Rochers de Lorzier, Charminelle.
Le chaînon de la Grande Sure, au sud de ce sommet.

La crête des Rochers de Lorzier (1838 m) domine du côté ouest le vallon de La Placette par l'intermédiaire de l'échine de Charminelle qu'entaillent les gorges supérieures de la Roize. Elle représente le prolongement structural, vers le sud, du chaînon de la Grande Sure ; elle est toutefois séparée de la crête de ce dernier sommet par le ravin transversal de l'Hérétang - Grépy, qui s'ouvre en débouchant vers l'ouest au cirque des Trois Fontaines.

figure agrandissable

Le versant ouest du chaînon de la Grande Sure, vu de la montagne de Ratz, depuis les maisons supérieures du village de Layat (à l'ouest du col de la Placette).
Tout le chaînon est constitué par deux lignes de relief parallèles. Celle du Jurassique supérieur (où l'on a distingué trois niveaux, Tii., Tim. et Tis., dans le Tithonique) détermine seulement une ligne de replats ou de molles bosses (Charminelle, Jusson, Chorolant). Celle des calcaires du Fontanil (cF) forme par contre la ligne des crêtes principales qui masque la ligne de partage des eaux avec le bassin du ruisseau du Tenaison (crêtes de la Vache, d'Hurtières et de Chalves).

A/ L'arête sommitale est un crêt* qui est typique par sa dissymétrie, avec ses abrupts occidentaux très francs et son versant oriental pratiquement formé de dalles structurales. Ce crêt de Lorzier est formé par les calcaires du Fontanil, à la différence de celui, urgonien, des Rochers de Chalves, qui lui succède parallèlement plus au sud-est et qui en est séparé par la combe monoclinale hauterivienne des Bannettes. Cette dernière est ouverte direction de l'est et du ruisseau de Tenaison par le vallon transversal de Vararay, au nord duquel la barre urgonienne est fortement effacée : elle n'y réapparait qu'à la latitude de la crête, transversale, du col d'Hurtières, sous l'aspect d'une simple bosse, au Mollard de la Chaleur.

L'échancrure du vallon de Vararay correspond au passage d'un faisceau de failles de décrochement dextres, chacune de faible rejet, qui ont dû y diriger l'action de l'érosion de l'Urgonien. Ces cassures se poursuivent d'ailleurs de l'autre côté de la crête de Lorzier où elles vont jusqu'à diriger le tracé du chenal d'écoulement du torrent de la Roize.

image sensible au survol et au clic

Les crêts parallèles des Rochers de Chalves et de Lorzier, vus du nord, depuis la Grande Sure.
Ce cliché montre, avec peu de déformation perspective des rapports entre les couches, la combe monoclinale de l'Hauterivien (vallon et col d'Hurtières) qui sépare le crêt de l'Urgonien de celui des calcaires du Fontanil et elle fait apparaître l'importance nettement plus grande de ce dernier par rapport à celui de l'Urgonien.
La morphologie souligne ici le fait que l'on peut distinguer deux niveaux dans l'Hauterivien, le niveau inférieur étant plus résistant, parce que un peu moins riche en lits marneux que le supérieur.
Les couches à faciès "calcaires du Fontanil" peuvent être réparties entre 3 niveaux : cFs = calcaires supérieurs ("à silex") brunâtres et à lits marneux ; cFi = masse principale de calcaires francs à patine claire (avec bancs subrécifaux) ; cChs = calcaires bioclastiques et argileux alternés en lits d'épaisseur irrégulière de la partie supérieure de la formation du Chevalon (= membre des Oullières).
Au pied de l'escarpement des Rochers de Lorzier affleure la formation du Chevalon moyenne (membre du Peuil), à marnes et marno-calcaires prédominants (notée cChm).
cFs et cFi se rattachent à l'étage Valanginien, cChs et cChm se rattachent à l'étage Berriasien. On remarque que le faciès "calcaires du Fontanil" tend à occuper de plus en plus de place vers le bas de la succession en allant du sud vers le nord dans ce chaînon.

Le vallonnement des Bannettes se poursuit sans interruption structurale, au nord du col d'Hurtières, par le vallon d'Hurtières, qui est aussi une combe monoclinale typique, dominée du côté est par la crête d'Hurtières qui représente en quelque sorte la réapparition du crêt urgonien de Chalves. Mais elle drainée du côté ouest, à l'opposé de la combe des Bannettes, par le cours également transversal du ruisseau de l'Hérétang.

Ces deux combes alignées sont ouvertes dans les couches riches en marnes de l'Hauterivien, mais elles englobent aussi, sur leur bord occidental, les niveaux relativement délitables des calcaires du Fontanil tout-à-fait supérieurs : ce sont en effet les couches du sommet de la barre massive des calcaires du Fontanil qui forment les dalles du revers du crêt de Lorzier.

