Vieux Emosson

le versant oriental des montagnes du Fer à Cheval (Haut Giffre)

Le revers oriental de la crête frontière franco-suisse, depuis le Buet au sud jusqu'au Fer à Cheval au nord, est drainé par les torrents de Tré-les-Eaux et de Barberine, l'un et l'autre affluents de rive gauche du torrent principal, de l'Eau Noire (ce dernier descend de Vallorcine vers le N-NE, en tranchant en biseau le prolongement géologique septentrional du massif des Aiguilles Rouges, avant de se jeter dans le Rhône).Les eaux se rassemblent, au pied de ces crêtes, dans deux lacs dont les niveaux ont été surhaussés chacun par un barrage, celui de Barberine, le plus septentrional et le plus important, qui occupe le haut vallon de ce nom (voir la page "Barberine") et celui de Vieux Emosson, plus méridional et situé à plus haute altitude (2205).

Le lac de Vieux Emosson, bien que légèrement surhaussé par un petit barrage est essentiellement retenu par un verrou constitué par la pente occidentale du socle cristallin du flanc ouest de la voûte anticlinale du massif des Aiguilles Rouges. Les couches sédimentaires autochtones qui reposent sur ce socle affleurent en rive est de ce dernier lac : elles y sont constituées par une dalle de dolomie blanches (confondues sur les carte avec les calcaires clairs du Jurassique supérieur) reposant sur des bancs de dolomies ocreuses et de grès du Trias, le tout plaqué sur les gneiss du Charmoz avec un pendage modéré vers l'ouest.

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Le lac du Vieux Emosson, vu du sud depuis le col des Corbeaux (cliché original obligeamment communiqué par M. Matthieu Petetin)
ØS = surface de chevauchement de la série subalpine de Sixt ; ØCa = surface de chevauchement des Cavales ; ØF = chevauchement de la Finive (vergence* en direction de l'arrière plan) ; f.V = faille NE-SW de la Veudalle (compartiment nord abaissé) = prolongement dans la couverture du décrochement anté-triasique d'Emosson.
"td" = dolomies triasiques blanches ; "M" = calcaires présumés du Jurassique supérieur.
L’astérisque rouge localise la dalle à empreintes (voir plus loin dans cette page)).

Cette couverture du socle cristallin affleure aussi au nord du lac, où l'on voit qu'elle s'enfonce sous l'éperon rocheux de la crête orientale de la Finive, qui ferme le cirque. Le contact tectonique qui la sépare de la succession subalpine chevauchante, est incliné parallèlement aux couches de l'un et de l'autre des ces deux ensembles rocheux.

Mais il s'avère (observations inédites en 2023, de M. Delamette) que, dans les pentes des Bletteys, la surface de friction, qui est bien caractérisée, se situe au dessus des dolomies blanches triasiques autochtones. Elle leur superpose une succession débutant par des calcaires clairs, présumés d'âge jurassique supérieur et se complétant vers le haut, en apparente continuité stratigraphique, par des marnes oxfordiennes passant aux calcaires argileux noirs du Bajocien qui affleurent dans les pentes supérieures de l'Œil de Bœuf : il s'agirait donc d'une série inverse.
Plus à l'est, à l'aplomb de la Tête à Lugon, l'épaisseur de la barre calcaire à patine claire s'accroît brutalement à partir du piton 2413. Elle prend alors une stratonomie évoquant celle d'une barre tithonique disposée à l'endroit et se montre affectée d'un beau repli en "S" qui aurait une vergence ouest avec une telle polarité (mais vers l' est si la série est renversée). Le Bajocien la recouvre enfin à la faveur d'un contact, apparemment accordant aux surfaces de couches, qui est affecté par ce pli.

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L'extrémité orientale de la crête est de la Fenive
, vue de l'est depuis Emosson. (cliché original obligeamment communiqué par Mr. M. Delamette).
ØS = surface de chevauchement de la couverture subalpine du massif de Sixt ; "s.pa" = surface de la pénéplaine anté-triasique.
L'éperon saillant de l'Œil de Bœuf est armé de calcaires à patine claire qui reposent sur le Trias adhérent au socle cristallin. Ils sont très vraisemblablement attribuables au Jurassique supérieur du fait de leurs faciès et de leur stratonomie, comportant une barre calcaire massive évoquant celle du Tithonique.

 Ce contact se poursuit au delà, dans le vallon de Barberine, qu'il traverse en passant sous les eaux du nouveau lac d'Emosson (voir la page "Barberine") pour se raccorder, en Suisse à la base de la nappe de Morcles (voir la page "Tour Sallière").

