Le Tabor de la Matheysine
Le socle cristallin de la bordure orientale de la Matheysine

La partie méridionale du chaînon qui limite et domine la Matheysine du côté oriental, c'est-à-dire la montagne du Tabor ( 2389 m) et son prolongement méridional, le Piquet de Nantes, sont constitués, à la différence de sa partie septentrionale (Le Grand Serre), par le socle cristallin.
Ce socle appartient structuralement au bloc du "rameau interne" de Belledonne, comme celui du chaînon du Taillefer - Armet - Coiro : l'entaille d'érosion que la Roizonne (vallée de Lavaldens) y a ouverte, entre ce dernier et la crête du Tabor, bien que profonde, est cependant dénuée de toute origine structurale (son tracé sinueux recoupe au contraire toutes les limites entre ensembles rocheux).
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La crête du Tabor, d'enfilade, vue du sud depuis le sommet du Châtel.
spa (en rouge) = surface de la pénéplaine anté-triasique ; mcs+aph = micaschistes à passées d'albitophyres* de la "série corticale*" ; gn.al = gneiss albitiques de Lavaldens ; ØL = surface de chevauchement délimitant la fenêtre de Lavaldens ; ØO = surface de chevauchement de la nappe ophiolitique de Chamrousse (tectonique paléozoïque) ;
f.C = faille de Comboursière (voir la page Grand Serre).
Les tirets émeraude marquent la limite du colmatage d'alluvions fluvio-glaciaires (all.fl-gl).

Cette entaille de la vallée de la Roizonne donne une coupe naturelle du corps de la montagne. Elle y montre la superposition de deux ensembles de socle cristallin :

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Le versant sud-oriental du Tabor (rive droite de la Roizonne)
, vu du sud, depuis les basses pentes du Coiro (Les Clapisses, alt. 1350, au nord Nantes-en-Ratier).
spa (en rouge) = surface de la pénéplaine anté-triasique (noter son ploiement en un anticlinal déjeté vers l'ouest) ; mcs+aph = micaschistes à passées d'albitophyres* de la "série corticale*" du Taillefer ; gn.al = gneiss albitiques de Lavaldens ; ØL = surface de chevauchement délimitant la fenêtre de Lavaldens ; Øo = surface de chevauchement de la nappe ophiolitique de Chamrousse (tectonique paléozoïque) ; f.e = faille extensive (anté-triasique) orientée presque N-S, à compartiment oriental abaissé.

- un soubassement appartenant à l'ensemble "cortical", relativement récent (paléozoïque inférieur), formé d'alternances d'anciens sédiments pélitiques (métamorphisés en micaschistes) et de coulées d'anciennes laves dites "albitophyres" à cause de leur composition de type spilitique.

Il se rétrécit vers le nord, où il forme encore la bande de roches à laquelle appartient le sommet du Taillefer avant de se fermer à la latitude du Lac Fourchu.

- une partie supérieure constituée par une succession ophiolitique renversée, clairement rattachable à la nappe de Chamrousse, par l'intermédiaire des affleurements de La Morte et du Poursollet (voir plus de détails en fin de page).

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Le versant oriental de la crête du Tabor, vu du NE, depuis les pentes du Taillefer (au dessus du Pas de la Mine).
ØO = surface de chevauchement de la nappe ophiolitique de Chamrousse ; ØL = surface de chevauchement délimitant les deux fenêtres du Lavaldens ; gn.al = gneiss albitiques du Lavaldens ; aph = "albitophyres" (spilites paléozoïques) associés, en interstratification, aux micaschistes sombres (mcs) de la série du Taillefer.

Sur le versant ouest du Tabor le socle cristallin, ployé en demi-voûte, est tout juste dénudé de sa couverture sédimentaire.

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Le versant ouest de la crête du Tabor (partie sud) vue du sud-ouest, d'avion, depuis l'aplomb de Nantes-en-Ratier.
spa (en rouge) = surface de la pénéplaine anté-triasique : elle tangente visiblement la crête qui descend du Tabor vers le col de l'Oullière (le prolongement de cette surface correspond aux pentes occidentales du Taillefer, qui se profilent en arrière-plan). Elle décrit, avec sa couverture, une demi-voûte anticlinale (qui correspond à l'anticlinal de la Salle en Beaumont qui affecte, au sud de l'entaille de la Bonne, la marge occidentale des montagnes du Beaumont (voir pages "Valbonnais" et "Saint-Michel-en-Beaumont")
On observe que, sur le flanc ouest de cette demi-voûte, le Lias vient en contact direct avec le cristallin. Ce contact correspond sans doute à une faille extensive jurassique (mais on peut aussi envisager qu'il corresponde à un étirement local du Trias lors de la tectonique compressive alpine).
Les gabbros, gneiss amphiboliques, amphibolites et leptynites de la partie haute de la crête appartiennent à la nappe ophiolitique de Chamrousse et reposent par un très ancien chevauchement (Øo) sur les micaschistes à passées d'albitophyres (c'est donc une klippe* anté triasique ...).