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L'extrémité nord des Rochers de Lorzier et la combe d'Hurtières, vus du nord depuis la crête d'Hurtières, peu au nord du Goulet (cliché original obligeamment communiqué par Mr. S. Gidon).
Au nord du col d'Hurtières le crêt urgonien qui avait disparu à Vararey (voir plus haut) se reconstitue ; mais son abrupt reste peu élevé, constitué seulement par les couches inférieures de l'Urgonien. L'Hauterivien supérieur est largement masqué par une jupe d'éboulis presque continue.

B/ Du côté occidental de la crête de Lorzier les abrupts donnent une coupe continue des couches du Crétacé inférieur de ce versant. Dans leur partie qui correspond à l'"entonnoir de réception" du haut ravin de la Roize ils sont impressionnants par leur raideur et fournissent un exemple démonstratif et spectaculaire du processus du recul des falaises par l'érosion "régressive" ascendante. En effet leurs ravines sont en pleine activité et alimentent de nombreuses chutes de pierres, dont les produits recouvrent la piste forestière que l'ONF avait tracée pour atteindre Charminelle en traversant le pied de la falaise.


Coupes transversales aux crêts de Lorzier et de Chalves (figure agrandissable)
Ces coupes font suite, vers le sud, à celle de la Grande Sure


Dans les parties où l'érosion est la plus active on ne parvient guère à repérer les limites des différentes formations, car le rafraîchissement permanent de la coupe ne laisse pas le temps nécessaire pour que l'altération et la colonisation végétale y fassent apparaître les différences de résistance entre les niveaux successifs que l'on distingue ailleurs.

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Les abrupts occidentaux des Rochers de Lorzier, vus du sud depuis le sommet de la Buffe (Vercors).
Ce versant donne une coupe de la partie inférieure des calcaires du Fontanil et des couches de la "formation du Chevalon" sur lesquelles ils reposent : noter dans cette dernière le rubanement par les bancs calcaires plus massifs et la formation de vires herbeuses sur les faisceaux de bancs plus riches en argile.
Dans le coin inférieur gauche du cliché sont visibles les bancs sommitaux du Tithonique. Ceux-ci sont redoublés par le chevauchement de la faille de Mont-Saint-Martin (f.MSM), dont le tracé suit la rive gauche du ravin de Charminelle et se perd, vers le nord (à gauche), sous les éboulis de la prairie de Charminelle.
Pour plus de détails sur les calcaires du Fontanil reportez-vous à la page qui leur est consacrée.

Au pied de ces abrupts la zone de replats et de ressauts secondaires qui sépare les Rochers de Lorzier de ceux de Charminelle est essentiellement une combe monoclinale dont le creusement a été dirigé par le fait que les marnes du Berriasien inférieur sont faciles à éroder. Toutefois son versant oriental montre qu'une faille de chevauchement y redouble les bancs du Tithonique supérieur en les faisant reposer sur les marnes de Sautaret du fond du ravin.

 Cet accident représente assez clairement (voir la page "Roize") le prolongement vers le nord de la faille de Mont-Saint-Martin. Il semble faire un jalon entre ce dernier et le chevauchement de Jusson que l'on observe encore plus au nord (page "Grande Sure"), mais il est difficile de s'en assurer avec certitude, à cause du couvert forestier du versant méridional du ravin de l'Hérétang (voir plus loin).

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La rive droite (septentrionale) du bassin de réception de la Roize, vue depuis les abords du départ de la piste d'exploitation forestière.
Une lame de Tithonique avance en chevauchement, par l'effet de la faille de Mont-Saint-Martin (f.MsM) sur le Berriasien inférieur affouillé par le ruisseau qui descend de Charminelle. La surface de chevauchement est observable dans l'entaille en corniche de la piste forestière.

C/ La bosse boisée de Charminelle représente le soubassement stratigraphique normal de cette succession stratigraphique : sous un chapeau boisé de marno-calcaires du Berriasien inférieur ses abrupts (en partie boisés aussi) sont intégralement constitués par les différents niveaux du Tithonique, qui est ici fort épais (comme sur toute la bordure occidentale de la Chartreuse).

Le pied de ses escarpements est masqué par une jupe d'éboulis qui masque le passage de la faille majeure dite chevauchement de Voreppe (voir la page "Roize").


Le versant nord-ouest des Rochers de Lorzier, vu depuis le Banc du Mollard (abrupts occidentaux inférieurs de la Grande Sure).
d.C = décrochement du Châtelet ; f.MSM = faille (chevauchement) de Mont-Saint-Martin.
Les astérisques indiquent la position des deux points d'observation représentés plus loin dans cette page.

Dans le versant septentrional de cette bosse, en rive gauche du vallon de l'Hérétang (l'Infernet), deux cassures sont observables dans cette succession de bancs calcaires :

- Les affleurements les plus orientaux de Tithonique y sont limités par une faille extensive, à très fort pendage, qui les fait buter du côté est contre le Berriasien. Elle semble constituer l'ultime prolongement méridional visible de la faille du Cul de Lampe, également extensive (page "Grande Sure").Toutefois les conditions d'affleurement (fort couvert forestier et discontinuité des points d'observation accessibles) font que cette corrélation est quelque peu d'incertaine ; elle ne semble pas de prolonger vers le sud.

