Briançon, Trois-Têtes, Randouillet |
La ville de Briançon est bâtie au confluent de la vallée de la Guisane et de celle de la Durance, aux confins orientaux de la zone houillère briançonnaise. Alors que la première de ces deux vallées, largement ouverte, suit longitudinalement la marge orientale de la zone houillère, la seconde coupe orthogonalement les reliefs calcaires des chaînons du Briançonnais oriental, c'est-à-dire situés à l'est de cette zone houillère.
La ville de Briançon et le cours supérieur de la Durance (débouché de la trouée du col frontalier du Montgenèvre), vus de l'ouest, d'avion. |
Effectivement la ville haute est bâtie au pied de l'extrémité méridionale du plus occidental de ces chaînons, celui de la Grande Peyrolle : il la domine par les abrupts de la Croix de Toulouse qui ont été entaillés par le creusement en gorge du lit de la Durance.
Les terrains qui constituent cette montagne représentent le prolongement méridional de l'unité de Roche Gauthier. Elle constitue ici la couverture mésozoïque, relativement autochtone, de la zone houillère et se caractérise par une succession carbonatée "classique" comportant du Trias moyen reposant sur une semelle siliceuse de quartzites et de Verrucano en contact normal ("stratigraphique ") sur le Houiller (voir plus de détails à la page "Peyrolle").
La ville de Briançon et son cadre montagneux sud-oriental, vus de l'ouest depuis le sommet de Prorel. (suite de cette vue vers la droite à la page "Grande Maye") (hr) = terrains houillers, masqués par les alluvions quaternaires, du substratum de l'unité de Roche Gauthier (au pied de la Croix de Toulouse). grandes cassures : f.A = faille des Acles ; f.Cl = faille de La Clarée ; ac.B = accident transverse de Briançon ; f.pB = faille du Pont Baldy (= prolongement de la faille de Lenlon, décalé par l'accident de Briançon) ; f.rG = faille du Rocher Gafouille. u.tm = unités briançonnaises de type "classique" (à semelle de Trias moyen) de la gorge amont de la Cerveyrette (voir la page"Lausette") n.G = nappe de la Crête des Granges (en rive gauche de la Cerveyrette),de type "Peyre Haute" (à semelle de Norien) ; subdivisions de cette nappe en rive droite de la Cerveyrette : u.Gi = unité de l'infernet ; u.Gs = unité de La Seyte ; u.Gr = unité du Randouillet. |
Mais ces couches ne se poursuivent pas vers le sud au delà du Fort des Salettes et des éboulis qui garnissent son pied, qui supportent les faubourgs septentrionaux de la ville ainsi que le tracé de la N.94. En effet la vieille ville, ainsi que sa citadelle, sont installées sur un verrou que la Durance entaille en une gorge profonde : or les couches qui arment ce verrou sont à l'est (en amont) des dolomies noriennes et à l'ouest (en aval) des calcaires plaquetés à zones siliceuses du Malm - Néocomien. Cette succession se rapproche de celles du "type Peyre Haute" par l'âge norien de ses dolomies. Elle est plus précisément caractéristique de la nappe de la crête des Granges, qui aboutit ici, depuis le sud, en traversant la vallée de la Cerveyrette (voir la page "Infernet"), après avoir armé la crête de La Grande Maye.
Au nord de la N.94 cette succession semble trouver son prolongement plus à l'est que le fort des Salettes, dans l'unité de l'Enrouye qu'entaillent les ravins du versant oriental de la crête de Peyrolle. Il y a donc là un accident tectonique qui sépare l'unité tectonique de la Croix de Toulouse de celle à laquelle appartient la vieille ville. Le tracé de cet accident de Briançon, tel qu'il résulte de la cartographie des lieux, passe à peu près à mi-distance du cours de la Durance et de la route N.94, ce qui lui donne une orientation sensiblement N70 (voir la carte structurale ci-après et, pour plus de détails, la page "Peyrolle"). C'est à l'évidence cet accident qui a dirigé le cours de la Durance en amont de la vieille ville, même si ce dernier s'inscrit maintenant un peu plus au sud que le tracé de la cassure qu'il a dû suivre originellement (ce genre de décalage au cours du temps est en effet un phénomène extrêmement classique).
