Dent d'Oche, Château d'Oche |
Le sommet de la Dent d'Oche, qui culmine à 2221 mètres, est celui que l'on voit le mieux, en fond de tableau, depuis la rive septentrionale du Lac Léman car il n'est séparé de ce lac que par des chaînons beaucoup moins élevés (principalement celui des Mémises). Cette situation éminente est liée à sa structure qui est celle d'une épaisse lame calcaire redressée et repoussée en chevauchement sur les couches plissées des chaînons plus septentrionaux.
Coupe de la Dent d'Oche et des chaînons parallèles voisins (extrait retouché de la légende de la carte au 1.50.000° Thonon-Châtel)
"Ds" = "Dogger à Cancellophycus".
Du côté occidental, la puissante barre rocheuse qui forme la crête de la Dent d'Oche s'interrompt brutalement peu avant d'atteindre le thalweg du vallon de l'Ugine (voir le cliché en haut de page). En outre on n'en retrouve aucun prolongement en rive opposée (ouest) de ce dernier : au contraire, aux abords du Mont Baron, affleure une succession stratigraphique différente, plus typique des "médianes plastiques", notamment par la présence de son épais Dogger argilo-calcaires "à Cancellophycus".
Cette terminaison brutale a une origne tectonique : elle correspond à une importante faille, orientée N40, le décrochement de Bonnevaux, par le jeu sénestre duquel on retrouve plus au sud-ouest, au Mont Ouzon (sur la rive gauche de la Dranse d'Abondance) la succession jurassico-crétacée particulière, plus proche du type "médianes rigides", qui est celle de la Dent d'Oche.
On notera que l'orientation de ce décrochement et le sens de son rejet apparaissent à première vue compatibles avec celle du raccourcissement associé au plissement ; toutefois on note un écart assez important avec la direction N10 qu'impliquerait ce raccourcissement (orienté N160) : on doit donc plutôt envisager qu'il s'agisse d'un accident qui a joué postérieurement au plissement, de la même façon que le décrochement dextre de la Bosse. On peut assez aisément envisager d'y voir deux accidents conjugués*, ayant délimité une sorte de poinçon s'avançant vers le nord (voir la carte en fin de page) à la faveur d'un épisode de raccourcissement pratiquement N-S. |
L'arête sommitale de la montagne est formée par les calcaires massifs du Malm, dont les couches pendent aux environs de 60° vers le sud : tandis qu'elles forment des dalles qui plongent de ce côté, vers le vallon d'Oche elles sont tranchées presque orthogonalement par les abrupts du versant nord : ce serait un "crêt" typique si les couches n'y étaient pas aussi redressées.
Ces calcaires, déjà stratigraphiquement épais, y sont en outre presque redoublés par une petite faille de chevauchement secondaire qui franchit la crête 100 m à l'est du refuge (lequel est construit sur une épaule de l'arête ouest) : c'est cette cassure qui détermine le dernier ressaut qu'il faut franchir pour finir d'atteindre le sommet.
Du côté sud la puissante lame calcaire du Jurassique supérieur de la Dent d'Oche s'enfonce de façon normale sous les calcschistes néocrétacés dans lesquels est ouvert le vallon d'Oche. Ce dernier, qui culmine à l'étroit col de Planchamp qui a la structure d'un "val", puisque ces calcschistes y occupent le cœur d'un synclinal d'Oche. Mais ce pli est par contre très peu ouvert, car les calcaires du Malm de la face nord du Château d'Oche, qui constituent le puissant abrupt de son flanc sud y sont presque verticaux.
Ce sommet du Château d'Oche correspond donc, pour l'essentiel, au Malm du flanc nord de l'anticlinal immédiatement plus méridional, c'est-à-dire de celui de Pelluaz. Il est affecté en outre par un chevauchement du Château d'Oche qui y fait reposer du Trias sur le Malm. Cet accident prolonge sans ambiguité celui bien caractérisé à ce égard qui se manifeste dans les basses pentes du vallon d'Oche en faisant chevaucher la partie méridionale de l'anticlinal de Pelluaz sur le Malm redressé du flanc sud du synclinal d'Oche.
Mais la coupe naturelle que donne la terminaison occidentale de la crête rocheuse, entre les vallons convergents du col de Planchamp et des Portes d'Oche, montre que ce dispositif est affecté de complexités supplémentaires.
En premier lieu, au bas de ces abrupts, le Malm du sommet du Château se renverse vers l'ouest, avant de décrire un repli synclinal à plan axial plongeant vers le NW par lequel il se raccorde, plus bas et plus à l'ouest, à la lame redressée qui suit la rive gauche du talweg d'Oche (ce repli affecte donc un dessin antiforme bombé vers le sud). D'autre part la partie méridionale de l'anticlinal de Pelluaz affleure au sud du col des Portes de façon paradoxale. En effet sa voûte de Malm (à l'endroit), qui forme les Aiguilles de Darbon, est juxtaposée au Trias du repli que dessine le Malm renversé au nord du col, Cela ne peut s'expliquer que par le jeu en extension d'une cassure tardive (la faille des Portes d'Oche) abaissant cette partie méridionale de l'anticlinal de Pelluaz. |
Le versant nord-oriental de la montagne est, quant à lui, entaillé presque orthogonalement aux structures, ce qui en donne donc une bonne coupe naturelle d'ensemble.
Mieux encore que sur le versant nord-ouest, on y voit que les abrupts du Malm de la crête de la Dent d'Oche couronnent une succession normale, mais d'épaisseur très réduite, dont la base est formée par du Trias supérieur argilo-dolomitique. Ce dernier repose en chevauchement sur un dispositif plissé où les couches du Malm sont beaucoup moins épaisses et où le Dogger est présent sous la forme de l'épaisse série marno-calcaire dite des "couches à Cancellophycus".
Cette opposition annonce celle entre "Médianes rigides" (compartiment chevauchant) et "Médianes plastiques" (compartiment chevauché). [voir à ce sujet la page"stratigraphie"], à cela près que les calcaires du Trias moyen (typiques des "rigides") ne sont pas représentés dans la semelle du chevauchement de la Dent d'Oche. |
aperçu général sur le massif du Chablais |
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Dent d'Oche |
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