montagnes de Sous-Dine et des Frêtes

les chaînons les plus occidentaux des Bornes au NE de la vallée de la Fillière

La montagne de Sous-Dine (2004 m.) est un splendide mont* jurassien qui est moulé sur l'Urgonien de l'anticlinal du Parmelan. Ce pli y dessine une large voûte (évoquant une carapace de tortue) doucement plongeante vers le sud-ouest.
Mais cette voûte reprend de l'altitude, au sud de la Fillière, pour aller culminer au Parmelan. L'axe du pli subit donc un ensellement* à l'emplacement du tracé de la vallée de la Fillière. Cette rivière y a percé la carapace urgonienne en ouvrant une cluse* qui serait très typique si elle ne se fermait pas du côté amont, à la façon des reculées* jurassiennes.

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La montagne de Sous-Dine et la vallée de la Fillière Vue d'avion prise du sud-ouest vers le nord-est
La vue est suffisamment plongeante pour montrer le coeur de l'anticlinal du Parmelan (a.P) dans l'entaille de la Fillière, qui perce, en fenêtre*, le chevauchement de la Fillière (ØF) : en effet, au niveau de Nant Sec (en fait, surtout en rive gauche), le Berriasien recouvre, par l'intermédiaire de cet accident, de l'Urgonien et du Nummulitique.
s.Ch = synclinal de Champ Laitier ; f.E = faille de l'Enclave (en rouge), à compartiment ouest soulevé : elle appartient sans doute à la famille des failles normales* anciennes, sectionnées par les chevauchements.
Il apparaît clairement que le chevauchement de la Fillière (ØF) et son satellite, le chevauchement de Pierre Taillée (c.PT), sont ployés, eux aussi, en anticlinal (les flèches soulignent le sens des mouvements le long de ces chevauchements).
voir l'autre versant de la vallée de la Fillière à la page "Parmelan"


Le fond de vallée de l'entaille de la Fillière révèle la présence, a priori surprenante, au coeur de l'anticlinal du Parmelan, d'une succession comportant de l'Urgonien et même du Nummulitique. Cette succession apparaît là parce que la rivière y a crevé, en "fenêtre tectonique" la surface d'un accident tectonique important, le chevauchement de la Fillière, et en montre le substratum autochtone.
La succession autochtone (chevauchée) est rebroussée en crochon vers le nord-ouest, ce qui indique le sens de mouvement de ce chevauchement. La surface de chevauchement est d'autre part ployée en anticlinal, car elle disparaît, vers l'aval comme vers l'amont, en s'enfonçant sous la surface du sol : elle a donc été tordue par la formation de l'anticlinal du Parmelan, comme l'ont été les couches qu'affecte ce pli.

(voir le schéma interprétatif en coupe B).

Il découle de ces faits que la tranche de couches qui forme la partie haute des montagnes du Parmelan et de Sous-Dine a été charriée vers l'extérieur du massif, avant d'être déformée par le plissement.

La succession charriée de Sous-Dine est accessoirement affectée par un accident de second ordre, le chevauchement de Pierre Taillée, Il s'agit d'une faille qui redouble l'Urgonien du flanc nord-ouest de l'anticlinal du Parmelan. compressive à vergence nord-ouest, dont on voit surtout le tronçon qui traverse
Vers le sud-est il se connecte très vraisemblablement sur le chevauchement principal, de la Fillière. Vers le nord-ouest, il disparaît vers le bas, au sein de la série nummulitique de la périphérie du massif, où il est vraisemblablement cacheté* par les couches les plus récentes.

 Cet accident associe une géométrie de faille inverse (couches coupées à angle aigu) et un rejet compressif avec un fort pendage, qui est peu normal pour une faille de ce type. D'autre part son sens de rejet peut paraître paradoxal, puisqu'il consiste en un abaissement du compartiment supérieur. C'est là une disposition très similaire à celle que l'on observe près de Grenoble, au Mont Jalla, dans le flanc ouest de l'anticlinal de l'Écoutoux. Cela porte à y voir (comme dans ce dernier exemple) une faille inverse qui a été basculée par le plissement (ici lors de la formation de l'anticlinal du Parmelan). Il s'agit en définitive d'un chevauchement présentant les mêmes caractères que celui de la Fillière et qui est donc vraisemblablement un satellite de ce dernier.

Du côté SE la montagne de Sous-Dine est bordée par le val jurassien* du Champ Laitier : il correspond à un synclinal à coeur de Nummulitique qui représente clairement le prolongement méridional du large synclinal de Solaison (de rive droite du Borne) ; il se rétrécit à l'opposé vers le SW au point de s'effacer et de perdre son contenu post-urgonien au sud de l'entaille de la Fillière.