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La crête frontière entre le Fer à Cheval et le Lac d'Emosson, vue du sud depuis la partie haute de la crête orientale du Cheval Blanc. (cliché original obligeamment communiqué par M. M. Petetin).
ØCa = chevauchement des Cavales ; ØF = chevauchement de la Finive ; a.cG = anticlinal du col de Grenairon ; s.G = synclinal de la Tête de Grenairon.
La perspective d'enfilade de la crête fait se projeter l'une sur l'autre des sections décalées des plis, notamment au niveau du Grenairon .

La rive ouest du lac de Vieux Emosson est, à l'opposé de celle orientale, entièrement dominée par des escarpements : ce sont ceux de la crête Buet - Tenneverge, plus précisément de sa partie frontalière comprise entre Le Cheval Blanc et la Pointe de la Finive. Cette crête est exclusivement constituée par les couches inférieures, bajociennes, de la succession subalpine charriée (prolongement de la nappe de Morcles vers le sud). Mais cette tranche de strates y est sur-épaissie tectoniquement, par le jeu de deux chevauchements, le chevauchement de la Finive et le chevauchement des Cavales, à la faveur desquels elle est répétée trois fois. En outre la tranche supérieure se montre reployée par un couple de plis déversés vers l'ouest (anticlinal et synclinal du Grenairon), ce qui accroît encore son épaisseur.

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La rive occidentale du Lac de Vieux Emosson et le versant suisse de la crête frontière, vus depuis le barrage de retenue du lac. (cliché original obligeamment communiqué par Mr. M. Delamette).
ØS = surface de chevauchement de la couverture subalpine ; ØF = chevauchement de la Finive ; ØCa = surface de chevauchement des Cavales ; les charnières a.G et s.G représentent le couple anticlinal + synclinal du Grenairon.
Le biseau aigu selon lequel le versant coupe les replis du Grenairon déforme leur dessin dans le sens d'un étirement horizontal.
D'autre part la perspective fuyante des pentes (plus modérées) des parties hautes de la crête (notamment à la Pointe des Cavales) est peu favorable pour en observer la structure. ...

L'abrupt qui tombe de cette crête est sensiblement perpendiculaire à la surface des couches, mais orienté selon da direction azimutale de ces dernières, qui pendent vers l'ouest ; de ce fait il présente le grave inconvénient, pour l'examen structural, d'être à peine plus méridien que les axes de plis et les surfaces de chevauchement. Sur le versant opposé, qui domine le cirque du Fer à Cheval, la situation est la même en ce qui concerne cette faible obliquité par rapport aux axes de plis, mais la surface topographique ne tranche guère les strates puisque elle est inclinée dans le même sens qu'elles : cela a conduit l'érosion à donner à ce versant occidental une pente bien plus modérée et à y dégager d'assez vastes dalles structurales (voir la page "Fer à Cheval").

Peu au sud du lac, sur les pentes inférieures de la Pointe du Charmoz, l'érosion a dégagé, en dalles structurales, les couches de grès quartzitiques de la base du Trias ; certaines de ces dalles portent des empreintes fossiles de pattes de quadrupèdes. Plus d'informations sur ce gisement paléontologique sont fournies à la page spéciale du site "Géologie et glaciologie du Pays du Mont Blanc".


La dalle à empreintes, vue du nord (cliché original obligeamment communiqué par M. Matthieu Petetin).

Au sud du cirque du Vieux Emosson la combe monoclinale ouverte le long du contact sédimentaire / socle cristallin se ferme par la crête du Col Vieux - Mont Oreb, avant de s'épanouir de nouveau dans le haut vallon de Tré les Eaux, où ce contact peut y être suivi presque en continu, au pied des escarpements orientaux du Buet.

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Les environs de Vallorcine, vus du Sud vue pseudo-aérienne obtenue à l'aide de "Apple-Plans"
Traits rouges = surface de la pénéplaine anté-triasique ; Trait Blanc = faille de La Remua ; Trait Jaune = faille de Chamonix.

Comme partout le long de ce contact il est frappant de constater la faible déformation des couches triasiques et notamment des bancs de dolomie : ceci est étonnant si l'on considère qu'ils sont censés avoir supporté la surcharge d'une nappe épaisse et le cisaillement lié au charriage qui se serait concentré à leur niveau (et que la lame de calcaires qui les recouvre a pu être interprétée comme un flanc inverse extrêmement étiré) ... (voir la page "nappe de Morcles").

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La rive gauche du vallon de Tré les Eaux vue du SW depuis le point coté 2273, en marge de la langue glaciaire (cliché original obligeamment communiqué par M. Matthieu Petetin).
Ce cliché montre le contact de la couverture sédimentaire, parfaitement accordante, sur le socle cristallin.
M = calcaires clairs du Jurassique supérieur ; ØS = surface de chevauchement de la couverture subalpine ; ØCa? = prolongement plausible du chevauchement des Cavales.


 

 


carte géologique au 1/50.000° à consulter : feuille Chamonix


Carte géologique simplifiée

redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M. Gidon (1977), publication n° 074



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