montagne du Siron

entre la vallée des Duyes et la cuvette de La Robine

Le chaînon du Siron court depuis le col d'Ainac jusqu'au sommet de La Bigue (1653) en fermant la dépression de La Robine du côté ouest ; il se fond, au sud de Thoard dans l'ensemble topographiquement plus confus des crêtes du Martignon. Il est constitué par les terrains du Trias et du Lias de la partie inférieure de la succession stratigraphique de la nappe de Digne et appartient plus précisément à son "lobe de la Robine" (voir l'aperçu général sur cette nappe). Ce matériel charrié surplombe les couches autochtones de la formation de Valensole (d'âge tertiaire récent) à la faveur de l'entaille de la vallée des Hautes Duyes.
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La crête septentrionale du Siron (partie occidentale du lobe de La Robine) et la vallée des Duyes, vue d'ensemble, du nord depuis le sommet de Géruen. (cliché original obligeamment communiqué par Mr. Th. Dumont).
ØR = surface de charriage du lobe de La Robine de la nappe de Digne. Les plis affectant le matériel jurassique de la nappe de Digne sont vus, sous cet angle, presque selon leur axe (alors que, plus au sud, ces plis sont plutôt NW-SE (voir les cartes en fin de page) : a.M = anticlinal du Mouras (pli d'axe N-S, déversé vers l'ouest) ; s.E = synclinal de l'Esclaye ; A.B = anticlinal de la Bigue.
Les tirets roses soulignent la base de l'"écaille intermédiaire" (Terres Noires et molasses rouges en série renversée) ; les tirets jaunes soulignent la surface de discordance de base de la formation supérieure de Valensole (= D1 des coupes de la page Auribeau).

La dislocation tectonique qui sépare la nappe de son autochtone est, pour l'essentiel, une surface de chevauchement, mais elle présente des caractères qui méritent d'être analysés de plus près. Ses traits structuraux changent d'ailleurs de part et d'autre du Rocher de Sainte-Marguerite où l'orientation de son tracé cartographique passe de NE-SW (dans sa partie septentrionale) à N-S (dans sa partie méridionale).

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La crête de la Fubie, vue du nord-ouest depuis l'église de Mélan (voir la suite vers la droite au cliché suivant) (cliché original obligeamment communiqué par Mr. J. Julien).
ØR = surface de charriage du lobe de La Robine de la nappe de Digne ; a.M = anticlinal du Mouras (pli d'axe N-S, déversé vers l'ouest) ; s.E = synclinal de l'Esclaye.
Les tirets roses soulignent la base de l'"écaille intermédiaire" (Terres Noires et molasses rouges en série renversée) ; les tirets jaunes soulignent la surface de discordance de base de la formation supérieure de Valensole (= D1 des coupes de la page Auribeau).

1/ Depuis le col d'Ainac jusqu'au Rocher de Sainte-Madeleine il s'agit d'une surface de chevauchement franche, à faible pendage vers l'est, sur laquelle la succession liasique du lobe de La Robine repose globalement presque en accordance, c'est-à-dire en commençant par sa base triasique. Son tracé coupe toutefois des plis affectant le matériel charrié dont les axes, presque N-S, font avec lui un angle presque aigu. Leurs cœurs anticlinaux (au nord celui du Mouras et au sud celui de la Bigue) sont soulignés par des gypses et dolomies triasiques ; c'est l'érosion de ceux du premier qui a d'ailleurs déterminé le creusement du haut ravin de Valarié qui sépare la butte de l'Esclaye de la crête du Mouras.

Or on constate
a) que les fonds des synclinaux sont tranchés par la surface de chevauchement (suppression du Trias et même de l'Hettangien-Lotharingien pour le synclinal de l'Esclaye) ;
b) que l'azimut très méridien des axes de ces plis y résulte en fait d'une torsion dans un sens horaire par rapport à l'orientation qu'ils ont, plus au sud-est (à l'instar d'ailleurs des autres plis du lobe de La Robine : voir le schéma structural en fin de page).
Ceci résulte sans doute de l'antériorité de ces plis par rapport au charriage et de ce qu'ils ont été transportés en subissant une déformation par l'effet d'un coulissement dextre aux approches du tracé actuel de la surface de charriage.