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La montagne des Frêtes et le val de Champ Laitier, vu du nord-est, depuis la Roche Parnal.
a.F = anticlinal des Frêtes ; s.CL = synclinal de Champ Laitier (= de Solaison) ; a.P = anticlinal du Parmelan ; f.P = faille du Pas de la Truie (prolongement de celle du col du Pertuis, visible à l'horizon lointain, sur la crête du Parmelan) ; f.rP = faille de la Roche Parnal (faille extensive ancienne, parallèle à la précédente).


Ce val est séparé du plateau des Glières par la longue et lourde échine de la montagne des Frêtes. C'est un typique mont jurassien* qui correspond à l'anticlinal de Leschaux de rive droite du Borne et qui, à l'opposé, s'efface par amortissement au sud de la Fillière, en se fondant dans le plateau urgonien de Pertuis. L'échine de ce mont se termine du côté NE, au Crépon de Montoulivert, par des abrupts transversaux à sa voûte anticlinale qui lui font dominer la vallée du Borne.


L'extrémité nord-orientale de la Montagne des Frêtes. vue du nord-ouest, depuis le col du Freu (Roche Parnal).
a.F = anticlinal des Frêtes ; s.CL = synclinal de Champ Laitier ; f.S = faille de Spée : c'est une cassure satellite méridionale du décrochement du Freu ; son tracé, ici vu d'enfilade, passerait à gauche des chalets de Tinnaz ; il se prolonge vers le NW en déterminant la col du Sable sur la crête Roche Parnal - Sous-Dine (voir la page "Sur-Cou") .
Les abrupts nord-est du Crépon tombent sur une dépression fermée, le "Creux des Sarrazins", qui éventre l'anticlinal et au NE de laquelle la voûte urgonienne se reconstitue, abaissée par la faille de Spée. L'allongement de cette dépression est clairement guidé par le tracé de la faille qui a donc dû servir d'amorce à la formation d'un réseau karstique qui est certainement à l'origine de ce trait du relief.
Les alpages de la Tinnaz occupent le creux d'un val qui représente l'extrémité nord-est de celui de Champ-Laitier (voir le cliché précédent).


À l'extrémité nord-est de la montagne de Sous-Dine la carapace urgonienne est de nouveau crevée par l'érosion : symétriquement à l'entaille de la Fillière l'érosion y a ouvert une ébauche de cirque dont le fond, garni d'alpages, héberge les chalets de la Balme.

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Le versant nord-oriental de la Montagne de Sous-Dine vu de l'est, depuis la Roche Parnal.
a.F = anticlinal des Frêtes ; s.CL = synclinal de Champ Laitier (= de Solaison) ; a.P = anticlinal du Parmelan. ; f.P = faille du Pas de la Truie (prolongement NE de celle du Pertuis, visible à l'horizon lointain, sur la crête du Parmelan) ; f.rP = faille de Roche Parnal (faille extensive sans doute ancienne)


 C'est là un bel exemple de brutale inversion du relief, faisant passer d'un mont jurassien, du côté sud, à une combe anticlinale, du côté nord : ce dispositif morphologique est assez comparable à celui qui affecte l'anticlinal médian de la Chartreuse entre le couvent de la grande Chartreuse et le sommet du Charmant Som : il montre combien l'arasement de la carapace urgonienne de l'anticlinal permet aisément à l'érosion d'affouiller profondément dans les couches sous-jacentes, du cœur du pli.

Dans la partie sud-orientale de l'hémicycle de la Balme les falaises qui l'enserrent tranchent l'inflexion des couches du flanc sud-est de l'anticlinal du Parmelan. Cela permet de voir en coupe que cette inflexion correspond en fait au crochon d'une cassure extensive à lèvre sud-orientale abaissée. Cette faille du Pas de La Truie est en fait le prolongement nord-oriental de la faille du col du Pertuis qui affecte le même pli, de façon extrêmement similaire, au SE du Parmelan (voir la page Parmelan).

En plus cet abaissement de la lèvre orientale est accentué ici par le jeu compressif d'une faille secondaire plus tardive, à vergence est qui décale en tronçons la faille du Pas de la Truie (voir cliché ci-après) : c'est là un cas particulier entrant dans le cadre du phénomène général de la déformation post-Nummulitique qui a affecté les failles extensives anciennes.