L'accident de Briançon est partout masqué par des formations quaternaires superficielles (éboulis, moraine), de sorte que sa nature exacte est quelque peu énigmatique. Son tracé rectiligne et la comparaison de ses deux lèvres suggèrent que c'est un décrochement dextre décalant vers l'ouest, dans son compartiment méridional, l'unité de l'Enrouye et la faille de Lenlon.
En effet les escarpements calcaires de la Citadelle sont séparés des pentes de Sainte-Catherine (formées de de grès houillers) par une faille sub-verticale que l'on suit vers le sud jusqu'au lit de la Cerveyrette (qui la traverse obliquement au Pont Baldy) : cette faille du Pont Baldy a tout pour correspondre à celle de Lenlon, à ceci près que sa lèvre occidentale ne montre que du Houiller sans trace des terrains mésozoïques de sa couverture ...
Cette disparition des couches mésozoïques le long de cette faille est d'autant plus énigmatique qu'elle cesse plus au sud au delà du Pont Baldy (voir les pages "Infernet" et "Grande Maye"). |
En rive méridionale de la Durance les forts des Trois-Têtes et du Randouillet sont, l'un et l'autre, bâtis sur des buttes de dolomies noriennes qui prolongent celles affleurant à l'est de la citadelle : elles appartiennent aussi à la nappe des Granges. Mais ces couches sont ici disposées à l'envers, de sorte qu'elles reposent en chapeau sur un soubassement de calcschistes à zones siliceuses du Malm-Néocomien.
En outre une cassure orientée NNW-SSE, la faille du Pont d'Asfeld, dénivelle la succession de l'unité du Randouillet en abaissant sa lèvre orientale (Fort des Trois Têtes) par rapport à sa lèvre occidentale (cité Vauban).
La crête boisée du Point du Jour, qui s'élève jusqu'au fort de l'Infernet, est également largement constituée de dolomies noriennes en série renversée, avec un pendage vers l'ouest plus fort que celui de la crête. En fait elles se disposent en deux écailles imbriquées portant l'une et l'autre leur couverture normale (renversée) de Jurassique et de marbres en plaquettes (voir la page "Infernet").
Le visiteur des deux pages "Briançon" et "Infernet" se fera sans doute la réflexion que la géologie structurale des environs de la ville de Briançon est complexe et donne même un certain sentiment d'incohérence.
Qu'il se rassure en sachant que ce sentiment est partagé par l'auteur du site geol-alpes et, je crois, par la majorité de ceux qui se sont penchés sur le problème posé par l'histoire tectonique de ce petit secteur.
Résumons ce que l'on sait : un enchaînement complexe et mal élucidé de déformations tectoniques a abouti à créer une juxtaposition d'unités tectoniques, relativement étrangères les unes aux autres par leur constitution stratigraphique, les a empilées en renversant les unes et en gardant les autres à l'endroit, et les a enfin fragmentées par un système de failles entrecroisées. Mais quelle est exactement l'histoire de ces évènements ?
On voit sur cet exemple local que le schéma général proposé dans ce site pour tenter de parvenir à la compréhension de l'édifice structural du Briançonnais donne, certes, des pistes essentielles, mais qu'il achoppe encore à rendre compte de bien des détails locaux.
Deux autres exemples, celui du Chenaillet et celui de Prorel-Eychauda, posent également des énigmes quant à l'origine des particularités de leur structure. Il n'est peut-être pas sans signification que ces trois exemples soient situés sur une même transversale E-W, qui correspond aussi au maximum de l'extension vers l'est des affleurements de socle cristallin du massif du Pelvoux : n'observerait-on pas, à cette latitude, des effets tectoniques particuliers et encore mal compris, qu'une striction particulièrement accentuée des zones internes contre le socle autochtone y aurait induit ? ... |
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Carte structurale schématique légende détaillée à la page cartes du Briançonnais |
aperçu
général sur la stratigraphie
du Briançonnais aperçu général sur la tectonique du Briançonnais |
Carte géologique simplifiée
des montagnes à l'est de Briançon
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M. Gidon (1977), publication n° 074
catalogue des cartes locales de la section Briançonnais
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Prorel |
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