vallon d'Anterne

la haute dépression du revers oriental du massif de Platé

Le large vallon suspendu d'Anterne, qui héberge le lac de ce nom, s'étend sur 3 kilomètres de long au pied des abrupts aussi continus qu'imposants de la longue branche N-S de la crête des Rochers des Fiz (qui culmine à la Tête à l'Âne). Cette zone de relief plus mou, ouverte dans les couches du Jurassique supérieur à moyen, ouvre un assez large passage entre le massif de Platé et celui du Haut Giffre (dont le premier sommet est Le Buet).

Il s'agit en effet d'une combe monoclinale, ouverte dans les Terres Noires et dans les couches marneuses de la base du Crétacé, qui représente en définitive ici l'équivalent du sillon subalpin des massifs plus méridionaux. Toutes ses couches sont pentées vers l'ouest, en tant que flanc oriental du synclinal de Platé, et elle est accidentée par un petit crêt de Tithonique anormalement discret derrière lequel est retenu le Lac d'Anterne.

L'extrémité méridionale de la combe d'Anterne est constituée par la crête W-E qui porte le Col d'Anterne. Au sud de celle-ci la succession stratigraphique est tranchée orthogonalement, sur toute sa hauteur, par la gorge du torrent du Souay (voir la page "Diosaz").

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L'extrémité méridionale de la combe d'Anterne, vue du NE depuis le sommet 2470 des Frêtes de Villy.
f.L = faille du Lac (extensive : lèvre occidentale abaissée) ; s.0 = schéma montrant l'attitude de couches, moins fortement pentées vers l'ouest que le versant occidental de la crête des Frêtes.
Voir la page "Fiz" pour la suite vers la droite des abrupts occidentaux du vallon).

Les pentes méridionales de cette crête, que traverse le sentier qui s'élève du sud depuis les abords de Servoz, donnent une coupe totale de la succession stratigraphique jurassique jusqu'à son chevauchement basal (dit "de la nappe de Morcles"). Elles montrent que cette dernière y est affectée par un redoublement que l'on peut appeler le chevauchement de Moëde. Passagèrement masqué, plus à l'ouest sous les éboulis tombant de la Pointe d'Anterne du col d'Anterne réapparaît, dans ce versant, dans les ravines à l'amont des chalets du Souay (voir la page "Fiz").

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Le versant sud du Col d'Anterne, vu du SW depuis l'altitude de 1940 sur le sentier montant par Ayères.
s.tM = synclinal de la Tête de Moëde ; ØMd = chevauchement de Moëde ; ØS = surface de chevauchement de la couverture subalpine ("nappe de Morcles")


Du côté oriental du col ce rebord méridional de la cuvettte d'Anterne s'élève sur les couches du dos de la corniche du Bajocien supérieur jusqu'à l'extrémité méridionale de la Crête des Frêtes de Villy et de Moëde. Celle-ci est un crêt émoussé, orienté N-S, qui regarde vers l'est et tombe sur le vallon des sources de la Diosaz (voir la page "Diosaz").

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Le haut vallon de la Diosaz
vus du sud-ouest, depuis la Tête de Moëde.
s.pa = surface de la pénéplaine anté-triasique ; ØCh = chevauchement des Chaux ; ØA = chevauchement d'Anterne (?) ; ØS = surface de chevauchement de la couverture subalpine ("nappe de Morcles") ; s.C = synclinal de Commune ; a.B = anticlinal du Buet : ces deux plis ont des axes N70 c'est-à-dire obliques au regard, s'éloignant plutôt de la gauche vers la droite) ; tous ont leur plan axial basculé vers la gauche, de la même façon que la surface de la pénéplaine anté-triasique.
"M" = marbres du Jurassique supérieur ; "tgr" =grès basaux du Trias.

