La dépression de Laragne

Le Gapençais méridional (entre vallées du Buëch et de la Durance au nord de Sisteron)

On désigne sous le nom de Dépression de Laragne la région de collines qui inclut les vallées du Buëch et de la Durance au nord de Sisteron et qui se ferme du côté septentrional au pied des reliefs des chaînons les plus méridionaux du Bochaine. Elle s'étend de Laragne au NW à Melve au NE et de Mison au SW à Châteaufort à l'est.

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La partie occidentale de la dépression de Laragne, vue du SE d'avion (cliché original obligeamment communiqué par Mr. P. Deschamps).
a.S = anticlinal de Séderon ; s.E = synclinal d'Éourres ; a.Ch = anticlinal de Chanteduc ; s.M = synclinal de la Méouge.

Du point de vue structural ce domaine correspond à l'anticlinorium de Laragne qui est constitué de plis allongés globalement à peu près E-W. Ils sont le plus souvent érodés de façon suffisamment profonde pour montrer jusqu'au coeur de Dogger des anticlinaux, les couches du Jurassique supérieur et de l'Eocrétacé n'étant conservées que dans certains synclinaux. L'un de ces plis, l'anticlinal de Sigoyer, a révélé la présence d'un chevauchement profond, masqué en surface, à la faveur d'un forage réalisé par la COPEFA (Compagnie des Pétroles France-Afrique). D'autres, comme l'anticlinal de Savournon, montrent une rupture chevauchante de leur coeur au niveau même de la surface du sol.
     On parvient plus ou moins bien, selon les secteurs, à répartir ces plis en deux familles de directions axiales différentes :
 - La première, NE-SW (en moyenne N70°E), est attribuable vraisemblablement au plissement anté-Sénonien car, plus au N, en Dévoluy, celui-ci possède principalement cette direction. Ces plis s'accompagnent même de chevauchements, comme celui, à vergence SSW, de la Montagne d'Aujour.
 - La seconde, E-W à WNW-ESE (principalement N120°E), est nettement post-oligocène puisqu'elle affecte des terrains de cet âge aux confins nord-orientaux de la région (Montagne des Selles et secteur de Faucon).
  Certains des plis appartenant respectivement à ces deux familles sont nettement entrecroisés et donnent alors des cuvettes structurales, comme celle de la montagne de l'Aup, à l'est de Saint-Genis (où l'allongement NW-SE prédomine cependant). Dans d'autres cas on voit un même pli changer progressivement de direction par inflexion axiale. On peut alors penser qu'il s'agit de plis anté-sénoniens repris et tordus : ceci s'observe notamment au NE de Laragne, où les plis des Terres noires, presque E-W sur l'essentiel de leur tracé, passent à leur extrémité orientale à des plis N70 et à leur extrémité occidentale à des plis N120.

Par ailleurs l'anticlinorium de Laragne est traversé par une grande ligne de dislocation NW-SE, oblique à ses plis, que l'on peut appeler l'accident de Lazer. Ce dernier ne correspond pas à une simple cassure continue mais affecte en plus l'aspect d'une bande anticlinale jalonnée de pointements plus ou moins importants de matériel triasique, essentiellement gypseux. Certains d'entre eux correspondent à l'évidence à des diapirs* : c'est le cas notamment du grand affleurement de gypses de Lazer, qui est frangé d'une zone de couches rebroussées par places jusqu'à la verticale qui évoque clairement un "rim-syncline"*.
Cette dislocation a peut-être fonctionné durant la sédimentation des Terres noires car certains lambeaux de Trias semblent plutôt interstratifiés dans ces dernières. Elle a certainement rejoué ultérieurement et semblerait, au vu des inflexions du tracé axial des plis, avoir eu alors une composante de mouvement dextre. Une période d'activité récente (mécanique ou thermique), remontant à 7,9 MA, y a été décelée par l'étude des feldspaths potassiques du Trias.

Au quaternaire la dépression de Laragne a été façonnée par l'érosion et surtout par les dépôts d'alluvions glaciaires et péri-glaciaires lors des deux dernières glaciations. En effet, à cette occasion, le glacier de la vallée de la Durance s'est avancé jusqu'à Sisteron.
On trouvera quelques détails dans le texte suivant extrait de la notice de la feuille Laragne (auteur M. Gidon).

