Grand Colon, La Pra, Lac du Crozet |
La partie moyenne du cours du Doménon, entre les lacs Robert et le refuge de La Pra, est orientée NE-SW, longitudinalement à la chaîne de Belledonne. Elle appartient au compartiment occidental de la chaîne, situé à l'ouest de l'accident de La Pra (voir l'aperçu d'ensemble sur le massif de Belledonne). Il en va de même pour le petit chaînon du Grand Colon (qui en constitue la rive occidentale en amont de l'Oursière) et le haut vallon de Lancey avec son Lac du Crozet.
Cette partie de la chaîne est caractérisée par un large développement de roches très "basiques" et très sombres, typiques d'une succession ophiolitique*, qui prolongent celles de la station de Chamrousse et qui sont, ici aussi disposées à l'envers : c'est le terme inférieur de cette succession (les serpentinites) qui affleure en chapeau au sommet du Grand Colon, où il se trouve d'ailleurs logé dans une inflexion synforme* d'axe NNW-SSE.
Dans le vallon du Crozet le chapeau de serpentinites du Grand Colon est, comme normal dans la succession ophiolitique, séparé des amphibolites qui affleurent au revers sud de la montagne (Roc de l'Hopital) par un puissant coussin de gabbros. Par contre, plus à l'ouest, dans le versant de la montagne qui s'infléchit progressivement pour tomber vers la basse vallée du Doménon, il repose directement sur les amphibolites. Cette absence locale des gabbros est énigmatique (sans doute est-elle due au jeu d'accidents tectoniques ayant joué pendant ou peu après la formation de la croûte océanique ?). |
Le vallon du Mercier et le lac du Crozet, vus d'amont, du sud-est, depuis le col de La Pra Les serpentinites sont logées dans un berceau synforme* assez étroit, que le vallon coupe presque orthogonalement et dont le flanc oriental se relève assez fortement en rive droite aux approches de la faille de La Pra. Cette dernière s'élève depuis le col dans le versant de la Dent du Loup, un peu plus à droite que la limite du cliché. |
Le verrou qui retient le lac du Crozet est formé par les gabbros qui appartiennent au flanc ouest de la synforme du Grand Colon : ces roches ont mieux résisté à l'affouillement par la langue glaciaire qui descendait du vallon des lacs supérieurs du Doménon que les serpentinites, souvent très riches en fissures entrecroisées, qui forment le berceau du lac et la partie tout-à-fait supérieure du vallon. Les amphibolites (terme normalement supérieur de la succession ophiolitique) affleurent en contrebas du verrou, notamment dans les pentes que traverse le sentier montant de Freydières (flanc ouest de la synforme) mais aussi aux abords du col de La Pra (flanc oriental de ce pli).
Le vallon du Crozet traverse cette succession ophiolitique. Mais cette dernière ne se poursuit sur sa rive droite que dans les seules parties basses des crêtes occidentales de la Grande Lance, car plus haut l'accident de la Pra la coupe en traversant à flanc de pentes.
Le sommet secondaire du Galeteau, qui domine le versant sud-occidental du vallon du Crozet se fait remarquer par une particularité assez spectaculaire. En effet il a été l'objet d'un assez gros éboulement dont les caractéristiques, assez exemplaires, sont bien visibles depuis le vallon du Mercier, qui héberge le Lac du Crozet.
On constate que la cause de l'arrachement n'est pas, ici, la présence de surfaces qui auraient été orientées favorablement au sein de la masse rocheuse car les traces du débit de la roche par érosion lente sont disposées orthogonalement. Il faut sans doute en rechercher l'origine dans le simple fait que l'érosion glaciaire du vallon avait créé un versant trop abrupt pour être stable après la fonte de la glace qui le soutenait.
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La zone d'arrachement du paquet rocheux qui s'est effondré est tout-à-fait spectaculaire : son fond, littéralement poli par la friction, donne l'impression d'une grande fraîcheur de facture, ce qui suggère un âge relativement récent. Son ancienneté est sans doute "historique", mais elle est sans doute de plusieurs dizaines d'années car Mr Claude Mansiot me dit avoir parcouru en 1992 une voie d'escalade sur ces dalles ....