Le revers occidental de ce crêt des Frêtes descend en pente plus modérée vers la dépression du Lac d'Anterne : c'est presque une dalle structurale mais elle en diffère un peu en ceci que la surface topographique y est un peu plus forte que le pendage des couches bajociennes (voir le premier cliché de la page). Cette pente est même suffisamment forte pour que l'érosion y perce les une bonne partie des couches du Bajocien inférieur, de sorte qu'il n'est pas impossible qu'elle y atteigne la surface du chevauchement de Moëde sous les eaux du lac.

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Le Lac d'Anterne vu du sud (de la butte 2191 immédiatement au sud du lac)
Le lac est retenu derrière un verrou glaciaire armé par la barre tithonique (mais des fuites se manifestent à ce niveau, du fait de la fissuration de ces couches calcaires). Du côté sud le lac tend à se combler par l'avancée des cônes de déjections alimentés par les petits ravins qui descendent en entaillant les dalles structurales de Bajocien qui forment les pentes orientales.
f.L = faille du Lac (le compartiment arrière est relativement décalé vers la droite, ce qui correspond à un rejet dextre).

Le Lac d'Anterne, situé au pied du crêt, à mi-distance de la longueur de la combe, est sans aucun doute d'origine glaciaire : il correspond plus précisément à un lac de verrou* retenu derrière la barre des calcaires tithoniques. Ce verrou est en outre accentué par la faille du Lac d'Anterne, verticale presque N-S. Elle y rétrécit fortement la largeur des affleurements de Terres Noires, ce qui correspond au fait qu'elle a un rejet extensif d'abaissement de sa lèvre occidentale. Du côté nord du Lac les Terres Noires affleurent sur les pentes occidentales de la butte 2281 mais elles y sont en contact oblique avec le Bajocien des Frêtes de Moëde : ceci est dû au prolongement vers le nord de la faille du Lac d'Anterne.

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La combe d'Anterne
, vue du nord-ouest depuis la Pointe de Sales.
Les Terres Noires et les couches du Bajocien qui s'élèvent depuis le lac jusqu'à la crête des Frêtes plongent vers l'ouest (c'est-à-dire qu'elles s'enfoncent de l'arrière vers l'avant). Elles sont tranchées vers le bas par la faille du Lac d'Anterne (f.L), orientée NNW-SSE dont la lèvre occidentale est abaissée
ØA = chevauchement d'Anterne ; a.pC = anticlinal du Petit Col ; ØcA = chevauchement du chalet d'Anterne ; ØCh = chevauchement des Chaux.
Les couches sont aussi affectées par des cassures mineures, W-E, extensives : f.Ch? = faille de la Chaux ; f.tV = faille de la Tête de Villy ; f.B = faille des Barmettes ; f.tM = faille de la Tête de Moëde. (voir leurs prolongements en versant opposé à la page Diosaz).

Au nord de l'échine qui descend du point 2494 des Frêtes de Villy jusqu'au col 2162 où elle ferme la dépression du lac le vallon d'Anterne s'ouvre sur les larges alpages des chalets d'Anterne qui couronnent la rive gauche du torrent des Fonds. L'approfondissement de l'entaille d'érosion y met à jour le fait que la succession s'y redouble par le jeu d'un chevauchement d'Anterne qui a une géométrie très comparable à celle du chevauchement de Moëde : il est envisageable que ce soit là sa réapparition septentrionale de ce dernier, encore que les conditions d'affleurement ne rendent pas évident leur raccord vers le haut, dans les abrupts nord de la Tête de Villy (qui dominent le ravin des Chaux).

Quoi qu'il en soit le chevauchement d'Anterne est redoublé vers le haut par une imbrication secondaire, le chevauchement du chalet d'Anterne, qui s'amortit dans les Terres Noires des abords orientaux des chalets d'Anterne.
D'autre part au NE de ces chalets (versant de rive gauche du ravin des Chaux) il est clair que le chevauchement d'Anterne prend naissance par rupture du couple de plis que dessine le Bajocien dans le secteur du Petit Col (voir les deux clichés ci-après).
Il est donc plus vraisemblable que le chevauchement d'Anterne se développe en relai vers le haut de celui de Moëde, en affectant la tranche de roches déplacée par ce dernier (la surface du premier se trouvant décalée vers le bas par le jeu sub-vertical de la faille du Lac).

