de la faille N-S de la Gorgette (f.G) que l'on voit d'enfilade (celle de droite est empruntée par le Pas de la Mort).
En avant-plan gauche le chaos de Tracarta (en sous-bois), formé par les blocs dissociés résiduels de la dalle de l'Urgonien supérieur, qui a été arrachée le long de la crevasse de Roche Blanche.

La position précise des sources du Guiers s'explique très bien par cette structure tectonique d'intersection d'un synclinal par une faille oblique.

En effet les eaux qui, sur les deux flancs du synclinal, s'infiltrent dans le karst de l'Aup du Seuil se réunissent finalement à la limite inférieure des couches urgoniennes, arrétées par les niveaux argileux de l'Hauterivien. Dès lors elles suivent le fond de la gouttière naturelle que le ploiement synclinal a imprimé à ce niveau. Le fait que cette gouttière soit inclinée vers le nord conduit ces eaux à s'échapper de ce côté, plus précisèment là où elle est tranchée par la falaise qu'a déterminé le décrochement.

Cette disposition du réseau souterrain explique aussi pourquoi les falaises du fond du cirque, qui cernent les résurgences du Guiers, s'écartent du tracé de l'abrupt de faille en décrivant un rentrant en direction du sud. C'est le résultat de l'érosion régressive qui s'est produite ici par effondrement des voûtes deq salles qui avaient été creusées par le Guiers Vif dans son trajet souterrain.


La cascade inférieure du cirque de Saint-Même
Les eaux du Guiers Vif franchissent ici un ressaut entaillé dans les couches presque horizontales de l'Hauterivien.

Les falaises qui dominent le cirque de Saint-Même du côté oriental sont formées uniquement par l'Urgonien inférieur ; elles sont le rebord inférieur d'une longue déclivité boisée représentant la dalle structurale du sommet de ces couches. Mais cette dalle se révèle largement garnie par un amas de blocs énormes qui constitue le chaos de Tracarta (les blocs y sont noyés la végétation et ainsi rendus invisibles à distance).

Ce relief particulier correspond aux reste d'un ancien éboulement : la dalle d'Urgonien supérieur du flanc est du synclinal oriental, inclinée en direction du creux du cirque s'est détachée et a glissé en se disloquant à la surface des lits marneux des couches à Orbitolines. Une partie des matériaux de cette dalle calcaire s'est éboulée jusque dans le cirque de Saint-Même, où ses fragments ont construit le barrage qui a retenu les alluvions de la prairie du fond du cirque, mais de nombreux blocs de grande taille sont restés sur cette surface de glissement (le sentier menant au habert de Dame serpente entre ces blocs). La trace de la crevasse qui constituait la limite supérieure de cet arrachement est quant à elle bien visible : elle correspond à la falaise arquée en croissant de la Roche Blanche.

Au sud de la falaise de Tracarta, à l'aplomb de l'Alpette de Dame, le Pas de La Mort permet de rejoindre le plateau de l'Aup du Seuil depuis les sources du Guiers. Cet itinéraire suit d'abord une vire horizontale à flanc de falaise puis utilise, à son extrémité nord, une cheminée un peu étroite qui s'élève en biais vers le sud. Cette dernière suit un plan de faille bien dégagé, presque vertical quoique rentrant vers l'intérieur de la montagne. C'est celui d'une ancienne faille extensive dont la lèvre orientale est abaissée, ce qui permet d'atteindre rapidement le niveau des couches à Orbitolines.

 Il s'agit même, vraisemblablement, du prolongement le plus septentrional visible de la "faille de la Gorgette" (définie à la page "Dent de Crolles nord"), qui se dédouble en fait ici en deux plans de cassure presque parallèles.

 


Tableau général des pages consacrées aux différents secteurs du chaînon des Hauts de Chartreuse :
Granier col et Porte de l'Alpette,
Roc du Pinet, Plateau del'Alpette col de l'Alpe 
 Saint-Même Aup du Seuil
Lances de Malissard crête de Bellefond 
vallon et col de Bellefond Chalet de Bellefond 
Sources du Guiers, Trou du Glas Dent de Crolles 
   Cartes du chaînon Crolles - Bellefond
Carte géologique simplifiée (fond topographique d'après la carte IGN au 1/100.000°)
carte géologique au 1/50.000° à consulter : feuille Montmélian

St-Pierre-d'Entr.

La Plagne

Le Pinet, Alpette
Château du Gouvernement LOCALITÉS VOISINES Col de l'Alpe

Le Colleret

Lances de Malissard

L'Aulp du Seuil
N.B. Les localités entre parenthèses appartiennent à une autre section du site et leur page s'ouvrira avec l'en-tête correspondant.

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