Le col de La Pra est déterminé par le passage du large couloir de failles N-S qui est connu sous le nom d'accident de La Pra. Son importance est soulignée par le fait que la cassure majeure est bordée du côté oriental par une bande de roches broyées (mylonitisées*). Vers le nord son tracé s'écarte de celui du vallon du Mercier (qui héberge le Lac du Crozet) dont l'origine n'est donc pas structurale. Vers le sud cet accident s'ouvre ici en un faisceau de cassures divergentes, dont la présence a sans doute favorisé l'ouverture du vallon moyen du Doménon lors de l'érosion glaciaire.
En effet cette fracturation a déterminé là une zone de faiblesse vis-à-vis de l'érosion : cela a apparemment suffi à dévier les eaux s'écoulant des lacs du Doménon vers le sud-ouest au lieu de les laisser continuer à s'écouler vers l'ouest, en passant par le lac Crozet. Il s'agit là d'une véritable capture des eaux qui devaient précédemment alimenter le torrent de la Combe de Lancey par cet itinéraire beaucoup plus direct (qui fut certainement celui aménagé par l'ancien cours des glaciers aux époques où ils occupaient ces hautes vallées). Cette capture n'est d'ailleurs probablement réalisée que depuis assez peu, car l'échine du col (qui barre l'ancien cours), ne domine le lit du torrent que d'une vingtaine de mètres !.
On y reconnaît les cassures suivantes :
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la
branche la plus orientale est la faille de la Petite Vaudaine, qui se poursuit dans le versant de la Romanche en déterminant le tracé du ravin du même nom (voir à la page "Romanche" le prolongement de ces failles dans les pentes de cette vallée).
- la branche médiane toujours bordée de mylonites représente sans doute la cassure principale ; elle se poursuit par le lac David et franchit la crête de Jasse Bralard peu à l'est du col de la Petite Vaudaine
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la branche tout-à-fait occidentale, la plus continue, est la faille des Lessines, qui se poursuit vers le sud-ouest, en longeant le pied du chaînon du Grand Sorbier.
Le compartiment compris entre ces deux cassures extrêmes dessine sur les cartes un coin aigu, pointant vers le nord, ayant en coupe l'aspect d'un horst ; mais ce bloc n'est soulevé que par rapport à sa lèvre occidentale alors qu'il est abaissé par rapport à sa lèvre orientale. |
Du point de vue structural le vallon du Doménon, en aval du col de La Pra et jusqu'à la cascade de l'Oursière, montre en fait le prolongement de la disposition observable à l'est de la Croix de Chamrousse ; c'est-à-dire une zone centrale, plutôt déprimée (hébergeant les lacs Merlat et Longet), où affleurent des serpentinites* (c'est-à-dire des Péridotites* métamorphisées) encadrée de deux bandes de gabbros*, elles mêmes flanquées latéralement d'amphibolites* qui s'engagent en dessous : on reconnaît bien là une succession ophiolitique renversée.
Le tout semble bien affecter, ici aussi comme aux Lacs Robert, une disposition en synforme* déversée vers le sud-est. Son flanc occidental, conservé au NE de cascades du Doménon jusqu'au sommet du Pic Chauvin, y prend même la disposition d'un flanc normal à fort plongement vers l'ouest (complétant ainsi la charnière vers le haut).
La partie moyenne du vallon du Doménon, vue du sud-ouest depuis la butte 2232 au nord des lacs Robert. s.A = synforme des lacs Achard (anticlinal plongeant) ; f.lP = faille de La Pra ; f.L = faille des Lessines. Tous les affleurements situés en avant de la faille de La Pra appartiennent à l'ensemble ophiolitique renversé de Chamrousse, mais des failles y occasionnent des basculement du pendage des surfaces de contact entre les différentes formations. Il est vraisemblable que les affleurements de serpentinite des pentes sud-orientales du Pic Chauvin représentent le cœur (déversé vers le SE) de la synforme des Lacs Achard (voir la page"Chamrousse"). la succession à l'endroit de ce sommet est séparée de celle, à l'envers, du Grand Colon (sans doute relativement surélevée) par une faille NE-SW (voir le premier cliché de la présente page). |
Il faut rappeler que cette interprétation implique que la succession ophiolitique aurait été
replissée postérieurement à son renversement, fait qui est d'ailleurs considéré comme avéré dans le secteur du Grand Pic de Belledonne. |
Carte géologique simplifiée des crêtes entourant les pics de Belledonne
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M.Gidon (1977), publication n° 074
plus au nord ;
plus à l'ouest ; cartes voisines : plus à l'est
plus au sud
Page d'introduction à la géologie
de la chaîne
de Belledonne au sens large. aperçu d'ensemble sur le massif de Belledonne |
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