Au nord de la Tête de Villy ces alpages entourant le chalet d'Anterne sont tranchés du côté NE par les escarpements du rebord du cirque des Fonds, qu'entaille profondément le ravin des Chaux (affluent de rive gauche du Giffre des Fonds). La profonde coupe que fournit ce ravin montre clairement une série de redoublements mais leur interprétation précise reste à établir en en pratiquant une analyse complémentaire sur le terrain.

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Le ravin des Chaux vu du nord depuis les abords du chalet de Grenairon (cliché original obligeamment communiqué par Mr. Serge. GIDON).

Cette entaille montre une succession de falaises et de talus, dont les limites sont bien parallèles. Cette géométrie d'alternances multiples peut s'expliquer par des imbrications tectoniques occasionnant des redoublements de succession.

Deux paraissent vraisemblables :
ØMd? = chevauchement de Moëde ;
ØCh? = chevauchement des Chaux.Elles semblent recoupées par deu failles :
F.Ch = faille des Chaux ; f.L? = prolongement septentrional de la faille N-S du Lac d'Anterne.

On y voit aussi les charnières de deux plis enchaînés : a.pC = anticlinal couché du Petit Col ; s.gC = synclinal couché de Grasses Chèvres : elles correspondent à l'amortissement du chevauchement d'Anterne (voir image suivante).


On y voit essentiellement, sur un millier de mètres de dénivellation, une succession de répétition de vires relativement marneuses et de ressauts plus calcaires même s'il est difficile, faute de données de terrain, de reconnaître avec certitude les attributions stratigraphiques et donc la signification tectonique.

Cette géométrie structurale peut également mettre en jeu des plis dont on ne voit dans ce ravin des Chaux que des sections longitudinales de leurs flancs car seule la partie droite de son entaille est perpendiculaire à la direction d'axe des plis de la région : c'est ce que montre le cliché ci-après.

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Le rebord supérieur de la rive gauche du ravin des Chaux, vu depuis sa rive droite (pentes occidentales du Grenier de Villy). (cliché original obligeamment communiqué par Mr. M. Petetin).
a.pC = anticlinal couché du Petit Col ; s.gC = synclinal couché de Grasses Chèvres.
Ces deux plis couchés relèvent du mode de plissement de type "semblable"* (avec étirement des flancs et épaississement des charnières). Ils ont des axes moyennement obliques au versant, c'est-à-dire presque E-W.
Ils sont remarquablement similaires dans leur dessin au couple anticlinal du Buet / synclinal du Buet que dessinent les mêmes niveaux dans les pentes orientales du cirque des Fonds (peut-être en sont-ils les prolongements sud-occidentaux ?).

On y observe toutefois, à mi-hauteur, un bel enchaînement de deux plis, tranchés presque perpendiculairement par le versant et affectant des niveaux d'attribution peu douteuse : il se dessine assez spectaculairement en contrebas du Petit Col d'Anterne. Il s'avère en outre que c'est ce système plissé qui se rompt plus à l'ouest et s'y prolonge par le chevauchement d'Anterne.

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Le versant septentrional des alpages d'Anterne, vu depuis la Crête des Frêtes de Grenairon. (cliché original obligeamment communiqué par Mme Claude RENOUARD).
N.B. : Ce cliché (pris malheureusement dans des conditions d'enneigement) montre le secteur de raccord entre le précédent et le suivant, que parcourt le chemin montant au Petit Col depuis les Fonds.
a.pC = anticlinal couché du Petit Col ; s.gC = synclinal couché de Grasses Chèvres ; ØA = chevauchement d'Anterne : on y observe que ce dernier nait de gauche (est) à droite (ouest) par rupture du flanc supérieur du synclinal des Grasses Chèvres).