Détail de la fermeture méridionale du cirque de la Balme vue du nord, depuis le col de Sur Cou.
s.CL = synclinal de Champ Laitier (= de Solaison), non visible, en arrière de la crête ; f.P = faille du Pas de la Truie ; f.s = faille secondaire recoupant et décalant celle du Pas de La Truie ; a.P = voûte de l'anticlinal du Parmelan (sa charnière, très déversée vers la droite, se ferme plus à droite que la limite du cliché).
Ce détail de la structure montre l'une des manières selon lesquelles les failles extensives anciennes (ici celle du Pas de la Truie) ont été déformées par la compression ultérieure (qui a créé ici la faille secondaire f.s).


Du côté nord-est de la dépression des chalets de la Balme l'échine de la montagne de Sur-Cou, qui la ferme, doit sa forme en cône émoussé à ce qu'elle est formée par le Valanginien et l'Hauterivien. Mais ces couches sont là en succession renversée et s'enfoncent vers le SW. L'Urgonien qui leur fait suite affleure en contrebas ouest de ce sommet, où il ne forme une barre discrète reposant sur le Nummulitique. Au total il s'agit là du flanc ouest de l'anticlinal du Parmelan, qui est donc très fortement déversé vers le NW.

 Le cœur du pli passe pratiquement au chalet de Balme, puis il correspond au replat d'alpages qui suit le pied des escarpements septentrionaux de Sous-Dine. En fait il y correspond sans doute au prolongement sud-occidental de la faille de Beffay qui s'avère plus au nord (page"Sur-Cou") se confondre avec la surface axiale de l'anticlinal : c'est en effet ce que suggère la brutalité de la superposition dans ce secteur de deux successions de couches à polarités opposées.


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Le versant sud-occidental de la montagne de Sur-Cou, vu du sud-ouest, depuis le sommet ouest (2001) de Sous-Dine.
a.P = anticlinal du Parmelan ; f.B = faille de Beffay (elle suit grosso modo le "plan axial" du pli) ; f.pT = faille NE-SW du Pas de la truie ; f.rP = faille NE-SW de Roche Parnal.



   En ce qui concerne la charnière nord-occidentale de l'anticlinal du Parmelan, telle qu'on l'observe dans la montagne de ce nom, celle-ci n'est plus dessinée par l'urgonien sur cette transversale du pli car l'érosion de ce versant de la montagne l'a complètement détruite ; mais ce que l'on observe à la montagne de Sur-Cou amène à considérer qu'il s'agissait de la charnière d'un pli couché similaire à celle que l'on observe au NE du cours du Borne dans la partie septentrionale de la crête de la Pointe d'Andey (voir la page "Andey"). L'anticlinal du Parmelan cesse dès lors d'apparaître comme un pli- coffré* puisque la partie plate, culminante, du dessin de ce pli n'est pas une véritable "voûte" mais la partie rabattue à l'horizontale de sont flanc sud-oriental (voir la coupe schématique ci-après), ceci d'ailleurs à l'occasion d'une torsion tardive (voir les pages "Sur-Cou" et "Andey").

On peut s'interroger, d'autre part, sur les rapports entre la structure du cirque de Balme et celle de la la boutonnière de la Fillière, plus au sud-ouest. La faille de Beffay qui cisaille le cœur du pli et qui est tordue de façon antiforme évoque par cette géométrie celle du chevauchement de la Fillière : n'en serait-elle pas l'amorce, son rejet s'amplifiant du NE vers le SW et prenant un caractère de plus en plus chevauchant ?

La transversale de la montagne de Sous-Dine se situe à mi-distance entre celles des deux coupes ci-après, mais le dessin la concernant est plus proche de celui de la seconde ...


Coupe de la rive droite de la vallée du Borne


Coupe très simplifiée des montagnes de la rive droite du Fier
Le synclinal de Champ Laitier, dont le flanc NW apparaît sur cette coupe comme un simple crochon de la faille extensive du col du Pertuis (f.P) se poursuit au nord-est de la vallée du Borne par le synclinal de Solaison.
Le synclinal d'Ablon, qui a pour flanc NW le crochon de la faille extensive de la Tête à Turpin (f.tT), s'efface vers le nord dans le flanc ouest du synclinal des Glières : cela découle du plongement axial de l'anticlinal de Tête Ronde, qui se perd au niveau des Collets des Glières.
Le synclinal des Glières, quant à lui, se poursuit au nord-est de la vallée du Borne par le synclinal de Cenise et son flanc SE y est également affecté par le chevauchement de la montagne des Auges (ØA).



Carte géologique à consulter : feuille Annecy-Bonneville

Carte géologique très simplifiée des plateaux des Bornes occidentales
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M.Gidon (1977), publication n° 074
.


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