En corollaire de ces observations il est à noter d'autre part que les gypses triasiques ne tapissent aucunement la surface de charriage, à la différence de ce qui a lieu à d'autres endroits à la base de la nappe de Digne (par exemple aux environs de Tanaron et d'Esclangon) : ils n'ont donc joué ici aucun rôle de lubrifiant, contrairement à ce que l'on croit pouvoir avancer à propos de beaucoup d'autres exemples de charriages dans les Alpes (et à ce qu'affirme, donc de façon erronée, le panneau explicatif du col de l'Hysope).

D'autre part cette surface tectonique s'avère être doublée, en contrebas, par un accident secondaire parallèle, délimitant ainsi une écaille intermédiaire entre nappe de Digne et autochtone : elle est constituée par une lame de Terres Noires et de molasses rouges, qui étaient sans doute initialement transgressives sur elles, mais qui sont maintenant disposées en série renversée.

L'origine de cette lame n'est pas évidente, mais une hypothèse plausible est qu'elle ait été arrachée au secteur d'Ainac : l'on rencontre effectivement, à l'est et au nord du col d'Ainac, une telle succession renversée, enroulée par l'antiforme du col d'Ainac, qui s'y intercale aussi sous la surface de chevauchement de la nappe (voir les coupes de la page "Auribeau").

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La montagne du Siron, vue du N-NW depuis l'église de Mélan (suite vers la droite du cliché précédent) (cliché original obligeamment communiqué par Mr. J. Julien).
a.B = anticlinal de la Bigue ; s.G = synclinal de Givaudan ; ØR = surface de charriage du lobe de La Robine de la nappe de Digne ; éc.int. = écaille intermédiaire (Terres Noires et molasses rouges en série renversée) ; disc. = surface de discordance de base de la formation supérieur de Valensole (= D1 des coupes de la page Auribeau).

2/ Au sud du Rocher de Sainte-Madeleine le contact entre nappe et autochtone est au contraire constitué par un système de failles dont les surfaces de cassures sont fortement redressées (voire verticales) et tranchent en biseau les plis affectant la succession liasique du lobe de La Robine. Les plus occidentales délimitent un couloir étroit où se trouve intercalée une bande de Terres Noires presque continue, large d'une centaine de mètres.

Le Rocher de Sainte-Madeleine est isolé lui même par une zone de fracture allongée N-S qui détermine le vallonnement du revers oriental de cette butte et qui est donc à peu près parallèle à celle qui la limite du côté ouest. D'après mes anciennes observations elle serait soulignée par une bande N-S de Terres Noires, mais elle est attribuée à du Rhétien par la carte à 1/50.000°. Quoi qu'il en soit on peut sans doute la considérer comme un couloir de faille satellite du couloir de Courbons.

En dépit de hiatus d'affleurements pour le suivre vers le sud, il est clair que ce couloir de failles se prolonge sur près de de 4 km jusqu'à rejoindre le tracé de l'accident de Courbons qui délimite du côté oriental, depuis cette localité, les affleurements de conglomérats de Valensole pratiquement non déformés et presque horizontaux.

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Le chaînon du Siron et les pentes qui en descendent vers Thoard, vus du SW, depuis la D117 (hameau des Bourres).
f.C = accident de Courbon, limitant les terrains charriès du lobe de La Robine ; A.B = anticlinal de la Bigue : son coeur triasique traverse la pente en diagonale, en descendant vers la gauche, avant d'être sectionné par f.sM = faille de Sainte-Madeleine ; s.G = synclinal de Givaudan.

L'attitude très redressée de ce contact tectonique et le fait qu'il recoupe obliquement les plis des compartiments qui l'encadrent sont deux caractères qui ne correspondent pas du tout à ceux d'une simple surface de chevauchement, sensiblement parallèle aux couches charriées, comme la nappe de Digne en montre à sa base en mains endroits (notamment au sud de Digne et au NE du Rocher de Sainte-Madeleine). En fait il s'agit sans doute du prolongement méridional du décrochement de Mélan, qui est masqué plus au nord sous les conglomérats supérieurs de Valensole.