En effet l'on y voit, au nord-ouest du sommet, la surface de la pénéplaine anté-triasique, à peine disséquée par l'érosion en rive sud du ravin de la Jonche (environs du Lac de Charlet), s'enfoncer vers le nord sous cette couverture, dès la rive droite du ravin. Au pied de la bosse du Pérollier et au col de l'Oullière la base de la série stratigraphique y est soulignée de façon spectaculaire par les teintes jaunes des couches triasiques, que le ravin de la Jonche met assez largement à nu, notamment au niveau des ravines de Côte Dure (voir la page "Grand Serre").
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Le versant nord-ouest du Tabor vu de l'ouest depuis l'aplomb de Villard-Saint-Christophe.
f.c = faille de Comboursière (voir la page Grand Serre) ; Øo = surface de chevauchement de la nappe ophiolitique de Chamrousse (tectonique paléozoïque) ; mcs.n = micaschistes noirs ("graphiteux").
La discordance des couches mésozoïques sur le paléozoïque se voit spectaculairement, toutes les bandes de roches métamorphiques étant coupées presque orthogonalement par la surface de la pénéplaine anté-triasique (spa).
On remarque que, dans le bas des pentes (sous Pracouiret et plus au sud en contrebas du sommet du Banc), la succession mésozoïque est tronquée à sa base : il s'agit vraisemblablement du repos originel des couches en onlap* sur la surface du socle, inclinée avant le dépôt : cette disposition semble être en relation avec un jeu synsédimentaire de la faille Comboursière (voir la page Grand Serre).


On trouvera des renseignements complémentaires sur les localités du cliché ci-dessus dans le site du Patrimoine matheysin, à la page "Oullière"


Les Oreilles du Loup ("gendarmes" de l'arête nord du Tabor) vues de l'ouest, depuis les pentes nord occidentales du Tabor
Les abrupts sont formés de gabbro, alors que leur pied (talus herbeux) est jalonné par une bande de serpentinite qui s'élève vers la droite, jusqu'à la crête, qu'elle franchit, vers 2290, à la selle nord du Tabor.


Les roches constitutives du cristallin des crêtes du Tabor sont sensiblement les mêmes que celles qui affleurent à l'est de Chamrousse, ce qui confirme que l'on se trouve ici dans la même situation structurale, au sommet de l'édifice tectonique hercynien qui constitue le rameau interne de Belledonne. On y trouve en effet les constituants d'une série métamorphique dérivant d'un ancien fond océanique anté-alpin.
Il s'agit principalement de gabbros, largement représentés au nord et à l'est du sommet ; mais des intercalations de serpentinites s'y développent aussi, en lentilles aux Oreilles du Loup et plus largement dans la crête de La Chinarde, où elles avaient été exploitées comme marbre (ceci est peut-être à l'origine du nom du col de l'Oullière car les amphibolites sont aussi désignées du nom de "pierre ollaire" par les marbriers)
.

On trouvera des renseignements complémentaires sur cette localité dans le site du Patrimoine matheysin, à la page "Chinarde"

La position, en haut de l'édifice structural du socle cristallin, de ces roches ophiolitiques est interprétée comme le résultat d'un renversement de la succession d'un fond océanique datant du paléozoïque ancien, à l'occasion d'un charriage d'âge inconnu, hercynien ou anté-hercynien (voir la page "socle de Belledonne").

 Gabbro à grain moyen
aux abords de la crête des Oreilles du Loup.
Sur une dalle rocheuse, patinée et couverte de lichens, on a déposé des échantillons cassés de frais.

 Gabbro à gros grain
Échantillon récolté en contrebas ouest de la crête des Oreilles du Loup

Sur la crête des Bancs, au sud du sommet du Tabor, ou dans ses pentes occidentales au Lac Charlet et en contrebas, affleurent plutôt des amphibolites litées, qui y sont souvent à grain fin et de teinte vert foncé (souvent plus clair en patine). Ces dernières forment une lame épaisse qui repose sur les micaschistes et les volcanites métamorphiques de la "série corticale*" (dont le toit atteint la crête au Piquet de Nantes).

amphibolites en entaille fraîche, sur la nouvelle piste en contrebas du lac de Charlet
amphibolites patinées, sur le sentier du lac de Charlet
s1 = foliation métamorphique : elle est peu marquée, la roche étant ici presque massive, et a un pendage modéré (moins de 30°) vers l'ouest.



Coupes au travers du socle cristallin de la partie sud du massif du Taillefer d'après F. Carme ; extrait de la carte géologique au 1/50.000°, feuille La Mure (présentation retouchée).
Les "kératophyres" = "albitophyres" sont des spilites métamorphisées (intercalées en coulées entre les passées de micaschistes noirs.
N.B. : La "formation de Rioupéroux"(micaschistes) est en fait figurée par des hachures verticales.
La "formation du Tabor" correspond aux ophiolites de Chamrousse et la "formation du Lavaldens" (gneiss albitiques à passées amphiboliques) semble correspondre aux "gneiss de la Balme" de la partie la plus basse de la coupe de Rioupéroux.
Les rapports tectoniques entre ces trois entités sont difficiles à comprendre : en effet F.Carme interprète les affleurements de la série du Taillefer qu'il a observé dans le soubassement du Tabor comme une intercalation tectonique, entre la formation de Rioupéroux et celle de Lavaldens ; or une telle intercalation ne s'observe pas, plus au nord, dans la coupe de la Romanche (voir les pages "Belledonne proprement dit" et "Romanche").


 

aperçu général sur la Matheysine
aperçu général sur le chaînon du Taillefer


cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuille La Mure


Carte géologique simplifiée des environs du Taillefer et de l'Armet
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M.Gidon (1977), publication n° 074


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