Le Quaternaire est essentiellement représenté par des dépôts d'origine glaciaire, surtout morainiques, accompagnés par des alluvionnements glacio-lacustres, fluvio-glaciaires et périglaciaires importants. Deux extensions glaciaires principales y ont été mises en évidence, celle des moraines externes, attribuée au Riss et celle des moraines internes, du Würm, sans subdivisions stratigraphiques majeures. Des témoins de dépôts d'origine fluvio-glaciaire plus anciens, probablement du Quaternaire moyen et/ou ancien, ont une extension moindre que celle des moraines externes. Par contre d'épais dépôts post-würmiens, interglaciaires latu senso, sont particulièrement répandus et intéressants du fait des datations absolues auxquelles ils ont donné lieu.
     L'histoire quaternaire que l'on peut ici retracer est assez fragmentaire pour les époques antérieures au Quaternaire supérieur du fait de la rareté et de la discontinuité des dépôts précédant les extensions glaciaires du Riss et du Würm.
     - Le Quaternaire ancien et/ou moyen n'est représenté que par les moraines et les lambeaux de terrasses alluviales de Mison et du Puy, à l'W du Poët, perchées respectivement à 200 et 175 m environ au dessus de la Durance. Ces nappes témoignent déjà d'un fort encaissement des vallées mais leur faciès, analogue à celui des nappes fluvio-glaciaires plus récentes, porte à y voir des témoins de glaciations anciennes n'ayant pas atteint les limites des extensions du Pléistocène récent. Elles ont donc été attribuées, bien que sans argument paléontologique ni géochronologique, au Mindel et au Günz.
     - Le Quaternaire récent est mieux connu et caractérisé par l'existence de deux complexes morainiques, l'un "externe" l'autre "interne", attribués respectivement au Riss et au Würm par référence au système quaternaire du nord des Alpes.
     Le complexe rissien, outre les moraines "externes" comporte d'épais colmatages glacio-lacustres de faciès variés dans le secteur de Laragne - Chateauneuf-de-Chabre et s'accompagne d'une série de moyennes terrasses (dont il ne reste que des lambeaux) dans les vallées du Buëch et du Sasse. Le glacier rissien, dont on ne connaît ici qu'un seul épisode de crue certain, s'est étendu jusqu'à Sisteron.
     On ne sait rien de l'interglaciaire Riss-Würm (Eémien), sinon qu'il correspond à un creusement modéré de la vallée de la Durance, grâce auquel les dépôts würmiens sont emboîtés en contrebas de ceux du Riss.
     Le Würm est marqué d'abord par le dépôt d'une épaisse nappe alluviale, cimentée sur les parois exposées, le poudingue de Durance, d'origine fluvio-glaciaire probable. Puis le glacier de la Durance s'est avancé sur ces alluvions, en formant une "basse terrasse", jusqu'à proximité de Sisteron et s'est retiré sans doute aussitôt (pas de formes construites) jusque en amont du Poët. Il y a alors stationné longuement (double arc des moraines frontales du Poët-Rourebeau, prolongé en amont par des crêtes latérales). Enfin le glacier a disparu en ne laissant d'autres formes de stationnement qu'une série de basses terrasses étagées, emboîtées dans les poudingues de Durance. A cette époque fonctionnent encore les deux diffluences très modestes des cols de Blaux et de Sarraut.
     Au Post-Würm (ou Holocène) se produisent d'intenses alluvionnements torrentiels dans les fonds de vallées préalablement dégagés par les glaciers. ils forment d'épais et larges colmatages caillouteux et limoneux (Lazer, Melve) qui débordent largement sur les dépôts plus anciens, notamment des basses terrasses (Saléon, Montéglin, etc..). La présence de restes organiques (troncs d'arbres, couches tourbeuses et ligniteuses) permet de situer ces alluvionnement entre le Tardiglaciaire (Dryas II) et l'Atlantique, et même, localement, le Subboréal. Depuis la tendance globale est revenue au creusement.


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