La butte de Pié-Gros est à première vue dans une position similaire à celle du Rocher de Sainte-Madeleine. En fait il n'en est rien car elle est constituée de Crétacé supérieur et repose sur les conglomérats de Valensole supérieurs, à l'ouest de l'accident de Courbons en butant contre ce dernier. C'est un élément allochtone qui est étranger, par sa constitution, au lobe de La Robine de la nappe de Digne ; les caractères et l'origine de cette klippe* sont examinés à la page "Thoard".

On peut faire diverses hypothèses sur la signification du couloir tectonique de l'accident de Courbons.

Celle, qui vient a priori à l'esprit, est qu'il s'agit d'une zone d'écailles, détachées, par effet d'entraînement, sous la surface de chevauchement de la nappe de Digne. Mais cette dernière manière de voir ne s'accorde ni avec la disposition géométrique du couloir (sa limite orientale est fortement redressée) ni avec la constitution de ses éléments (bon nombre d'entre eux, tels ceux formés de Terres Noires, de Tithonique et a fortiori de Crétacé supérieur, n'ont pu être prélevés ni à la partie haute de l'autochtone ni à la partie basse de la nappe, car ils y sont absents).
1- Le contenu de ce couloir se raccorde vers le sud, près de Courbons, aux affleurements de terrains mésozoïques qui disparaissent, près de cette localité, sous le Miocène marin, en s'enfonçant sous la marge orientale des affleurements du bassin de Valensole. Il est donc vraisemblable que les lambeaux qui le constituent ont été détachés de la zone de raccord entre la partie véritablement frontale de la nappe, qui est resté cachetée par les conglomérats de Valensole à la suite de la première étape de sa mise en place, et celle, plus orientale, restée non recouverte par la sédimentation néogène, qui a été remise en mouvement lors de l'individualisation du lobe de la Robine (cf. aperçu général). C'est d'ailleurs dans cette zone charnière que, lors du dépôt des conglomérats de Valensole, ont pu s'interstratifier la plupart des olistolites, qui sont vraisemblablement à l'origine des lambeaux les plus exotiques (tel celui de Pié Gros).
2- La disposition des lambeaux tectoniques de ce couloir, en alignement le long du tracé de l'accident de Courbons, est attribuable au jeu à la fois décrochant et chevauchant de celui-ci, jeu qui est d'autre part indiqué par de nombreux autres indices (*). En effet cette disposition évoque bien celle d'une série de navettes*, détachées par un faisceau des failles secondaires, navettes qui auraient été alignées en chapelet par le coulissement et, en outre, refoulées latéralement (comme par le soc d'une charrue) par l'effet de la composante chevauchante du jeu de cet accident.

(*) en particulier par le fait qu'il sectionne les axes des plis NNW-SSE du matériel charrié et ceux de même azimut de la formation de Valensole, au lieu de les faire se chevaucher, ainsi que par le fait qu'il en émane un grand nombre de petits décrochement qui découpent la partie frontale du lobe de la Robine en panneaux successifs, décalés dans le sens dextre.

Ce texte reprend, en les retouchant, des vues déjà exposées dans la publication n° 132


Carte structurale schématique des environs de La Robine.
On a délibérément omis les plis précoces, synsédimentaires du Miocène (synclinaux d'Esclangon et d'Auribeau).
Noter la virgation sigmoïde des axes de plis, très significative de mouvements de coulissement dextre, le long des limites ouest et surtout est du lobe de la Robine.
extrait de la publication n°132
 



Carte géologique simplifiée des environs de Digne
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M.Gidon (1977), publication n° 074
catalogue des autres cartes de la section Gap-Digne


voir aussi l'aperçu général sur les environs de Digne


cartes géologiques à 1/50.000° (*) à consulter : feuille La Javie.

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