- Une autre faille, au contraire à faible pendage vers l'est, traverse en diagonale l'éperon de rive gauche du ravin de l'Hérétang, en amont du cirque des Trois Fontaines (qui est entaillé dans les seules couches inférieures de cette formation). Par son jeu compressif, qui est attesté par un crochon synclinal, elle conduit a augmenter l'épaisseur apparente du Tithonique de ce versant : elle représente sans doute le prolongement de la faille de Mont-Saint-Martin, se prolongeant vers le nord pour se raccorder au chevauchement de Jusson sur l'autre rive du ravin de l'Hérétang (voir page "Grande Sure").


La rive gauche de la gorge de l'Hérétang (pentes de l'Infernet), vue depuis le chemin de rive droite (entre Miséricorde et la Combe des Veaux)
(emplacement repéré par un double astérisque sur le croquis d'ensemble du versant, ci-dessus).
FMS représente vraisemblablement le tracé, dans les pentes les plus septentrionales des bosses de Charminelle, de la faille de chevauchement de Mont-Saint-Martin : elle rebrousse le Tithonique supérieur en crochon et se perd plus bas dans les couches du Tithonique moyen, en s'y amortissant, par glissement couches sur couches, dans le flanc gauche (oriental) d'une petite charnière anticlinale.
Les derniers rochers de Tithonique visibles du côté gauche sont séparés des calcaires du Fontanil de la crête de Lorzier par une combe qui montre des marno-calcaires du Berriasien. Ces derniers s'appuient en fait contre le Tithonique par l'intermédiaire du prolongement méridional de la "faille du Cul de Lampe" (FcL). Mais celle-ci est masquée sous les bois et pratiquement impossible à repérer depuis la rive droite de l'Hérétang (d'où est prise cette vue).

A l'arrière plan, sur la crête des Rochers de Lorzier, la barre massive des calcaires du Fontanil est décalée deux fois par des petits décrochement dextres (D1 et D2), celui de gauche étant suivi par le couloir dit "cheminée de Lorzier". Ces cassures sont orientés nord-est - sud-ouest (c'est à dire en biais par rapport à la direction du regard). Leur compartiment droit comporte un rejet vertical d'abaissement qui est dû au pendage vers l'est des couches soumises au mouvement de coulissement.


Les abrupts septentrionaux de Charminelle, dominant le cirque des Trois Fontaines, vus du nord depuis le belvédère du Banc du Mollard (sur le sentier du Pas de Miséricorde).
(habillage de cette figure en projet de finalisation)


La partie inférieure du versant nord des abrupts de Charminelle (cirque des Trois Fontaines) montre trois détails intéressants (cliché ci-dessus).

- à mi-hauteur des escarpements on assiste à la naissance, au toit de la falaise inférieure, d'une rampe* de chevauchement. Dans les pentes qui, plus à droite (plus à l'ouest), regardent vers le vallon de Pommiers (voir la page "Col de la Placette") cet accident aboutit, à l'occasion de son palier* suivant, à l'accroissement de l'épaisseur des couches du Tithonique moyen par redoublement de celles-ci.

- Plus bas dans cette falaise inférieure se développe localement un groupe de fractures très mineures (à rejets seulement métriques) : il mérite d'être observé en tant qu'exemple de la façon dont s'organisent en graben* des failles extensives de deux familles conjuguées (ici l'extension se fait ici à l'extrados des calcaires massifs du Tithonique moyen, en conséquence de l'extension qui a affecté l'extrados de la voûte anticlinale, très ouverte, qu'y dessinent les couches. On peut acessoirement noter que cette disposition ne concerne pas les couches supérieures à ce niveau et qu'elle est donc peut-être syn-sédimentaire ...


(agrandissement de la partie gauche inférieure du cliché ci-dessus)


   

Un détail de la falaise inférieure des abrupts du versant nord de Charminelle, dans le bord méridional de l'entaille du cirque du Grépy, vu du nord depuis le Banc du Mollard (emplacement repéré par un astérisque sur le croquis d'ensemble du versant).
Bel exemple d'un système de failles normales conjuguées, délimitant des grabens et des blocs en escaliers (les rejets verticaux sont de l'ordre de 1 m.)
So = surface de stratification ; Fd = faille à compartiment droit abaissé ; Fg = faille à compartiment gauche abaissé ; Z = direction de raccourcissement ; X = direction d'allongement.
Si l'on en juge par l'absence de fracturation de la base du gros banc et de celui qui le recouvre il est vraisemblable que l'extension qui a produit cette fracturation soit syn-sédimentaire.


- à la partie droite du cliché on détecte, par une dénivellation décalée d'un plan au suivant, le passage d'une cassure oblique : son orientation doit être proche de NE-SW et elle a donc toutes chances (compte tenu du contexte général du massif) d'être un petit décrochement dextre (d.C = "décrochement du Châtelet du schéma d'ensemble).


Carte géologique simplifiée (fond topographique d'après la carte IGN au 1/100.000°)
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