Plus bas le versant septentrional d'Anterne forme les pentes escarpées de rive gauche du Giffre des Fonds qui prend une direction presque E-W pour s'échapper du cirque des Fonds. On y suit le chevauchement d'Anterne qui redouble la barre tithonique de façon très évidente en rive gauche des cascades d'Anterne. Par contre, au sud-est du Pas au Mulet, les affleurements tithoniques discontinus qui sont plaqués sur les Terres Noires en contrebas de la falaise supérieure ne semblent pas être le prolongement de la barre inférieure mais plutôt être des paquets tassés effondrés depuis la barre supérieure).

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La rive gauche de la gorge du Giffre des Fonds
vue du nord depuis les abords de chalet-hôtel de Grenairon (clichés originaux obligeamment communiqués par Mr. Serge GIDON).
Ce cliché montre la manière dont le cours du Giffre des Fonds tranche en oblique la partie tout-à-fait septentrionale du vallon d'Anterne,
s.P (en rouge) = grande ondulation synclinale de Platé ; a.P (en rouge) = grande ondulation anticlinale des Platières.
a.pC = anticlinal couché du Petit Col ; s.gC = synclinal couché de Grasses Chèvres ; a.Ch = anticlinal du Chantet ; ØA = chevauchement d'Anterne.
"p.t." = paquets tassés de Tithonique (attribués à un redoublement tectonique du Tithonique sur la carte géologique).

Le tracé en gorge du Giffre des Fonds s'y termine, avant de déboucher dans la dépression plus ouverte de Sixt, par une profonde entaille qui correspond au franchissement de la barre tithonique. Cette dernière s'élève en rive droite vers le NE en formant la puissante crête de Commune (qui ferme le cirque des Fonds du côté septentrional) et dessine, sur sa rive gauche (au pied de la Pointe de Sales), une structure plissée spectaculaire, les "Faucilles du Chantet".

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Détails de la rive gauche du Giffre des Fonds, vus de Sixt (sortie aval du village).
ØA= chevauchement d'Anterne. Le nom imagé des "Faucilles du Chantet" désigne la charnière de l'anticlinal du Chantet (a.Ch), qui affecte le Tithonique de la retombée de la grosse voûte anticlinale dans laquelle est creusé le cirque des Fonds (en arrière gauche).
La coupe de rive gauche de la gorge du torrent étant orientée W-E elle coupe en biais la charnière anticlinale (d'axe NW-SE), ce qui lui donne, par l'effet de la perspective, un aspect de pli-couché qui est un peu usurpé : en effet le flanc inférieur du pli n'est pas complètement renversé mais seulement basculé un peu au delà de la verticale.

Cet anticlinal du Chantet, d'axe N60, est très déversé vers le nord ; il affecte sous le chevauchement d'Anterne, le Tithonique de la tranche inférieure des imbrications observables dans le Cirque des Fonds (flanc inférieur du synclinal des Grasses Chèvres). Le flanc NW, fortement déversé, de cet anticlinal fait rapidement place, plus en aval, à un synclinal par contre peu visible : en effet le Tithonique, faiblement penté vers le SE, qui affleure dans le lit du torrent appartient déjà à son flanc normal ; c'est lui qui supporte, plus aval en rive gauche du Giffre des Fonds, le Berriasien que le torrent de Sales franchit par la cascade du Rouget.

 Quant au chevauchement d'Anterne il se poursuit nécessairement en traversant ce torrent de Sales plus en amont. Au delà vers le nord (voir la page "Sixt") le versant de rive gauche de la vallée du Giffre des Fonds est trop garni d'éboulis pour que l'on puisse savoir s'il s'y prolonge ou s'il s'y amortit au sein des niveaux riches en marnes du Crétacé inférieur.

 


Versant occidental de la crête des Fiz.
Versant méridional de la crête des Fiz.
Aperçu général sur le massif de Sixt.

Développements à propos de la nappe de Morcles en France.

cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuille Cluses

.
Carte géologique très simplifiée de l'extrémité sud-ouest du Haut Giffre
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M. Gidon (1977), publication n° 074


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